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Craintes d’une guerre interconfessionnelle en Irak

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  • Craintes d’une guerre interconfessionnelle en Irak

    Le suspense demeure maître du jeu en Irak après la récente surprise des urnes, qui offrent, même s’il s’agit de résultats partiels, la victoire à l’ancien Premier ministre laïque Iyad Allawi avec 11 346 voix de plus que son adversaire, l’actuel Premier ministre Nouri El Maliki.

    Selon les derniers chiffres publiés dimanche portant sur 95% des bulletins dépouillés, le Bloc irakien devance l’Alliance de l’Etat de Droit (AED) de 11 346 voix. Au total, M. Allawi a recueilli en fait 2 631 388 voix, contre 2 620 042 pour M. Maliki. L’Alliance nationale irakienne, un regroupement de partis religieux chiites, arrive en troisième position avec 1 976 412 voix.

    Le Premier ministre, qui a qualifié de transparente l’opération de vote du 7 mars, a réfuté ces résultats et a demandé un recomptage manuel des bulletins.

    Mais la commission électorale a rejeté sa demande, estimant que le scrutin s’est déroulé dans de bonnes conditions et qu’aucune fraude de grande ampleur n’a été enregistrée.

    S’il est normal et légitime qu’un candidat conteste les résultats d’une élection, il est toutefois inadmissible qu’il use de son poste de Premier ministre pour faire pression sur une commission électorale indépendante.

    Nouri El Maliki a, en effet, usé d’un ton menaçant en exigeant un nouveau décompte des voix.

    Dans un communiqué publié dimanche dernier, le Premier ministre a affirmé qu’il était toujours «le chef des forces armées» et responsable de «la politique du pays». Des propos qui ont été interprétés comme une «menace» et une tentative de faire «pression» sur la commission électorale, dans le but d’influencer les résultats finaux du scrutin.

    Mais le chef de l’AED a justifié ce nouveau décompte par le fait qu’il chercherait à «préserver la stabilité politique, empêcher une dégradation de la situation sécuritaire et un retour à la violence».

    Selon son conseiller, Ali El Moussawi, «il y a des signes de manipulation dans le dépouillement qui ont provoqué des inquiétudes et un mécontentement de la part de l’opinion publique».

    De son côté, la commission électorale s’est dit prête à recompter les bulletins si les plaignants présentaient des recours concernant des bureaux de vote bien ciblés, mais elle s’est refusée à refaire cette opération à travers tout l’Irak. «Nous avons fourni à toutes les entités politiques des CD avec les résultats des dépouillements dans les centres électoraux, après des vérifications en profondeur de notre part», a dit le président de la commission électorale irakienne, Faraj El Haidari à l’AFP.

    «S’ils doutent et pensent qu’il y a une erreur, qu’ils nous avisent pour recompter dans ce centre précis mais pas dans tout l’Irak», a-t-il déclaré, ajoutant que les partis peuvent toujours présenter des plaintes avant l’annonce des résultats définitifs, prévue vendredi prochain.

    Pour le conseiller d’El Maliki «le processus se déroulait bien jusqu’au niveau de 60% des bulletins dépouillés. Les chiffres ont augmenté de façon illogique et cela a poussé de nombreux blocs à demander au Premier ministre et au président de la République des décomptes manuels». Djalal Talabani a répondu favorablement à la requête des partis plaignants en demandant «un nouveau décompte manuel» mais dans «certaines provinces».

    Le président irakien n’a pas précisé quelles étaient les provinces concernées par cette opération. Le nouveau décompte des voix changerait-il l’issue de ce scrutin, qui s’était déroulé dans un climat marqué par la recrudescence d’attentats terroristes ayant visé aussi bien les chiites que les sunnites.

    Les autres minorités ethniques et obédiences religieuses irakiennes n’ont pas échappé aux attentats kamikazes, dont certains avaient été dirigés contre tout ce qui représentait et symbolisait l’autorité irakienne. Une défaite d’El Maliki avait été prédite par certains analystes locaux de la politique irakienne.

    C’est le cas de Hamid Fadel, professeur de sciences politiques à l’Université de Baghdad, qui a déclaré à l’AFP que «M. Maliki aura du mal à être le prochain Premier ministre, car il lui manque une majorité suffisante et la plupart des autres partis n’en veulent pas». «Ses relations avec les Kurdes ne sont pas bonnes, l’ANI l’accuse d’exercer un pouvoir personnel et les sunnites d’avoir relancé la politique de ‘‘débaassification’’ qui les visent», a-t-il expliqué.

    Selon lui, le nouveau chef de gouvernement sera un autre membre de l’AED ou Iyad Allawi. Ce sentiment est partagé par Aziz Jabbar, de l’université de Moustansariya de Baghdad. «Je ne crois pas que M. Maliki sera le nouveau Premier ministre, car il n’est pas accepté par les groupes politiques importants. Il lui aurait fallu avoir une avance beaucoup plus grande», a-t-il confié, cité toujours par l’AFP. Un détail qui mérite d’être soulevé, c’est celui de la participation massive, cette fois-ci, des sunnites qui avaient boycotté le scrutin en 2005. La participation a oscillé entre 61 et 73% dans les régions sunnites, alors qu’elle était entre 57 et 63% dans les provinces chiites. Baghdad a peu voté avec 53% de participation. Les efforts consentis par les uns et les autres, à commencer par El Maliki, de fédérer toutes les composantes ethniques et religieuses afin de rebâtir une démocratie en Irak semblent avoir volé en éclats à l’occasion de ces législatives, dont on disait qu’elles allaient ouvrir une ère de prospérité et de démocratie nouvelle dans l’ancienne Babylone.

    Si les différents acteurs politiques ne se décidaient pas à oublier leurs rivalités tribales et religieuses, l’Irak risquerait de sombrer dans une nouvelle guerre interconfessionnelle et interethnique qui entraînerait sa décapitation définitive en micro-Etats.

    Cette hypothèse avait déjà été émise à maintes fois et serait même un projet que les Etats-Unis tentent de concrétiser dans les meilleurs délais dans le cadre de son vaste plan du Grand-Moyen-Orient, regroupant tous les pays de l’Afrique du Nord et ceux de la péninsule arabique.

    Il s’agit également de garantir une meilleure sécurité pour son allié Israël. Un Irak uni pourrait mettre en péril la survie de l’Etat hébreu qui, jusqu’à maintenant, bénéficie du soutien inconditionnel de son ami les Etats-Unis. La division de l’Irak constituerait aussi un meilleur moyen de brader ses richesses pétrolières et gazières que referme son sous-sol.

    L’enjeu est donc clair et de nombreux Irakiens en sont conscients, une raison pour laquelle l’urgence est d’oublier les rivalités religieuses et ethniques et de former un gouvernement uni autour d’une seule cause : reconstruire un pays autour d’une seule entité qui est la démocratie.

    Par Lyes Menacer, La Tribune
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