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La caravane et les dormeurs du val

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  • La caravane et les dormeurs du val

    A l’évidence, les parlementaires nationaux qui ont le pouvoir de proposer et de voter les lois et les membres du gouvernement semblent satisfaits du champ culturel, des niveaux qualitatif et quantitatif de sa production dans tous les arts. Ils semblent satisfaits du programme, des évolutions et des investissements (privés/publics) dans la formation, l’acquisition des technologies et des matériels pour le cirque, le théâtre, le cinéma, l’audiovisuel, les revues culturelles spécialisées, la danse, l’opéra, les conservatoires, la bande dessinée, les spectacles son et lumière, la modernisation des musées et l’achat d’œuvres du patrimoine universel, etc.

    Ils semblent satisfaits car il n’y a aucune place pour tout cela dans les programmes des partis qui gouvernent.

    Il n’y a pas l’ombre d’un travail rendu public par des commissions compétentes au sein du Parlement. Il n’y a aucune approche industrielle, fiscale, législative et règlementaire pour impliquer le secteur privé dans d’éventuelles industries culturelles. En clair, la satisfaction est béate, générale, dans la mesure où les «festivités», «les semaines», les commémorations héritées du parti unique entretiennent la routine, de lointaines nostalgies dans lesquelles le mémoriel, l’idéologie, la légitimité historique, la présence des officiels locaux et régionaux font illusion et consomment de petits budgets plus ou moins «tchipés».

    Tous ont l’alibi majeur dit institutionnel, le baobab censé couvrir l’état réel des choses, la forêt des retards, archaïsmes qui travaillent en profondeur la société, la jeunesse, l’environnement, la barbarie d’un urbanisme sans goût, sans queue ni tête.

    Les rares hirondelles restées au pays tentent dans des conditions financières, réglementaires uniques au monde, dans le dénuement de faire survivre des arts, des pratiques culturelles de plus en plus contaminés par le folklore, l’officiel, la censure, l’autocensure et le bricolage dans tous les secteurs. Les résultats sont aujourd’hui présents, visibles et en même temps indiscutables.

    Après la guerre d’indépendance, la période socialiste dont aucun bilan n’a été fait pour mieux éradiquer les pans historiques, les mémoires et les discours qui dérangent l’ordre établi et la transition fantôme, ce fut, au forceps, l’intégration inévitable dans la mondialisation et le passage compliqué à l’économie de marché avec la chute du communisme.

    Les urgences furent la suppression des conseils de la culture, de l’audiovisuel et de l’information, premiers cadeaux et victoires offerts à l’ex-FIS et, ensuite, à ses successeurs avec ou sans barbe et robe longue.

    La société n’a plus de repères culturels, de fondements qui étaient pourtant présents avant l’arrivée des Arabes, des janissaires turcs.

    La longue nuit coloniale et ses dégâts ravageurs sur le moi collectif n’ont pas livré encore leur profondeur parce que le bilan n’a pas été fait au profit de discours anticolonialistes plus émotifs et intéressés que scientifiques.

    Les jeunes, aux plans culturel, cultuel, sont déchirés entre le salafisme, la oumma fantasmée, la bigoterie, la haine des femmes, les frustrations sexuelles, la harga et les émeutes.

    Se cacher derrière l’existence d’un ministère de la Culture est dérisoire. Ce département au minuscule budget a beaucoup à faire pour des missions régaliennes. Entre le patrimoine historique, sa restauration, son entretien et souvent sa réhabilitation, ses charges sont lourdes. Un ministère n’a ni une vocation industrielle, ni commerciale et encore moins celle de producteur de biens et services culturels. Les petites sommes du FDATIC, les aides au théâtre et aux festivals, le fantomatique CNCA et l’administration centrale font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont en ressources humaines, managériales et financières.

    Ni plus ni moins.

    Le rayonnement d’une culture est à la mesure de ses industries, de ses exportations et de son management où le secteur privé est dominant dans les pays qui, justement, rayonnent. La place et le rayonnement dans le monde, dans la culture mondiale, semblent aujourd’hui satisfaire les «institutions».

    Heureux les endormis !

    Ces derniers pris dans une sieste rémunérée ne voient pas la caravane qui est programmée pour «algérianiser» à son insu, et pour cause ! l’écrivain de grand talent qu’était Camus et si possible en faire un militant de la cause du glorieux FLN (1954-1962), sinon l’absoudre de ne pas avoir eu le courage de choisir la justice pour mieux sauver l’honneur de sa mère-patrie.

    Heureux les endormis au moment où Yasmina Khadra, un écrivain de talent, et aussi cadre supérieur de l’Etat, claironne que, durant la féroce colonisation et la terrible guerre de libération, «tout le monde était beau, tout le monde était gentil» dans les deux collèges où pourtant, comme dirait Coluche, il y avait une population plus égale que l’autre.

    A quand l’inculpation de Ben M’hidi au nom de la bonne littérature qui, elle, doit être soutenue ? Celle de Camus n’a besoin ni d’être enrôlée pour des combats douteux ni de devenir un investissement politico-mondain. C’est un grand écrivain qui a fait des choix politiques loin de ceux algériens et étrangers sur tous les continents : l’indépendance et la liberté pour l’Algérie.

    Par Abdou B., la Tribune
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