Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Devant les murs de la ville par Khaled Bouali

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Devant les murs de la ville par Khaled Bouali

    Cette pièce de théâtre Devant les murs de la ville est une traduction et adaptation, par Khaled Bouali, de l’œuvre du dramaturge allemand Tankred Dorst (La grande imprécation devant les murs de la ville), mise en scène par Sonia Mekkiou et jouée par Nadia Larini, Bouha Seif-Eddine, Saber Amiour et Boufenaz Abderraouf.

    Dans la Chine impériale, une femme part à la recherche de son mari qu’elle n’a plus revu depuis son départ à la guerre. Devant la grande muraille, elle implore l’empereur afin qu’il le lui rende. Car l’homme c’est aussi l’avenir de la femme. Un soldat parmi d’autres prétend qu’il est son époux. Il doit convaincre du bien-fondé de sa déclaration. Et son sort est fixé : la mort ou le retour dans les bras de son épouse. Elle, elle veut un mari, n’importe lequel, alors que lui trouve en cette occasion la chance de quitter le front. Ce ne sera pas chose aisée. Comme quoi, la fin justifie les moyens.

    Du machiavélisme sur les planches, teinté de situations absurdes.


    «Théâtre de l’absurde ? C’est une définition donnée par ceux qui veulent cacher leurs faiblesses », selon le traducteur batnéen du texte. Le mari et la femme doivent prouver qu’ils le sont vraiment.

    Heurts et malheurs d’êtres qui combattent pour leurs idéaux. Un échange de souvenirs, de propos romanesques et de petits détails de la vie conjugale (leur première rencontre, leur ancien vécu, ce qu’ils aimaient comme aliments…) s’installe devant l’autorité de l’empereur et le ricanement des éléments du bataillon. L’hilarité chinoise est ici frappée d’un cynisme et d’un mépris affligeants envers la gent féminine. La patience de la femme sera mise à rude épreuve dans l’attente du retour du mari.

    On est devant En attendant Godot dans son aspect actif, cette fois-ci. C’est le synopsis de l’œuvre originale.

    «La femme chinoise, comme l’Hindoue, a été la plus humiliée, la plus martyrisée et la plus privée de sa liberté dans l’histoire de l’humanité. Bien avant les Arabes de la Djahilia, les hommes enterraient vivants leurs bébés de sexe féminin. Dès son jeune âge, la fille chinoise se voit porter toutes sortes d’objets humiliants, tels l’anneau redresseur du coup», nous informe Khaled Bouali.

    Dans la version algérienne, c’est l’extrapolation des lieux et des faits qui a été effectué. Seulement. La femme s’appellera Houria El-Ouezna. L’homme portera le nom de Hocine Ellim.

    Quelques spécificités algériennes ont remplacé le décor chinois, tels l’oued, le gourbi, la cruche.

    Des comportements aussi : l’homme est présenté un tantinet violent, il recours dans ces accès de colère à la tentative de frapper sa conjointe. «Une spécificité propre à beaucoup de Méditerranéens», pour reprendre la formule de Khaled Bouali.

    L’universalisme de l’œuvre allemande est, quant à lui, maintenu. Le mur, ce n’est pas celui de Berlin comme certains le pensent. Nullement. Ce sont tous les murs que l’humanité a édifiés pour régler ses problèmes. Enfin, c’est ce qu’elle a cru bon de faire.

    «Dès qu’on trouve des difficultés à résoudre les problèmes ou les conflits, on construit un mur. Le dernier en date est celui que tente de le faire l’Egypte pour barrer la route aux Palestiniens fuyant le génocide de Ghaza», nous dira Sonia Mekkiou, dans une déclaration avant la présentation. «C’est fou, en surfant sur le Net, de compter le nombre de murs, qu’on ne connaît pas, implantés un peu partout à travers le monde.»

    La pièce est centrée sur le personnage de la femme, magistralement joué par Larini Nadia, du Théâtre régional de Batna.

    En usant de sa féminité, de sa roublardise pour récupérer son mari et de sa patience devant les murs visibles et invisibles qui s’enchevêtrent éternellement, elle a réussi à écraser de sa présence le reste de la troupe. Une bête de scène, avantagée par une frêle silhouette, est née. Les acteurs semblent se perdre dans le décor.

    La scénographie a eu aussi sa part du lion. D’ailleurs, le scénographe, Abderrahmane Zaâboubi, s’en sortira avec une jambe plâtrée, probablement à cause des efforts consentis.

    Bouha Seif Eddine tire également son épingle du jeu. Certes, ses fans ne peuvent lui pardonner d’avoir un peu délaissé ses personnages loufoques de ses inoubliables one man shows ! C’est pour cette raison, peut-être, qu’il trouve des difficultés à réciter des textes bien ficelés. L’improvisation lui manque.

    Riad Boufenaz quitte sa brillante mimique de Jim Carrey pour camper le personnage haut en couleur de l’empereur, et son imposante stature lui confère un aspect autoritaire.

    Sabri Amiour renoue, quant à lui, avec la magie des planches, 20 ans après les avoir quittées : il donnera, malgré lui, un aspect sérieux à un personnage frappé du sceau de l’ironie, celui du juge qui a pour mission de détecter les mensonges des deux partenaires.

    Sept autres acteurs – «ils jouent les rôles d’actants» selon l’auteur algérien – jouent les soldats escaladant le mur, alertant aux mensonges, signalant les abus et jouant souvent, à leurs tours, au mari perdu, Hocine Ellim. Le tout, d’une manière chorégraphique, qui illustre leur souci d’avoir appris les rudiments de l’expression corporelle imprégnée lors du cycle de formation lancé, il y a de cela quelques temps, sur les planches du théâtre régional de Skikda.

    À souligner également le rôle médiatique joué avec brio par Khider Abdelawahab, chargé de la communication, qui a gratifié la presse locale d’une place de choix au balcon du théâtre et d’un dossier presse et de CD afin de faciliter le travail d’information des journalistes de Skikda.

    «Il n’est pas facile de restituer une trame chinoise dans un contexte algérien. On a aussi fait que pour le discours politique, philosophique et romanesque garde l’universalité du message qu’il véhicule», justifie Khaled Bouali les imperfections qui ont un peu émaillé la mise en scène.

    Et d’ajouter : «Cette pièce fera un tabac incessamment.» La générale de Devant les murs de la villea été présentée au Théâtre régional de Skikda, samedi, coïncidant avec la Journée mondiale du théâtre qui se tient le 27 mars de chaque année.

    Par Le Soir
Chargement...
X