Apôtre de l'intégration ou prêcheur radical, Abou Laban a lancé la crise des caricatures.
Début mai 2005, le cheikh Ahmed Abdel Rahman Abou Laban est invité à une conférence sur «les racines du terrorisme en Europe», organisée par les services secrets danois à Copenhague. Son intervention porte sur «l'intégration et la radicalisation des musulmans au Danemark». A la tribune, il succède au ministre de la Justice, Lene Espersen. On le présente alors comme un «imam influent». A l'époque, le religieux d'origine palestinienne est considéré comme l'une des grandes voix de l'islam au Danemark.
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Dix mois plus tard, le leader de la Communauté musulmane (Islamiske Trossamfund) semble avoir perdu toute respectabilité. Le chef du gouvernement danois lui attribue la responsabilité du rebondissement de la crise dite des caricatures de Mahomet. Il l'accuse d'être l'artisan d'une campagne de désinformation menée au Moyen-Orient contre le Danemark. Plusieurs députés réclament même son expulsion. Et les Danois s'interrogent sur la véritable personnalité du religieux, accusé d'exceller dans l'art du double langage.
Orateur brillant. L'imam le plus médiatisé du Danemark reçoit sur un canapé noir, dans la bibliothèque attenante à la salle de prières, rue Dortheavej, au nord-ouest de Copenhague. La barbe grisonnante et le regard intense, l'homme de petite taille offre du thé et fait circuler une boîte de chocolats. Il promet de répondre à toutes les questions. «Je n'ai rien à cacher. Vous me voyez tel que je suis et je vous assure qu'il n'y a pas d'autres Abou Laban», affirme-t-il, en réponse aux critiques qui évoquent sa duplicité. Récemment, l'imam aurait condamné le boycott des produits danois sur des chaînes de télévision locale, avant de s'en réjouir sur la chaîne arabe Al-Jezira. Orateur brillant, il dément, parle d'un «malentendu» et invoque son désir «d'ouverture et de transparence» qui aurait fait de lui une cible facile.
Regrette-t-il d'avoir dépêché une délégation au Moyen-Orient, fin décembre ? «Si j'avais su ce qui allait se passer, j'aurais sans doute fait les choses différemment.» Mais il n'y aura ni excuse ni regret. Au contraire, Abou Laban justifie son initiative : «Nous avons essayé d'établir le dialogue avec les autorités danoises à plusieurs reprises, mais sans succès.» En quête de conseils, une vingtaine d'organisations musulmanes décident donc de consulter plusieurs autorités religieuses au Caire et à Beyrouth. «Notre démarche est identique à celle des catholiques qui cherchent conseil auprès du Vatican», estime l'imam. La délégation a rencontré, parmi d'autres, le secrétaire de la Ligue arabe et le grand mufti de la mosquée Al-Azhar, «comme Nicolas Sarkozy», remarque Abou Laban, tout sourires.
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