04 Mai 2010 Par Feredor
Ce week-end a eu lieu ce qui me semble être un événement majeur et décisif pour l’avenir de l’Europe. Après plusieurs semaines de tergiversations, l’UE et le FMI se sont mis d’accord pour sortir la Grèce de l’ornière en lui proposant une aide de 110 milliards d’euros. Ce plan de soutien a un pays frère endetté aurait théoriquement du nous mettre du baume au cœur et nous rassurer sur le devenir de l’EU. Or, c’est l’inverse qui se produit. L’hésitation européenne au moment même où la maison brulait, la dureté des propos tenus par les médias - à la limite de l’insulte et du racisme – à l’égard de la Grèce, l’implication du FMI et, surtout, l’extraordinaire dureté du plan d’austérité auquel est adossée cette aide font de cette décision européenne un événement extrêmement lourd de conséquences pour notre avenir.
Difficile d’ailleurs de saisir pleinement les implications concrètes d’une telle décision et il faudra sans doute quelques mois, voire quelques années, pour en démêler l’écheveau. Toutefois on peut déjà en percevoir toute la portée symbolique. Pour cela il faut en reprendre la chronologie (Que ceux qui suivent l’actualité n’hésitent pas à m’amender ou à compléter mes propos) :
Un état, La Grèce, désireux pour des raisons évidentes de rejoindre l’Europe et la zone Euro, a « bidonné » ses comptes pour cadrer avec les critères de stabilité financière exigés par l’UE pour toute nouvelle adhésion. Bidonnage en vérité très relatif puisque, à l’époque, rien de ce qu’à fait la Grèce n’était illégal. Il s’agissait juste pour elle d’organiser ses finances et sa dette de telle façon qu’elles soient suffisamment présentables pour l’entrée dans l’Europe. Autrement dit, elle n’a fait que procéder à une « manipulation » de ses données financières, manipulation pratiquée aujourd’hui à grande échelle par tout acteur économique public et privé qui souhaite présenter une physionomie avantageuse de son bilan (Ce qui, au passage, remet en cause le culte du marché libre reposant sur une information « parfaite »). Et comble de l’ironie, le montage financier qui a permis cette opération de « blanchiment » à été orchestré par… la banque américaine Goldman & Sachs, celle là même qui, aujourd’hui est au cœur de la tourmente (petite tourmente en vérité), pour avoir parié contre les intérêts des clients qu’elle conseillait.
Face à ce « bidonnage » l’Europe qui, pour des raisons tactiques et stratégiques, avait absolument besoin d’intégrer très rapidement un maximum de pays dans la zone Euro, a fait semblant de ne pas voir que les comptes de l’Etat Grec ne correspondaient pas à la réalité de son économie et lui a donc ouvert en grand les portes de l’UE.
C’est ainsi que les Grecs ont pu vivre plusieurs années « au-dessus de leurs moyens »avec la double bénédiction de Bruxelles et des marchés.
Tout aurait pu continuer ainsi, dans l’hypocrisie la plus totale si, parallèlement, la crise des subprimes orchestrée par les établissements financiers en mal de profits exorbitants n’avait fait irruption sur la scène mondiale. Mise en grave danger par leur propre avidité et menaçant d’entraîner le monde dans leur folie, les banques ont été secourues par les Etats du monde entier à grands renforts de prêts au taux hyper concurrentiel de 1%, et ce sans aucune contrepartie. Gavés, plus que nourris, par les puissances publiques et enivrés par la merveilleuse découverte de leur totale impunité, ces mêmes établissements financiers ont rapidement cherché à faire fructifier cette manne financière miraculeuse sur des marchés plus fiable et moins risqués que les marchés d’actions. C’est donc tout naturellement vers les dettes publiques que les banquiers se sont tournés. Les états étant réputés ne pas faire faillite, et surtout pas en Europe où l’on a tendance à penser que l’UE n’acceptera jamais qu’un de ses membres mette la clef sous la porte, il est apparu qu’il était financièrement rentable de spéculer sur la dette des pays fragilisés en général et de la Grèce en particulier. Dès lors, soumise aux attaques des marchés, cette dernière a été entraînée dans une spirale infernale : plus les taux d’intérêt auxquels les banques acceptaient de prêter augmentaient et plus la dette de la Grèce croissait de concert, entraînant ainsi une dégradation de sa note. Et plus la note baissait et plus il fallait envisager de tailler dans le vif du budget national pour financer la dette, augmentant ainsi de plus belle les taux d’intérêts des éventuels investisseurs privés qui veulent rémunérer le risque qu’ils prennent, risque qu’ils perçoivent en réalité comme faible puisqu’ils sont persuadés que le pays en question ne fera jamais défaut, car soutenu par l’UE. Moralité effrayante, là où il y a un an on sauvait la Grèce avec 50 milliards d’Euros la spéculation va obliger l’Europe à en débourser 110 !
Ainsi, des établissements financiers sauvés par la puissance publique grâce à des prêts massifs à 1%, ont utilisé l’argent de leur sauvetage pour mettre à genoux les mêmes états qui les avaient sauvés en leur prêtant à leur tour de l’argent à plus de 5%, avec en prime des leçons de morale sur « l’attitude financière irresponsable des grecs qui sont corrompus et et fainéants », le tout pendant que des gens comme le financier américain Monsieur Paulson gagnait dix millions de dollars par jour en pariant sur la baisse des produits financiers qu’il conseillait à tout le monde.
Tout cela semble bien immoral me direz-vous. Et bien non, c’est simplement amoral, car les marchés financiers n’ont ni âme ni conscience et n’obéissent pas aux règles du bien et du mal.
Ce week-end a eu lieu ce qui me semble être un événement majeur et décisif pour l’avenir de l’Europe. Après plusieurs semaines de tergiversations, l’UE et le FMI se sont mis d’accord pour sortir la Grèce de l’ornière en lui proposant une aide de 110 milliards d’euros. Ce plan de soutien a un pays frère endetté aurait théoriquement du nous mettre du baume au cœur et nous rassurer sur le devenir de l’EU. Or, c’est l’inverse qui se produit. L’hésitation européenne au moment même où la maison brulait, la dureté des propos tenus par les médias - à la limite de l’insulte et du racisme – à l’égard de la Grèce, l’implication du FMI et, surtout, l’extraordinaire dureté du plan d’austérité auquel est adossée cette aide font de cette décision européenne un événement extrêmement lourd de conséquences pour notre avenir.
Difficile d’ailleurs de saisir pleinement les implications concrètes d’une telle décision et il faudra sans doute quelques mois, voire quelques années, pour en démêler l’écheveau. Toutefois on peut déjà en percevoir toute la portée symbolique. Pour cela il faut en reprendre la chronologie (Que ceux qui suivent l’actualité n’hésitent pas à m’amender ou à compléter mes propos) :
Un état, La Grèce, désireux pour des raisons évidentes de rejoindre l’Europe et la zone Euro, a « bidonné » ses comptes pour cadrer avec les critères de stabilité financière exigés par l’UE pour toute nouvelle adhésion. Bidonnage en vérité très relatif puisque, à l’époque, rien de ce qu’à fait la Grèce n’était illégal. Il s’agissait juste pour elle d’organiser ses finances et sa dette de telle façon qu’elles soient suffisamment présentables pour l’entrée dans l’Europe. Autrement dit, elle n’a fait que procéder à une « manipulation » de ses données financières, manipulation pratiquée aujourd’hui à grande échelle par tout acteur économique public et privé qui souhaite présenter une physionomie avantageuse de son bilan (Ce qui, au passage, remet en cause le culte du marché libre reposant sur une information « parfaite »). Et comble de l’ironie, le montage financier qui a permis cette opération de « blanchiment » à été orchestré par… la banque américaine Goldman & Sachs, celle là même qui, aujourd’hui est au cœur de la tourmente (petite tourmente en vérité), pour avoir parié contre les intérêts des clients qu’elle conseillait.
Face à ce « bidonnage » l’Europe qui, pour des raisons tactiques et stratégiques, avait absolument besoin d’intégrer très rapidement un maximum de pays dans la zone Euro, a fait semblant de ne pas voir que les comptes de l’Etat Grec ne correspondaient pas à la réalité de son économie et lui a donc ouvert en grand les portes de l’UE.
C’est ainsi que les Grecs ont pu vivre plusieurs années « au-dessus de leurs moyens »avec la double bénédiction de Bruxelles et des marchés.
Tout aurait pu continuer ainsi, dans l’hypocrisie la plus totale si, parallèlement, la crise des subprimes orchestrée par les établissements financiers en mal de profits exorbitants n’avait fait irruption sur la scène mondiale. Mise en grave danger par leur propre avidité et menaçant d’entraîner le monde dans leur folie, les banques ont été secourues par les Etats du monde entier à grands renforts de prêts au taux hyper concurrentiel de 1%, et ce sans aucune contrepartie. Gavés, plus que nourris, par les puissances publiques et enivrés par la merveilleuse découverte de leur totale impunité, ces mêmes établissements financiers ont rapidement cherché à faire fructifier cette manne financière miraculeuse sur des marchés plus fiable et moins risqués que les marchés d’actions. C’est donc tout naturellement vers les dettes publiques que les banquiers se sont tournés. Les états étant réputés ne pas faire faillite, et surtout pas en Europe où l’on a tendance à penser que l’UE n’acceptera jamais qu’un de ses membres mette la clef sous la porte, il est apparu qu’il était financièrement rentable de spéculer sur la dette des pays fragilisés en général et de la Grèce en particulier. Dès lors, soumise aux attaques des marchés, cette dernière a été entraînée dans une spirale infernale : plus les taux d’intérêt auxquels les banques acceptaient de prêter augmentaient et plus la dette de la Grèce croissait de concert, entraînant ainsi une dégradation de sa note. Et plus la note baissait et plus il fallait envisager de tailler dans le vif du budget national pour financer la dette, augmentant ainsi de plus belle les taux d’intérêts des éventuels investisseurs privés qui veulent rémunérer le risque qu’ils prennent, risque qu’ils perçoivent en réalité comme faible puisqu’ils sont persuadés que le pays en question ne fera jamais défaut, car soutenu par l’UE. Moralité effrayante, là où il y a un an on sauvait la Grèce avec 50 milliards d’Euros la spéculation va obliger l’Europe à en débourser 110 !
Ainsi, des établissements financiers sauvés par la puissance publique grâce à des prêts massifs à 1%, ont utilisé l’argent de leur sauvetage pour mettre à genoux les mêmes états qui les avaient sauvés en leur prêtant à leur tour de l’argent à plus de 5%, avec en prime des leçons de morale sur « l’attitude financière irresponsable des grecs qui sont corrompus et et fainéants », le tout pendant que des gens comme le financier américain Monsieur Paulson gagnait dix millions de dollars par jour en pariant sur la baisse des produits financiers qu’il conseillait à tout le monde.
Tout cela semble bien immoral me direz-vous. Et bien non, c’est simplement amoral, car les marchés financiers n’ont ni âme ni conscience et n’obéissent pas aux règles du bien et du mal.
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