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Gérard Mestrallet dirigera GDF-Suez

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  • Gérard Mestrallet dirigera GDF-Suez

    Gérard Mestrallet , pdg de Suez, prend la direction de GDF-Suez mais a annoncé qu'il sera en tandem avec Jean-François Cirelli, pdg de GDF.

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    Les Belges devront s'y faire. Quand le prince Philippe, héritier du trône, se rend à l'étranger accompagné de la fine fleur économique du royaume, un Français, Gérard Mestrallet, figure désormais en bonne place dans la délégation. Comme au Brésil fin novembre. Propriétaire depuis quelques jours de 98 % d'Electrabel, le principal producteur belge d'électricité, le PDG de Suez fait désormais partie des hommes qui comptent à Bruxelles.

    Cela ne devrait pas lui poser trop de problèmes. Propulsé à la tête de la vénérable Société générale de Belgique en 1991, à l'époque principale filiale de Suez, Gérard Mestrallet n'a cessé, depuis, de montrer sa volonté de s'intégrer dans le microcosme belge. Manifester son goût pour la Stella Artois ne fut pas très compliqué. Assister aux matches de foot, un cornet de frites à la main, non plus. En revanche, apprendre le flamand fut méritoire... et payant. Répondre en néerlandais à une assemblée générale de petits actionnaires ne peut qu'attirer la sympathie, ce qui n'est pas inutile quand l'objectif est qu'ils vous apportent leurs titres.

    Lancée au cœur de l'été, l'acquisition d'Electrabel était politiquement osée. Alors que les plus hautes autorités de la République défendaient Danone contre une hypothétique OPA de Pepsi, une multinationale française se proposait de racheter l'EDF belge ! Certes, l'opération était amicale, Suez possédant 50,1 % d'Electrabel depuis plusieurs années. Cela étant, l'affaire n'était pas jouée d'avance. Est-ce parce que M. Mestrallet avait pris soin d'informer auparavant le premier ministre belge ? Parce que le redoutable Albert Frère, principal actionnaire de Suez et homme le plus riche de Belgique, a convaincu ses compatriotes ? Ou tout simplement parce que ceux-ci ont "moins la fibre nationale que l'esprit de clocher", selon un universitaire désabusé ? Quoi qu'il en soit l'OPA s'est déroulée sans problème.

    Au siège parisien de Suez, on a le triomphe modeste. Cavalier émérite, Gérard Mestrallet a une fois de plus franchi l'obstacle. A deux doigts d'être remercié par ses actionnaires il y a trois ans, le voici aujourd'hui à la tête d'un groupe de 160 000 salariés, présent essentiellement dans deux pays, la Belgique et la France, et deux secteurs : l'environnement (traitement des eaux, gestion des déchets) et l'électricité. Grâce à Electrabel, il est le 5e électricien européen.

    Même si le groupe a encore des ambitions mondiales, notamment en Asie, l'acquisition d'Electrabel marque la fin d'une certaine époque : celle où Suez rêvait de faire des bénéfices tout en réduisant "la fracture économique des continents" en apportant l'eau aux plus déshérités de la planète. Ancien collaborateur de Jacques Delors au ministère des finances (1982-1984), Gérard Mestrallet a gardé un côté chrétien-social. Amener l'eau aux bidonvilles de Buenos Aires était, en 2001, l'une de ses "plus grandes fiertés". Moins d'un an plus tard, c'était son cauchemar. La dévaluation du peso argentin oblige le groupe à provisionner 500 millions d'euros. Une somme portée, depuis, à 750 millions d'euros. Cette ardoise, ajoutée à l'échec en 2001 d'une tentative de fusion avec Air Liquide, pousse les actionnaires à douter.

    A la fin 2002, certains administrateurs envisagent alors d'exiger sa démission. Celui dont le parcours ressemblait jusque-là étrangement à celui de Jean-Marie Messier réussit un exploit dont son alter ego fut incapable : rester en fonctions en démontant une à une les pièces qu'il avait assemblées auparavant. "Il est d'une endurance à toute épreuve. Il a fait le boulot qu'en bonne logique son successeur aurait dû faire", constate un banquier d'affaires, mi-sérieux, mi-ironique.

    Adepte du triple saut à Polytechnique, Gérard Mestrallet retombe toujours sur ses pieds. Ses actionnaires lui demandent de céder 10 milliards d'actifs en deux ans ? Il en vend quatorze en vingt mois. Le principal intéressé minimise ces turbulences. "Ce n'est pas en 2002, mais en 1995, que j'ai été en proie aux nuits sans sommeil. Quand je suis arrivé à la tête de Suez, ce groupe était un groupe financier. Or je pensais que nous ne pouvions pas devenir un acteur majeur à l'échelle du continent. Il me fallait donc vendre Indosuez et devenir majoritaire dans notre filiale industrielle Electrabel pour prendre un nouveau départ. Ensuite, le chemin était tracé." De fait, Suez n'a aujourd'hui plus rien à voir avec le conglomérat financier des années 1990, sauf son ancrage franco-belge.

    N'hésitant pas à grimper le Tourmalet à vélo pour se prouver ce dont il est capable ou à faire le coup de poing contre deux malfrats qui veulent s'emparer de sa voiture, Gérard Mestrallet est un faux calme dont l'opiniâtreté est aujourd'hui légendaire, même en affaires. "Mine de rien, il réussit à imposer une stratégie de long terme à des actionnaires qui ne jurent que par le court terme", reconnaît un ancien cadre du groupe.

    Mais l'homme a aussi appris à être prudent. Certains de ses proches préconisent-ils une fusion avec Gaz de France pour contrer EDF ? "Inutile de rêver. C'est politiquement impossible", tranche-t-il. Faut-il revoir les règles qui gouvernent le capitalisme ? Tout juste convient-il que, "dans une économie globale, les entreprises ne peuvent dégager durablement 15 % de profits alors que la croissance mondiale est d'à peine 5 %".

    Sa priorité, c'est désormais l'Europe. "Dans les dix ans, Suez aura contribué, en poursuivant sa stratégie dans les deux métiers, à apporter une contribution importante à la sécurité énergétique de l'Europe, grâce notamment au développement du nucléaire et du gaz naturel liquide, dont nous sommes un des leaders." Presque une évidence pour cet ami de Pascal Lamy.

    "La pause de l'Europe institutionnelle et politique rend encore plus nécessaire l'engagement européen des entreprises", affirme-t-il. Pour montrer sa détermination, M. Mestrallet a indiqué que Suez serait une des premières à utiliser le tout nouveau statut de société européenne. Une façon aussi peut-être de galvaniser des troupes traumatisées par les restructurations passées et qui peuvent avoir le sentiment d'être davantage dirigées par un stratège hors pair que par un général en chef charismatique. Mais il est vrai que la Belgique n'a pas toujours laissé des bons souvenirs aux grognards français.


    Gérard Mestrallet



    1949 : Naissance à Paris.

    1982 : Diplômé de l'ENA et de Polytechnique. Entre à la direction du Trésor et au cabinet de Jacques Delors.

    1995 : Devient PDG de la compagnie de Suez, puis président du directoire de Suez Lyonnaise des eaux en juin 1997.

    2005 : OPA sur le groupe belge Electrabel.

    Par le Monde
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