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Faire de la politique

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  • Faire de la politique

    Un Edito très interessant de la part du redacteur en chef de Telquel : Ahmed Reda Benchemsi.
    -------------
    "Les journalistes indépendants font de la politique”. Cette affirmation péremptoire a été avancée, mercredi dernier, en marge d’un débat public sur le rôle de la presse, par un homme politique connu. Même fausse, l’opinion de cet homme ne doit pas être ignorée, dans la mesure où elle est largement répandue dans l’establishment marocain. Rappelons donc, pour mieux la contrer, quelques principes de base :
    “Faire de la politique”, c’est détenir (ou chercher à détenir) le pouvoir. Et on parle ici de pouvoir concret : celui auquel on accède par les urnes (ou par les nominations royales), celui que confère la maîtrise des budgets publics, des agents de l’administration, ainsi que d’une vaste palette de moyens de sanction et de promotion pour mieux contraindre l’administration à agir comme on veut qu’elle agisse. Bref : faire de la politique, c’est détenir (ou chercher à détenir) des outils concrets d’exercice du pouvoir.
    Nous autres, journalistes indépendants, n’avons aucun outil concret entre les mains, si ce n’est un clavier et un appareil photo. Alors non, cent fois non : nous ne faisons pas de politique. Nous exprimons des idées politiques, et c’est fondamentalement différent. Contrairement aux véritables acteurs politiques, nous ne disposons d’aucun moyen pour concrétiser nos idées. Notre rôle se limite à les exprimer… et à espérer qu’un acteur politique (un vrai) en tiendra compte un jour. Cela ne va pas plus loin, cela ne peut pas aller plus loin – faute de moyens d’action, tout bêtement.

    Mais creusons. D’après notre homme (et tous ceux, nombreux, dont il reflète fidèlement la pensée), nous disposons bien d’un moyen pour faire appliquer nos idées : “l’énorme influence” que nous sommes censés avoir sur “l’élite”, faiseuse de la chose politique et économique du royaume. Encore mieux : d’après notre homme, nous avons le pouvoir de “façonner l’opinion” de cette élite. Un lecteur, surtout s’il appartient à “l’élite”, a-t-il aussi peu de jugement, de recul critique ? Son esprit est-il donc vide au point que nos modestes opinions aient le pouvoir de le “façonner” ? C’est lui prêter bien peu d’intelligence que de le penser…

    Maintenant, un brin d’analyse. Un des effets de la drôle de “transition” que vit le Maroc, c’est que le premier pouvoir (l’exécutif) et le quatrième (la presse indépendante) se retrouvent face à face, sans personne pour faire tampon. Le troisième pouvoir (la justice) ? Disqualifié, vu son étroite dépendance vis-à-vis du premier. Quant au second pouvoir (le législatif), il est vide de toute substance, et ce pour la raison suivante : il n’y a pas de parti d’opposition au Maroc (du moins, pas au Parlement). Car “faire de l’opposition”, rappelons-le, consiste à prendre franchement le contre-pied du pouvoir exécutif. Ce dernier étant concentré entre les mains du roi et de nul autre, personne, évidemment, n’ose le critiquer. Du coup, sans opposition, pas de majorité non plus, puisque l’une se définit nécessairement par rapport à l’autre.

    Conclusion : les politiciens marocains ne font pas de politique. C’est sans doute pour cela qu’ils considèrent que la presse indépendante en fait à leur place… D’après notre inspiré débatteur, “les journalistes, en tant qu’acteurs politiques, doivent être tenus aux mêmes contraintes que tout acteur politique”. Comprenez : l’autocensure et l’allégeance obligatoire (et paralysante) au trône. Autrement dit, son (leur) message est : “Faites comme nous, ne faites rien”. Ou pire, encore : “Faites comme nous, ne pensez rien”. Le nivellement par le bas, voilà donc “la politique” que veulent promouvoir nos politiciens. Quelle tristesse !

    Source : Telquel (Editorial)
    Un jour, liberté naîtra, volonté existera, conscience on aura, et enfin, la paix sera...

  • #2
    Merci beaucoup Marok1

    Pour cet excellent édito .

    En effet ont lit très bien certaines idées battue en brèche concernant le quatrième pouvoir .

    Vraiment très interessant . Merci

    Commentaire


    • #3
      Que de démocratie !!....

      @Merci Marok1
      Dans tout le monde arabe la presse dite indépendante est un alibi pour le pouvoir en place...ce que subissent actuellement les journalistes en Algérie est édifiant...
      Quand le chat n'est pas là, les souris dansent

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      • #4
        « Conclusion : les politiciens marocains ne font pas de politique. C’est sans doute pour cela qu’ils considèrent que la presse indépendante en fait à leur place…»...Bien dit mon vieux lol.

        Les journalistes ne sont pas là pour faire de la politique, encore moins pour changer les choses, mais pour les dire. Une fois les choses nommées, par exemple la pauvreté, la corruption, l'injustice, l'incompétence de nos gouverneurs et autres maux aussi pesants, les gens font bien ce qu'ils veulent avec. En général ils ne font rien. Sauf qu'ils savent maintenant que ces choses existent. C'est déjà bien.

        Des fois, pas très souvent, des fois, !es gens lisent un truc qui les remue fort en dedans. Et ça leur donne envie d'agir pour améliorer les choses. Là, tout de suite. Comme si l'aridité du temps leur donnait soudain soif d'agir.

        Well marok1. C'est bien de nous informer du temps qu'il fait à Casa. Merci.

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