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Maths : l'école française distinguée

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  • Maths : l'école française distinguée

    Les mathématiques françaises peuvent pavoiser. A Hyderabad (Inde), où ont été remises jeudi 19 août les médailles Fields - l'équivalent du prix Nobel en mathématiques -, deux Français, sur quatre primés, ont été distingués : Ngo Bao Chau, actuellement professeur à l'université de Chicago, et Cédric Villani, directeur de l'Institut Poincaré à Paris.





    LES FAITS Mathématiques : deux Français reçoivent la médaille Fields
    EDITO DU "MONDE" Les mathématiciens français au pinacle
    Décernées tous les quatre ans, les médailles Fields, dotées d'un prix de 15 000 dollars canadiens (11 246 euros), ont la particularité d'être remises à des chercheurs de moins de 40 ans. C'est qu'en mathématiques, les meilleurs esprits sont souvent précoces.

    Le doublé d'Hyderabad vient couronner une école française de mathématiques particulièrement brillante. Depuis 1936, date de la création des médailles Fields, onze Français, sur 52 lauréats, ont été récompensés, plaçant la France au deuxième rang mondial, derrière les Etats-Unis (treize médailles) mais devant la Russie (neuf).

    De plus, le prix Gauss, qui récompense des travaux ayant eu un impact au-delà du domaine mathématique, lui aussi remis tous les quatre ans, a été attribué cette année à un Français. Yves Meyer, professeur émérite à l'Ecole normale supérieure (ENS) de Cachan, a joué un rôle fondamental dans le développement de la théorie des ondelettes, au coeur de systèmes de compression de données, comme le standard JPEG de codage des images numériques.

    "C'est toute la diversité des mathématiques françaises qui est mise à l'honneur, qu'elles s'inscrivent dans la lignée Bourbakiste, abstraite, ou qu'elles s'attaquent à des problèmes plus appliqués, dans le sillage de Jacques-Louis Lions", se réjouit Martin Andler (université de Versailles-Saint-Quentin). De fait, les travaux de Ngo Bao Chau ont conduit à la résolution du "lemme fondamental", répondant à un défi lancé en 1967 par le Canadien Robert Langlands, dans les sphères purement abstraites de la théorie des nombres. Les percées réalisées par Cédric Villani portent elles sur des questions plus proches de la physique. Ces médaillés ne sont pas des étoiles filantes isolées. Le programme du Congrès international des mathématiciens organisé à Hyderabad, à l'occasion duquel les prix ont été remis, en témoigne : sur vingt conférenciers pléniers, trois sont Français - Jean-Michel Coron, Claire Voisin et Ngo Bao Chau - auxquels on peut ajouter le Brésilien Artur Avila, chercheur au CNRS.

    EVITER UNE ENDOGAMIE NÉFASTE

    Un autre indice de cette santé éclatante est souligné par Jean-Pierre Bourguignon, directeur de l'Institut des hautes études scientifiques : "Sur 118 candidats aux bourses du Conseil européen de la recherche, 20 étaient français, 9 ont été retenus, sur 19 lauréats. C'est phénoménal !"

    Les clés de ce succès sont multiples. La communauté mathématique française a su de longue date poser les règles d'un fonctionnement vertueux, note Jean-Pierre Bourguignon. Seuls 16 % des recrutements se font dans le laboratoire d'origine (contre 80 % dans d'autres disciplines) pour éviter une endogamie néfaste. En outre, les chargés de recherche sont pour 40 % des étrangers, ce qui nourrit l'attractivité de l'école française.

    Cependant, le réseau humain qui en constitue l'étoffe reste fragile. A l'étranger, ses représentants pourraient espérer un salaire double ou triple, un début de carrière moins tardif. Plus insidieux, la réforme de l'enseignement secondaire pourrait tarir les vocations. "L'ennui peut y guetter les lycéens les plus curieux vis-à-vis des sciences", note Martin Andler qui préside l'association Animath, qui a pour objet de promouvoir cette discipline auprès des jeunes.

    Il n'est pas le seul à craindre que la refonte des programmes ne décourage le recrutement futur des cadres scientifiques du pays. "Nous avons une génération de mathématiciens de 30-40 ans très talentueuse, souligne M. Bourguignon. Mais a-t-on déjà tué la suivante ? La question se pose vraiment." "Jusqu'ici, les mathématiques françaises n'ont pas souffert de la désaffection qu'on observe parfois à l'étranger, grâce à son système de grandes écoles, note Wendelin Werner, médaille Field 2006. Mais dans les classes préparatoires, les effectifs restent assez fragiles et si on peut penser que le recrutement des tout meilleurs sera maintenu, celui des futurs profs de lycée est peut-être moins assuré."

    Or, pour Martin Andler, le défi des années à venir sera "d'assurer un continuum entre la médaille Fields et l'ingénieur". "Il est essentiel de disposer de "traducteurs technologiques", des personnes capables de repérer les problèmes qui se posent à l'industrie et auxquels les maths peuvent répondre", confirme Maria Esteban (CNRS, Paris-Dauphine) qui préside la Société de mathématiques appliquées et industrielles. La ministre de la recherche, Valérie Pécresse, a commandé un rapport à ce sujet, attendu en décembre.

    Ngo Bao Chau, l'obstiné
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    Il y a quelques années, j'avais croisé Ngo Bao Chau qui m'avait dit qu'il avait quelques idées sur le programme de Langlands, se souvient le mathématicien Martin Andler. Il s'agit d'un des Graal des mathématiques. Je m'étais dit, "cause toujours !" Eh bien voilà..."


    Ngo Bao Chau, né en 1972 à Hanoï, vietnamien ayant acquis la nationalité française début 2010, a tenu son pari, au terme de ce qu'il qualifie lui-même de "longue marche à la poursuite du lemme". Un lemme, en mathématique, est un résultat intermédiaire sur lequel on s'appuie pour conduire la démonstration d'un théorème plus important. La démonstration du "lemme fondamental" de Ngo tient en près de 170 pages que bien peu de personnes sur cette planète sont en mesure de comprendre. Il lui vaut la médaille Fields.

    Mais c'est un lemme de dix lignes, rédigé à l'Institut des hautes études scientifiques (IHES), qui fut pour lui décisif. Alors qu'il le croyait insignifiant, Laurent Lafforgue (médaille Fields 2002), à qui il le soumet, le détrompe. "Cet après-midi-là, j'avais vécu l'un des moments les plus décisifs de ma carrière", raconte Ngo.

    Ce surdoué, adolescent champion des Olympiades internationales de mathématiques, a fait l'essentiel de ses études supérieures en France, avant d'oeuvrer au CNRS et dans diverses universités parisiennes.

    Depuis trois ans, il était en résidence à Princeton, dans l'Etat du New Jersey. Il a pu parfaire sa démonstration majeure dans cette autre patrie du lemme avec l'université de Chicago, où il est désormais en poste. "Il est dommage que la France ne l'ait pas retenu", regrette Jean-Pierre Bourguignon, directeur de l'IHES, qui compte l'aider à monter une école mathématique au Vietnam.

    Cédric Villani, le flamboyant

    Un pur produit du système français." L'étiquette ne gêne pas Cédric Villani. "Quand on est bon en maths, on se retrouve à Normale Sup' sans avoir compris ce qui se passe", résume-t-il. Naturellement doué pour les mathématiques, il n'était pas moins intéressé par le reste et aurait tout aussi bien pu marcher dans les pas de ses parents, profs de lettres.

    Mais en classe de troisième, un enseignant qui évoluait "complètement hors programme" a su le captiver. Rue d'Ulm, à Paris, élu président des élèves, il s'investit totalement dans le bicentenaire de l'école, en 1994. "Je me suis dit qu'il était trop sociable pour se couper du monde, pour faire des maths de manière intense", se souvient Martin Andler, dont il fut l'élève.

    Mais son goût pour les mathématiques est le plus fort. Sous la direction de Pierre-Louis Lions (Médaille Fields 1994), il passe une thèse qualifiée de "brillantissime" par Jean-Pierre Bourguignon, directeur de l'Institut des hautes études scientifiques (IHES), qui souligne aussi la précoce maturité démontrée par son maître ouvrage, Optimal Transport (ed. Springer-Verlag Berlin and Heidelberg, 2008).

    En langue profane, les problèmes auxquels s'attache Cédric Villani peuvent être ainsi résumés : comment dépenser le moins d'énergie en déplaçant des objets ? Inattendues, les réponses qu'il a données ont des implications dans le domaine de l'astrophysique (les objets peuvent être des étoiles) ou celui de la fusion nucléaire (les gaz ionisés obéissent aux mêmes équations).

    A 36 ans, il sait qu'il devient un ambassadeur des maths, et semble prêt à l'assumer : "Elles ne sont pas qu'utilitaires, pas qu'un outil de sélection, mais aussi une méthode pour manier les concepts, pour former l'esprit critique." Bref, un instrument de citoyenneté.

    Hervé Morin
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    l'ecole francaise des math a toujours été a a heuteur

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