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Le visage d'un président la nuit du Destin

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  • Le visage d'un président la nuit du Destin

    Le visage d'un président la nuit du Destin

    par Kamel Daoud

    Saâdane ou pas, il y a chez les Algériens, aujourd'hui, une sorte de pessimisme brut qui les fait regarder la mer comme un mur à enjamber pour se sauver et qui les fait voir l'avenir comme une possible dispersion: on replie le drapeau pour le ranger, que chacun reprenne ses martyrs ou son argent, les plus pauvres prendront leurs chaussures et que chacun aille se chercher un autre pays pour tout refaire à partir du générique de l'accouchement. Vision extrême ? Non, presque tous en sont convaincus, au plus haut sommet. Personne n'y croit. Même le président de la République, vu avant-hier à la télé, pendant la célébration de la 27e nuit du ramadhan, avait un visage de colère triste. Le visage d'un homme qui veut aller ailleurs, qui ne veut pas rester, qui veut refaire sa vie, qui regrette un peu et se contente de subir son temps comme on subit un mauvais mariage.

    Récapitulons donc: on a des routes, une partie de l'histoire nationale visible, beaucoup d'argent, des maisons, la possibilité de ne pas crever de faim, des papiers mais il manque quelque chose. Même pour les derniers nationalistes algériens, ceux vaincus par la pesanteur et pas convaincus par l'émotion, il «manque quelque chose». Le quoi ? «L'envie de vivre ensemble». Techniquement, lorsqu'on fait une sorte de bilan émotionnel de la nation, on aboutit à ce constat: on ne veut pas vivre ensemble, tout simplement. On veut mordre, prendre un gros morceau de viande et s'en aller en courant vers un endroit caché pour le manger toute une vie, mais on ne veut pas rester ensemble. On ne veut pas.

    D'où ce pessimiste national algérien. L'autre raison est qu'il n'y a pas de raisons de croire à autre chose. On a tout essayé: du coup d'Etat, à l'islamisme en armes. Rien n'y fait. Le pays reste un lot de terrain mal partagé, à peine une terre. Pour les plus perspicaces, il n'y a plus d'espoir, seulement une grosse discipline d'endurance. Dans les villes, les Algériens attendent le salaire et le jugement dernier. Dans les villages, ils attendent le jugement dernier en s'attroupant près des postes. D'où cette question: que faut-il pour sauver un pays qui a tout pour être un pays mais qui n'en est pas un encore ? De l'argent ? Non. Des routes ? A peine. Des élections ? Un autre président ? Non, non, répond une sorte d'intuition partagée. Le cycle est fermé: chaque dix ans, nous avons droit à un nouveau président, un nouveau cycle d'islamistes et un quota de partance vers des pays possibles. Chaque dix ans, l'Algérie fait le tour complet de son désastre, entre rumeurs, perte d'image internationale, guerre de clans, consensus, répressions, distributions de logements et d'augmentations de salaires, grèves et enterrements. Au bout de dix ans, le cycle est fermé, le président du moment part, on en choisit un autre et on recommence.

    La sortie ? Il n'y en a pas. Ou seulement une seule: l'école. Réformer l'école. Profondément. Y introduire l'algérien comme langue nationale, la rationalité, la tolérance et l'utilité de l'apprentissage en fonction de nos besoins et pas de nos mythes. Ce n'est pas pour rien que le pouvoir garde un ministre de l'Education plus longtemps qu'il ne garde un président. La colonne vertébrale de l'idéologie du système, c'est l'école où il forme ses zombies et ses domestiques. Ce qu'il faut, c'est libérer l'école, et attendre une 3e génération, dans quelques décennies. Une génération exempte de nos pessimismes, comme de nos bigoteries et de l'histoire nationale. Capable de reprendre le pays à partir d'un meilleur alphabet et de fonder une nation autrement que sur le butin. Possible ? Si peu. Le système est capable de vous donner un pipe-line mais jamais de vous céder «son» école. L'une des guerres les plus sourdes de la décennie a été celle contre les «écoles dites privées». Celles qui échappent un peu à ce monopole d'appareils de l'Etat. Car avec une bonne école libre, on aura de vrais électeurs, des chambres de commerce avec un vrai patronat, une vraie élite, un réel rapport au réel, moins de kasma et de Belkhadem et plus d'entreprises et de livres et de récoltes. C'est-à-dire qu'on n'aura pas le pouvoir que nous subissons aujourd'hui. Ni cette grosse douleur d'avoir été trompés après l'indépendance, par l'indépendance.


    Le Quotidien d'Oran

    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "

  • #2
    La sortie ? Il n'y en a pas. Ou seulement une seule: l'école. Réformer l'école. Profondément.
    Même pas celle là...

    Subtilement écrit.
    Mieux vaut un cauchemar qui finit qu’un rêve inaccessible qui ne finit pas…

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    • #3
      Déprime généralisée

      Bonjour

      Oui, ce texte exprime bien cette morosité qui s'éternise

      Personne n'y croit. Même le président ... avait un visage de colère triste. Le visage d'un homme qui veut aller ailleurs, qui ne veut pas rester, qui veut refaire sa vie, qui regrette un peu et se contente de subir son temps comme on subit un mauvais mariage.
      On a l'impression que c'est c'est ça, tristesse et colère se mêlent "On a tout essayé: du coup d'Etat, à l'islamisme en armes. Rien n'y fait. "

      Plus rien à faire, juste fuir, enfin faire une tentative de suicide en mer ?
      Je suis père et fais de mon mieux au regard de cette citation :
      L'exemple, c'est tout ce qu'un père peut faire pour ses enfants. Thomas Mann

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      • #4
        chaque dix ans, nous avons droit à un nouveau président
        On a tout essayé sauf la seule voie de sortie à savoir la démocratisation de la société!... Et je n'entends pas par là, celle qui consiste à porter au pouvoir les fossoyeurs de la démocratie!...
        Mais voilà, un président qui a accepté de se présenter seul aux élections sous le sobriquet de candidat de consensus et qui a trituré la constitution pour se maintenir au pouvoir n'est certainement pas l'homme de la situation!..
        Au suivant!...
        "La chose la plus importante qu'on doit emporter au combat, c'est la raison d'y aller."

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        • #5
          c'est en 62 que l'algérie a pris le mauvais chemin....c'est normal qu'elle s'égare................
          rien n'a été fait pour remédier à la situation et boudienne a complètement ruiné le pays......
          le bled tourne en rond, alors que les voisins avancent.............

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          • #6
            Saha Ramdhankoun, pour les jeuneurs!
            Il ya deux sociétés qui se disputent, qui veulent en découdre. Deux sociétés qui se contredisent, qui ne regardent pas vers le même sens: l’une est féodale, utilitariste et l’autre (hélas minoritaire) pour la laïcité, la liberté de penser et la tolérance.
            "Ou seulement une seule: l'école. Réformer l'école. Profondément. Y introduire l'algérien comme langue nationale, la rationalité, la tolérance et l'utilité de l'apprentissage en fonction de nos besoins et pas de nos mythes."
            Et surtout apprendre aux enfants à raisonner, à comprendre et douter, toujours douter pour aller plus loin et rester modeste. Evitez les experts et les donneurs de leçons, les fossoyeurs et les conservateurs qui, sans gêne et sans remords, envoyent leurs enfants dans les grandes écoles occidentales et laisser l'école éthérée aux gueux!
            Le progrès est dans la diversité, l’amour du beau, du propre, d’être avenant envers les autres et surtout souriez pour vous embellir!

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            • #7
              Même le président de la République, vu avant-hier à la télé, pendant la célébration de la 27e nuit du ramadhan, avait un visage de colère triste. Le visage d'un homme qui veut aller ailleurs, qui ne veut pas rester, qui veut refaire sa vie, qui regrette un peu et se contente de subir son temps comme on subit un mauvais mariage.
              Il savait que ça sentait mauvais dans le trou noir où il vient d'être aspiré, mais pas à ce point.
              On aurait dit qu'il a perdu le gout de vivre, le gout de travailler ... même celui jouer au dictateur. Qu'est ce qu'il a pu voir qui le rend aussi triste ? qui l'a rendu misanthrope, ne faisant point confiance à l'espèce humaine. lui le petit cleptomane, a t-il vu Satan ?

              Y introduire l'algérien comme langue nationale
              Moi je veux l'algérois ... un peu de sérieux.
              وإن هذه أمتكم أمة واحدة

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