Affaires. Finance and the City
Offre immobilière, fiscalité, formation, régime de change… Le législateur a mis le paquet pour faire de la future place de Casablanca un carrefour de la finance mondiale.
C’est parti pour Casablanca Finance City (CFC). Après la nomination de Saïd Ibrahimi à la tête de la société gestionnaire de la place (Moroccan Financial Board) et la constitution de son tour de table, un texte de loi donnant forme à la future city vient d’être adopté par les élus de la nation. Depuis avril dernier, date de l’annonce du projet par le roi, la machine s’est emballée, au point de surprendre la communauté des affaires. “On croyait que cela allait prendre plus de temps. Le projet est d’une grande envergure et nécessitera des moyens colossaux”, indique cet entrepreneur casablancais.
Huit groupes de travail ont planché sur la réalisation de Casablanca Finance City. Fiscalité, formation, agrément, connectivité aérienne, régime de change…tout a été minutieusement étudié pour faire de la capitale économique un pôle bancaire et financier, sinon international, au moins régional dans un premier temps. “Le pari est de présenter une offre sous forme de package qui sera plus attractive que Tunis, Le Caire ou toute autre place de la région MENA”, indique un cadre de l’équipe de travail. A terme, la place, qui sera basée à Anfa sur une superficie de 100 hectares, devra contribuer à hauteur de 7 à 12 milliards de dirhams au PIB et créer entre 35 et 55 000 emplois indirects, selon les premières estimations de Salaheddine Mezouar, ministre des Finances.
Genèse accélérée
L’idée de la création d'une place financière attractive remonte à 2008. “Bank Al-Maghrib recevait une dizaine de demandes d’agréments bancaires chaque année. Au lieu de répondre au cas par cas, il fallait trouver une solution globale”, rapporte un cadre de la banque centrale. Le gouverneur de Bank Al-Maghrib, après une étude lancée en association avec le ministère des Finances, a concocté une vision stratégique qui tient compte de deux exigences : éviter de mettre à mal l'équilibre du marché, sans pour autant laisser filer des occasions d’affaires bénéfiques pour l’économie du pays. Mieux encore, les promoteurs de la place ratissent très large afin d’attirer le maximum d’investisseurs. Tous les métiers de la finance sont en effet ciblés. Selon le texte de loi relatif à son statut, la plateforme sera ouverte à des activités d’entreprises financières et de prestataires de services professionnels. Le texte distingue trois catégories d’institutions pouvant bénéficier du statut Casablanca Finance City (CFC). Primo, les entreprises financières opérant dans le secteur bancaire, l’assurance et les sociétés de gestion d’actifs. Secundo, les prestataires de services professionnels, notamment d’offshoring financier, des services informatiques et des services financiers spécialisés. Et tertio, les entreprises opérant en tant que sièges régionaux et internationaux qui assurent une activité de supervision et de coordination d’activités de services dans un ou plusieurs pays. Le statut CFC sera accordé par la société gestionnaire de cette City, la Moroccan Financial Board. Une flexibilité qui laisse espérer un engouement des entreprises éligibles, surtout que les avantages sont alléchants.
Paradis fiscal
La place casablancaise a réservé en effet un régime de faveur pour les sociétés exportatrices de services ayant le statut CFC : une exonération totale de l’Impôt sur les sociétés (IS) durant les cinq premiers exercices et un taux réduit de 8,75% passé ce délai. L’exonération porte sur le chiffre d’affaires à l’export et des plus-values mobilières de source étrangère. Les sièges régionaux ou internationaux agréés, eux, se verront appliquer un taux réduit de 10% sur une base imposable dont le montant ne peut être inférieur à 5% des charges de fonctionnement. Les cols blancs travaillant pour le compte de sociétés ayant le statut CFC seront également choyés : les personnes non résidentes ou employées pour une durée déterminée bénéficieront de l’exonération de l’IR sur les frais de transport accordés, lors du congé annuel, ainsi qu’à leurs conjoints. S’y ajoute l’application d’un taux libératoire de 20% aux rémunérations versées par leurs employeurs. Une kyrielle d’avantages fiscaux qui séduira sans doute pas mal de monde. D’autant que, en guise de bonne volonté de mettre en marche le projet, le statut de CFC a été adopté par la première chambre en un temps record. Il faut dire que les élus de la nation étaient aux aguets. “Le projet de Loi de Finances prévoit des avantages fiscaux pour une institution qui n’existait pas encore. Ce n’est qu’avec l’adoption de son statut que ces avantages fiscaux deviennent valables”, indique Lahcen Daoudi, président du groupe parlementaire du PJD à la première chambre. Le député islamiste rappelle le précédent des dispositions relatives aux radars fixes qui, à la veille de la promulgation de la Loi de Finances 2009, ont été annulées par le Conseil constitutionnel, suite à un recours des partis de l’opposition. Ayant vécu cette mauvaise expérience, Salahdinne Mezouar, ministre des Finances, a mis le paquet pour ne pas tomber dans le même piège.
Avantages fiscaux
Sociétés exportatrices de services :
Elles sont exonérées de l’Impôt sur les sociétés (IS) durant les 5 premiers exercices, puis imposées à un taux réduit de 8,75%.
Les sièges régionaux ou internationaux :
Un taux réduit de l’IS à 10% sur une base imposable dont le montant ne peut être inférieur à 5% des charges de fonctionnement.
Personnel :
Les personnes non résidentes ou employées pour une durée déterminée sont exonérées de l’IR sur les frais de transport accordés, lors du congé annuel, ainsi qu’à leurs conjoints. Sur les rémunérations versées par leurs employeurs, un taux libératoire de 20% est appliqué.
Tour de table. Les grosses pointures
Dans le tour de table de la société gestionnaire de la place, toutes les grosses pointures de la finance se sont adjugé une place : Bank Al-Maghrib, Société de la Bourse des valeurs de Casablanca, Attijariwafa bank, BMCE Bank et BCP. D’un capital de 120 millions de dirhams, détenu par les six actionnaires à parts égales, la société “Moroccan Financial Board” se chargera de gérer la place financière de Casablanca, d’en assurer le développement, la compétitivité et la promotion. Elle veillera également à ce qu’elle dispose des infrastructures immobilières, équipements, ressources humaines, cadre fiscal et réglementaire nécessaires. Néanmoins, la composition du tour de table n’est pas sans susciter la jalousie des banques filiales de groupes étrangers, mais sociétés de droit marocain. “Comment ériger une place financière internationale sans associer les filiales marocaines de banques dont l'envergure internationale n'est plus à démontrer ?”, se demande ce haut responsable d’une filiale de banque française.
TEL QUEL ONLINE
Offre immobilière, fiscalité, formation, régime de change… Le législateur a mis le paquet pour faire de la future place de Casablanca un carrefour de la finance mondiale.
C’est parti pour Casablanca Finance City (CFC). Après la nomination de Saïd Ibrahimi à la tête de la société gestionnaire de la place (Moroccan Financial Board) et la constitution de son tour de table, un texte de loi donnant forme à la future city vient d’être adopté par les élus de la nation. Depuis avril dernier, date de l’annonce du projet par le roi, la machine s’est emballée, au point de surprendre la communauté des affaires. “On croyait que cela allait prendre plus de temps. Le projet est d’une grande envergure et nécessitera des moyens colossaux”, indique cet entrepreneur casablancais.
Huit groupes de travail ont planché sur la réalisation de Casablanca Finance City. Fiscalité, formation, agrément, connectivité aérienne, régime de change…tout a été minutieusement étudié pour faire de la capitale économique un pôle bancaire et financier, sinon international, au moins régional dans un premier temps. “Le pari est de présenter une offre sous forme de package qui sera plus attractive que Tunis, Le Caire ou toute autre place de la région MENA”, indique un cadre de l’équipe de travail. A terme, la place, qui sera basée à Anfa sur une superficie de 100 hectares, devra contribuer à hauteur de 7 à 12 milliards de dirhams au PIB et créer entre 35 et 55 000 emplois indirects, selon les premières estimations de Salaheddine Mezouar, ministre des Finances.
Genèse accélérée
L’idée de la création d'une place financière attractive remonte à 2008. “Bank Al-Maghrib recevait une dizaine de demandes d’agréments bancaires chaque année. Au lieu de répondre au cas par cas, il fallait trouver une solution globale”, rapporte un cadre de la banque centrale. Le gouverneur de Bank Al-Maghrib, après une étude lancée en association avec le ministère des Finances, a concocté une vision stratégique qui tient compte de deux exigences : éviter de mettre à mal l'équilibre du marché, sans pour autant laisser filer des occasions d’affaires bénéfiques pour l’économie du pays. Mieux encore, les promoteurs de la place ratissent très large afin d’attirer le maximum d’investisseurs. Tous les métiers de la finance sont en effet ciblés. Selon le texte de loi relatif à son statut, la plateforme sera ouverte à des activités d’entreprises financières et de prestataires de services professionnels. Le texte distingue trois catégories d’institutions pouvant bénéficier du statut Casablanca Finance City (CFC). Primo, les entreprises financières opérant dans le secteur bancaire, l’assurance et les sociétés de gestion d’actifs. Secundo, les prestataires de services professionnels, notamment d’offshoring financier, des services informatiques et des services financiers spécialisés. Et tertio, les entreprises opérant en tant que sièges régionaux et internationaux qui assurent une activité de supervision et de coordination d’activités de services dans un ou plusieurs pays. Le statut CFC sera accordé par la société gestionnaire de cette City, la Moroccan Financial Board. Une flexibilité qui laisse espérer un engouement des entreprises éligibles, surtout que les avantages sont alléchants.
Paradis fiscal
La place casablancaise a réservé en effet un régime de faveur pour les sociétés exportatrices de services ayant le statut CFC : une exonération totale de l’Impôt sur les sociétés (IS) durant les cinq premiers exercices et un taux réduit de 8,75% passé ce délai. L’exonération porte sur le chiffre d’affaires à l’export et des plus-values mobilières de source étrangère. Les sièges régionaux ou internationaux agréés, eux, se verront appliquer un taux réduit de 10% sur une base imposable dont le montant ne peut être inférieur à 5% des charges de fonctionnement. Les cols blancs travaillant pour le compte de sociétés ayant le statut CFC seront également choyés : les personnes non résidentes ou employées pour une durée déterminée bénéficieront de l’exonération de l’IR sur les frais de transport accordés, lors du congé annuel, ainsi qu’à leurs conjoints. S’y ajoute l’application d’un taux libératoire de 20% aux rémunérations versées par leurs employeurs. Une kyrielle d’avantages fiscaux qui séduira sans doute pas mal de monde. D’autant que, en guise de bonne volonté de mettre en marche le projet, le statut de CFC a été adopté par la première chambre en un temps record. Il faut dire que les élus de la nation étaient aux aguets. “Le projet de Loi de Finances prévoit des avantages fiscaux pour une institution qui n’existait pas encore. Ce n’est qu’avec l’adoption de son statut que ces avantages fiscaux deviennent valables”, indique Lahcen Daoudi, président du groupe parlementaire du PJD à la première chambre. Le député islamiste rappelle le précédent des dispositions relatives aux radars fixes qui, à la veille de la promulgation de la Loi de Finances 2009, ont été annulées par le Conseil constitutionnel, suite à un recours des partis de l’opposition. Ayant vécu cette mauvaise expérience, Salahdinne Mezouar, ministre des Finances, a mis le paquet pour ne pas tomber dans le même piège.
Avantages fiscaux
Sociétés exportatrices de services :
Elles sont exonérées de l’Impôt sur les sociétés (IS) durant les 5 premiers exercices, puis imposées à un taux réduit de 8,75%.
Les sièges régionaux ou internationaux :
Un taux réduit de l’IS à 10% sur une base imposable dont le montant ne peut être inférieur à 5% des charges de fonctionnement.
Personnel :
Les personnes non résidentes ou employées pour une durée déterminée sont exonérées de l’IR sur les frais de transport accordés, lors du congé annuel, ainsi qu’à leurs conjoints. Sur les rémunérations versées par leurs employeurs, un taux libératoire de 20% est appliqué.
Tour de table. Les grosses pointures
Dans le tour de table de la société gestionnaire de la place, toutes les grosses pointures de la finance se sont adjugé une place : Bank Al-Maghrib, Société de la Bourse des valeurs de Casablanca, Attijariwafa bank, BMCE Bank et BCP. D’un capital de 120 millions de dirhams, détenu par les six actionnaires à parts égales, la société “Moroccan Financial Board” se chargera de gérer la place financière de Casablanca, d’en assurer le développement, la compétitivité et la promotion. Elle veillera également à ce qu’elle dispose des infrastructures immobilières, équipements, ressources humaines, cadre fiscal et réglementaire nécessaires. Néanmoins, la composition du tour de table n’est pas sans susciter la jalousie des banques filiales de groupes étrangers, mais sociétés de droit marocain. “Comment ériger une place financière internationale sans associer les filiales marocaines de banques dont l'envergure internationale n'est plus à démontrer ?”, se demande ce haut responsable d’une filiale de banque française.
TEL QUEL ONLINE
Commentaire