23-11-2010 -- LA TRIBUNE Online
Par Samir Azzoug
Le rapport 2010 de l’Unesco sur la science, paru ce mois-ci, dresse l’état actuel du savoir, comprendre la recherche, dans le monde. Il met en relief son rôle croissant dans l’économie mondiale en analysant les politiques scientifiques et technologiques mises en place par les différents Etats et régions. Comme attendu, les pays arabes et africains sont loin de figurer en pôle position dans le gotha des producteurs de savoir. Pour ce qui est des pays arabes, 4,9% de la population mondiale, ils ne contribuent qu’à hauteur de 1,4% de la production scientifique. En Algérie, malgré une sensible augmentation de salaire concédée cette année aux enseignants-chercheurs, le mal est profond. En termes de chiffres, le pays compte 22 000 chercheurs, soit 611 chercheurs par million d’habitants, alors que la moyenne mondiale se situe autour de 1 000. En 2009, moins de 3 000 publications scientifiques (et combien sont innovantes… ?) ont été enregistrées contre plus de 5 000 en Afrique du Sud. Loin de ces statistiques, les raisons du retard en matière de recherche scientifique sont aussi bien de nature culturelle, financière que politique. Pour le côté culturel, dans un article publié dans le quotidien français le Monde (édition du 18 novembre) sous le titre «Les sociétés musulmanes face aux défis de la science», l’auteur définit des approches réductrices qui prévalent dans le monde musulman, dont «l’opposition du patrimoine de la civilisation islamique à celui du reste du monde». Le sociologue omet simplement de noter qu’au-delà de cette analyse, il y a le manque de maturité et d’éducation des populations induites par les différentes formes de colonialisme ou de mauvaise gestion politique. Cela n’excuse pas tout, mais y contribue fortement. En termes de financement calculé par le DIRD (dépense intérieure de recherche et développement), l’Algérie avec 25 milliards de dinars de financement public à la recherche pour 2010-2011, soit par un calcul approximatif 10 000 dollars par chercheurs, est loin de la moyenne des pays arabes (38 000 dollars) et encore plus éloignée des pays dits moins avancés (les
derniers de la classe) avec 43 000 dollars. Mais plus que tout cela, il faut arriver à convaincre les gestionnaires que la recherche scientifique n’est pas un luxe. C’est une nécessité de développement et non un folklore. Inutile de renflouer les rangs des chercheurs ou de laboratoires de recherche sans une réelle dynamique politique et économique impliquant les secteurs public et privé. Un chercheur sans projet scientifique tangible à même de répondre à une problématique réelle de production n’a pas lieu d’être comptabilisé. C’est toute une stratégie nationale globale et ambitieuse qui est nécessaire. Elle doit être d’abord d’ordre économique (où en est, en fait, la stratégie économique du pays ?). «Les politiques scientifiques et technologiques doivent être un mélange de réalisme et d’idéalisme» (Chris Freeman). En Algérie, il faudrait donc scientifier la politique et non l’inverse.
Par Samir Azzoug
Le rapport 2010 de l’Unesco sur la science, paru ce mois-ci, dresse l’état actuel du savoir, comprendre la recherche, dans le monde. Il met en relief son rôle croissant dans l’économie mondiale en analysant les politiques scientifiques et technologiques mises en place par les différents Etats et régions. Comme attendu, les pays arabes et africains sont loin de figurer en pôle position dans le gotha des producteurs de savoir. Pour ce qui est des pays arabes, 4,9% de la population mondiale, ils ne contribuent qu’à hauteur de 1,4% de la production scientifique. En Algérie, malgré une sensible augmentation de salaire concédée cette année aux enseignants-chercheurs, le mal est profond. En termes de chiffres, le pays compte 22 000 chercheurs, soit 611 chercheurs par million d’habitants, alors que la moyenne mondiale se situe autour de 1 000. En 2009, moins de 3 000 publications scientifiques (et combien sont innovantes… ?) ont été enregistrées contre plus de 5 000 en Afrique du Sud. Loin de ces statistiques, les raisons du retard en matière de recherche scientifique sont aussi bien de nature culturelle, financière que politique. Pour le côté culturel, dans un article publié dans le quotidien français le Monde (édition du 18 novembre) sous le titre «Les sociétés musulmanes face aux défis de la science», l’auteur définit des approches réductrices qui prévalent dans le monde musulman, dont «l’opposition du patrimoine de la civilisation islamique à celui du reste du monde». Le sociologue omet simplement de noter qu’au-delà de cette analyse, il y a le manque de maturité et d’éducation des populations induites par les différentes formes de colonialisme ou de mauvaise gestion politique. Cela n’excuse pas tout, mais y contribue fortement. En termes de financement calculé par le DIRD (dépense intérieure de recherche et développement), l’Algérie avec 25 milliards de dinars de financement public à la recherche pour 2010-2011, soit par un calcul approximatif 10 000 dollars par chercheurs, est loin de la moyenne des pays arabes (38 000 dollars) et encore plus éloignée des pays dits moins avancés (les
derniers de la classe) avec 43 000 dollars. Mais plus que tout cela, il faut arriver à convaincre les gestionnaires que la recherche scientifique n’est pas un luxe. C’est une nécessité de développement et non un folklore. Inutile de renflouer les rangs des chercheurs ou de laboratoires de recherche sans une réelle dynamique politique et économique impliquant les secteurs public et privé. Un chercheur sans projet scientifique tangible à même de répondre à une problématique réelle de production n’a pas lieu d’être comptabilisé. C’est toute une stratégie nationale globale et ambitieuse qui est nécessaire. Elle doit être d’abord d’ordre économique (où en est, en fait, la stratégie économique du pays ?). «Les politiques scientifiques et technologiques doivent être un mélange de réalisme et d’idéalisme» (Chris Freeman). En Algérie, il faudrait donc scientifier la politique et non l’inverse.
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