Anthropologue britannique, professeur et chercheur associé à la “School of Oriental and African Studies” (École des études orientales et africaines) de l'Université de Londres, spécialiste reconnu de la zone sahélienne, Jeremy Keenan raconte dans cet article (dont nous reproduisons des extraits), la guerre qu’a livrée le DRS du général Médiène, dit Toufik, au clan Bouteflika afin d’empêcher Saïd Bouteflika, le jeune frère du président, d’arracher la succession.
Selon lui, la guerre aurait peut-être débouché sur un accord selon lequel Mediène « prendrait sa retraite » suivi aussitôt par Bouteflika pour raisons de santé, et le pays serait gouverné jusqu’aux élections de 2014 par un ou des Vice-président(s) nommé(s) quelque temps avant le départ de Bouteflika.
Auteur du livre "The Dark Sahara: Americas War on Terror in Africa" (Sombre Sahara: la guerre de l’Amérique contre le terrorisme en Afrique), Jermy Keenan a notamment affirmé, il y a quelques mois, que c'est la Sécurité militaire algérienne qui a conduit la France dans le [COLOR=#0000ff]fiasco de son opération militaire du 22 juillet au Mali destiné à sauver l'otage Michel Germaneau.
Septembre 2010 marque le vingtième anniversaire de la prise de fonction du plus ancien « chef des services de renseignement » en poste dans le monde. L’homme en question est le Général Mohamed « Toufik » Mediène, Directeur du Département du Renseignement et de la Sécurité (DRS) algérien.
Il a été nommé à la tête du DRS en septembre 1990, 15 mois avant que les « Généraux algériens » ou le « Groupe » comme on les appelait à l’époque, et dont Mediène, alors colonel, faisait partie, annulent les élections qui auraient permis de porter au pouvoir le premier gouvernement islamique jamais élu démocratiquement.
Être le chef des services de renseignement et de la sécurité de l’un des régimes les plus impitoyablement répressifs et corrompus au monde pendant 20 ans relève de l’exploit. Felix Dzerzhinsky, le fondateur de la Tcheka qui deviendra plus tard le KGB, a dans les faits « contrôlé » l’Union Soviétique pendant neuf ans (1917-1926); Lavrenti Beria, chef du NKVD, l’a terrorisée pendant 15 ans (1938-1953); le chef de la police d’Hitler, Heinrich Himmler, s’est suicidé au bout de 11 ans (1934-1945), quant au Général Hendrik van den Bergh, il a dirigé le Bureau of State Security (BOSS), les services de renseignement du régime de l’apartheid en Afrique du Sud, pendant 11 ans (1969-1980). Mediène les a tous surpassés.
Pourquoi alors, juste au moment où Mediène atteint ce jalon extraordinaire, entend-on des rumeurs concernant sa mise à l’écart imminente de la scène politique ?La réponse tient en quelques mots : lorsque le chef du renseignement et de la sécurité d'un pays fait la une de l’actualité, il y a fort à parier qu'il a fait son temps. Au cours des neuf derniers mois, on a beaucoup parlé de Mediène, principalement à cause de la lutte qui l’oppose à Abdelaziz Bouteflika depuis l’élection de ce dernier pour un troisième mandat présidentiel en avril 2009. « L’homme fort » de l’Algérie
Pour comprendre cette lutte, il faut revenir quelques années en arrière. Mediène a gravi les échelons de la hiérarchie sur un « tapis rouge »[i] : il a été formé par le KGB en 1961 et soutenu par les chefs du premier service secret algérien.
Pendant les années 90, lorsque l’Algérie était plongée dans sa « sale guerre » contre les islamistes, l’homme le plus puissant du pays était le Général Mohamed Lamari, chef d’état-major de l’armée algérienne. Mais lorsque le pays a renoué avec la paix et que les chars ont regagné les casernes, c’est Mediène qui est devenu « l’homme fort » du pays.
La transition de la « guerre » à la « paix » et l’ascension de Mediène ont coïncidé avec la période entourant l’élection de Bouteflika à la Présidence de la République en 1999.
Les faiblesses personnelles de ses semblables, telles que la propension à la corruption et les penchants sexuels, ont été des éléments fondamentaux dans la manière dont Mediène a exercé le contrôle. Il n’est donc pas surprenant que l’élément qui a décidé Mediène à accorder son soutien à Bouteflika en 1999 ait été la condamnation de ce dernier en 1983 dans le cadre d’un détournement de fonds des chancelleries algériennes, pour un montant total correspondant à 23 millions de dollars actuels, pendant qu’il était ministre des Affaires étrangères entre 1965 et 1978.
Mediène est devenu « l’homme fort » incontesté de l’Algérie après les élections présidentielles d’avril 2004 et le limogeage inattendu de Mohamed Lamari qui a eu lieu quatre mois plus tard. Le complot qui a conduit à la mise à l’écart de Lamari comprenait un accord entre Bouteflika et Mediène visant à donner une nouvelle image de l’Algérie en écartant le général le plus haï à cette époque. Une fois Lamari parti, Bouteflika et Mediène se sont effectivement partagé le pouvoir pendant que le Général Smaïn Lamari (aucun lien de parenté avec Mohamed), l’adjoint de Mediène et chef de la Direction du contre-espionnage (DCE) faisait le « sale boulot ».
Selon lui, la guerre aurait peut-être débouché sur un accord selon lequel Mediène « prendrait sa retraite » suivi aussitôt par Bouteflika pour raisons de santé, et le pays serait gouverné jusqu’aux élections de 2014 par un ou des Vice-président(s) nommé(s) quelque temps avant le départ de Bouteflika.
Auteur du livre "The Dark Sahara: Americas War on Terror in Africa" (Sombre Sahara: la guerre de l’Amérique contre le terrorisme en Afrique), Jermy Keenan a notamment affirmé, il y a quelques mois, que c'est la Sécurité militaire algérienne qui a conduit la France dans le [COLOR=#0000ff]fiasco de son opération militaire du 22 juillet au Mali destiné à sauver l'otage Michel Germaneau.
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Septembre 2010 marque le vingtième anniversaire de la prise de fonction du plus ancien « chef des services de renseignement » en poste dans le monde. L’homme en question est le Général Mohamed « Toufik » Mediène, Directeur du Département du Renseignement et de la Sécurité (DRS) algérien.
Il a été nommé à la tête du DRS en septembre 1990, 15 mois avant que les « Généraux algériens » ou le « Groupe » comme on les appelait à l’époque, et dont Mediène, alors colonel, faisait partie, annulent les élections qui auraient permis de porter au pouvoir le premier gouvernement islamique jamais élu démocratiquement.
Être le chef des services de renseignement et de la sécurité de l’un des régimes les plus impitoyablement répressifs et corrompus au monde pendant 20 ans relève de l’exploit. Felix Dzerzhinsky, le fondateur de la Tcheka qui deviendra plus tard le KGB, a dans les faits « contrôlé » l’Union Soviétique pendant neuf ans (1917-1926); Lavrenti Beria, chef du NKVD, l’a terrorisée pendant 15 ans (1938-1953); le chef de la police d’Hitler, Heinrich Himmler, s’est suicidé au bout de 11 ans (1934-1945), quant au Général Hendrik van den Bergh, il a dirigé le Bureau of State Security (BOSS), les services de renseignement du régime de l’apartheid en Afrique du Sud, pendant 11 ans (1969-1980). Mediène les a tous surpassés.
Pourquoi alors, juste au moment où Mediène atteint ce jalon extraordinaire, entend-on des rumeurs concernant sa mise à l’écart imminente de la scène politique ?La réponse tient en quelques mots : lorsque le chef du renseignement et de la sécurité d'un pays fait la une de l’actualité, il y a fort à parier qu'il a fait son temps. Au cours des neuf derniers mois, on a beaucoup parlé de Mediène, principalement à cause de la lutte qui l’oppose à Abdelaziz Bouteflika depuis l’élection de ce dernier pour un troisième mandat présidentiel en avril 2009. « L’homme fort » de l’Algérie
Pour comprendre cette lutte, il faut revenir quelques années en arrière. Mediène a gravi les échelons de la hiérarchie sur un « tapis rouge »[i] : il a été formé par le KGB en 1961 et soutenu par les chefs du premier service secret algérien.
Pendant les années 90, lorsque l’Algérie était plongée dans sa « sale guerre » contre les islamistes, l’homme le plus puissant du pays était le Général Mohamed Lamari, chef d’état-major de l’armée algérienne. Mais lorsque le pays a renoué avec la paix et que les chars ont regagné les casernes, c’est Mediène qui est devenu « l’homme fort » du pays.
La transition de la « guerre » à la « paix » et l’ascension de Mediène ont coïncidé avec la période entourant l’élection de Bouteflika à la Présidence de la République en 1999.
Les faiblesses personnelles de ses semblables, telles que la propension à la corruption et les penchants sexuels, ont été des éléments fondamentaux dans la manière dont Mediène a exercé le contrôle. Il n’est donc pas surprenant que l’élément qui a décidé Mediène à accorder son soutien à Bouteflika en 1999 ait été la condamnation de ce dernier en 1983 dans le cadre d’un détournement de fonds des chancelleries algériennes, pour un montant total correspondant à 23 millions de dollars actuels, pendant qu’il était ministre des Affaires étrangères entre 1965 et 1978.
Mediène est devenu « l’homme fort » incontesté de l’Algérie après les élections présidentielles d’avril 2004 et le limogeage inattendu de Mohamed Lamari qui a eu lieu quatre mois plus tard. Le complot qui a conduit à la mise à l’écart de Lamari comprenait un accord entre Bouteflika et Mediène visant à donner une nouvelle image de l’Algérie en écartant le général le plus haï à cette époque. Une fois Lamari parti, Bouteflika et Mediène se sont effectivement partagé le pouvoir pendant que le Général Smaïn Lamari (aucun lien de parenté avec Mohamed), l’adjoint de Mediène et chef de la Direction du contre-espionnage (DCE) faisait le « sale boulot ».
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