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A Meichu, des villageois entrent en résistance

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  • A Meichu, des villageois entrent en résistance

    La Chine n'est plus tout à fait la même car de plus en plus de paysans et de villageois s'opposent et entrent en résistance car ils connaissent leurs droits et entendent bien les faire respecter. Là c'est à Meichu, des villageois entrent en résistance contre l'expropriation arbitraire de leurs terres

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    Des rangées de maisons couleur ciment, toutes plus ou moins identiques, au milieu des rizières : la commune de Meichu, dans la province du Zhejiang, est un archipel de villages ainsi faits, où l'on survit grâce à la culture du riz, des vers à soie, d'un peu de coton, et du travail à façon pour les industries locales. Le patrimoine, collectif, est extrêmement morcelé et les sources de revenus limitées.

    Pourtant, dans cette riche province située au sud-ouest de Shanghaï, il est convoité : depuis 2004, les petites gens de Meichu se battent contre un projet de zone industrielle, une soupape pour la ville voisine de Xinchang qui ne sait plus où installer ses usines pharmaceutiques. Déjà, les pelleteuses ont éventré un champ, site futur d'une fabrique de vitamine E. Mais la destruction pure et simple des villages n'aura pas lieu : "Le chantier continue, mais nous avons eu des réunions avec le gouvernement local. Nous sommes en position de demander de meilleures compensations", dit un villageois.

    Celui qui parle préfère être désigné par un pseudonyme, Wen Zhi-qiang. Il fait partie de cette nouvelle génération de Chinois qui connaissent leurs droits. En octobre, "M. Wen", qui dessine des patrons de vêtements, a été élu chef du village après que les deux tiers des habitants eurent démis son prédécesseur, un recours autorisé depuis l'introduction d'élections directes dans les villages, en 1988, mais qui, en pratique, aboutit rarement. "Avant, les gens étaient indifférents aux élections de village. Désormais, ils réalisent combien c'est important", dit-il.

    L'élection de "M. Wen", qui n'est pas membre du parti, a donné aux petites gens de Meichu leur première victoire : depuis décembre 2005, le vice-chef du canton de Xinchang, dont dépend Meichu, est recherché par la police. Il est à l'origine d'un accord secret, signé entre les autorités du canton et l'ancien chef du village, en 2002.

    Le gouvernement local est le seul habilité en Chine à effectuer des transactions sur les terres des paysans, mais il est censé le faire en consultant la population. Cette prérogative donne lieu à des abus éhontés, qui enrichissent les caciques locaux et provoquent des émeutes dans les campagnes.

    COMMUNAUTÉ ASPHYXIÉE

    A Meichu, le contrat, dont les paysans ont désormais une copie, attribuait à chaque habitant une compensation de 10 000 yuans (1 000 euros) par mu (0,06 h) de terre agricole. "C'est très peu ; un mu rapporte l'équivalent de 5 000 yuans par an. Au début, on nous a dit qu'il fallait détruire des maisons pour moderniser. On n'a compris qu'après que c'était pour construire une zone industrielle de 30 km2 ! En réalité, on était expulsés, le gouvernement revendait les terres à des promoteurs, qui faisaient venir des usines. Bien sûr, personne ne sait à quel prix", dit "M. Wen". Il est même spécifié que "les locaux ne pourront en aucun cas travailler dans les nouvelles usines", qui recruteront des migrants, venus de provinces pauvres.

    Pour en savoir plus, "M. Wen" se rend alors à Pékin, dans les diverses administrations en charge des affaires foncières et agricoles. Il parvient à accéder au dossier déposé par le gouvernement local pour faire autoriser par Pékin la zone industrielle de Meichu : celui-ci prévoit une compensation six fois supérieure à celle que les villageois s'apprêtaient en fait à toucher. Le dossier avait été "enjolivé" pour séduire Pékin.

    La découverte rend furieux les habitants de Meichu, qui s'engagent dans une longue série de protestations. Un jour, ils sont un millier devant la mairie de Xinchang, avec des pancartes : "Protégez les droits des gens, protégez nos terres". Puis ils se rendent, à 200, devant la mairie de Hangzhou. Mais les autorités locales de Xinchang pratiquent une guerre d'usure en asphyxiant la commune : une source qui servait à l'irrigation est détournée, et l'alimentation électrique du village est réduite.

    Les parents de "M. Wen" sont intimidés. En mars 2005, "M. Wen" et d'autres pétitionnaires sont rapatriés manu militari de Pékin à Meichu, en bus. En septembre 2005, à l'aube, lors de l'ouverture du premier chantier, des centaines de policiers sont acheminés pour en découdre avec les protestataires. Dix d'entre eux sont placés en garde à vue puis libérés. Alors que le gouvernement à Pékin dit vouloir prendre le dossier agricole à bras-le-corps, les habitants de Meichu se mettent à espérer. "Toute cette attention, en haut lieu, en faveur des campagnes, cela tombe bien pour nous, dit "M. Wen" : cela crée une pression sur les autorités locales."


    Par Le Monde
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