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Répétition générale avant le grand soir ?

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  • Répétition générale avant le grand soir ?

    Est-ce le grand incendie avant le chaos ? Nous n’en savons strictement rien, sauf à conjecturer sur la suite des évènements comme le feraient des Cassandre dont la vocation mythique était de prédire les périls. Car si, jusque-là, les émeutes des hameaux lointains ne semblaient émouvoir ni déranger le pouvoir, le voilà, par contre, surpris par l’embrasement d’Alger, Oran et Constantine.

    Une colère quasi-simultanée qu’on a vite fait de mettre sur le compte d’une simple contestation de couffin ! En fait, la thèse semble trop courte même si le mot d’ordre était le même d’El-Hamri à Bab-El- Oued et en passant par Ziadia.

    La rapidité avec laquelle la rue algérienne est en train de devenir un théâtre global d’affrontements peut-elle s’expliquer uniquement par une épisodique conjoncture du marché mettant à mal le pouvoir d’achat des ménages ? Plutôt que d’en faire la raison cardinale des troubles, ne faut-il pas le désigner comme un détonateur de circonstance chargé de toutes les rancunes que gardent, à l’encontre des dirigeants, les populations ?

    A travers les émeutes qui investissent cycliquement la rue, fallait-il n’y voir chaque fois qu’un déficit de civisme de la société parce que quelques voitures sont incendiées ou bien des édifices publics saccagés ? Pourquoi n’a-ton jamais insisté sur ce qui a rendu possibles et souvent inévitables de telles déprédations ? Ce que la vulgate officielle désigne comme «vandalisme» n’est-il pas justement le miroir de la décomposition des mœurs de l’Etat ? Un pouvoir politique, dont la petite vertu est désormais notoire, est-il encore crédible lorsqu’il recourt à la stigmatisation des contestations violentes tout en continuant à maquiller ses propres abus ?

    La suspicion qui affecte la confiance des petites gens en cet «Etat» est aujourd’hui telle qu’elle prend parfois des allures de dissidence populaire. Une société défaite et malheureuse engrosse en son sein la progéniture qui la vengera des humiliations. Les jeunes et les adolescents qui viennent d’allumer des pneus et de recourir à la lapidation des forces de sécurité n’agissent autrement qu’au nom de la misère de leur foyer familial, de leur marginalité et de l’iniquité de l’Etat.

    Il est quand même significatif que ce vent du boulet qui siffle aux oreilles du régime n’a pu se lever que parce que trop de scandales en haut lieu bénéficièrent de la clémence politique, alors que dans le même temps l’on pérorait sur les rigueurs budgétaires comme venait de le faire récemment un Premier ministre faussaire.

    Or, comment voler au secours d’un régime qui est malmené par des manifestations constatant, à ses dépens, que les faux-semblants en politique se retournent fatalement contre celui qui en abuse ? Lui qui indiquait dès 1999 que la corruption sera son grand chantier, le voilà rattrapé et presque complice dans les magouilles de son entourage. Lui qui se disait préoccupé par la condition sociale des catégories fragiles ne se révèle-t-il pas comme le plus inattentif des régimes ? Onze années de subterfuges ont fini par lasser les strates les plus patientes. Ces dernières n’hésitent plus à l’interpeller à haute voix. Sans doute que cette «procédure » populaire inédite risque de faire tache d’huile. Légitimité contre légitimité en quelque sorte ! Le chef de l’Etat ne peut plus ignorer la première dont il prétend avoir sollicitée par trois fois son élection. Après les clans, les coteries et les lobbies auxquels il a tendu l’oreille et satisfait les exigences peut-il enfin consacrer les 36 mois de son mandat à dialoguer avec les sans-voix excédés de n’avoir eu de voix qu’au chapitre des urnes ? Autrement dit, parce qu’il s’est voulu sans médiation (laminage des partis et Parlement de pacotille), il se retrouve dans un tête-à-tête avec l’opinion du pays qu’il a fuie jusque-là.

    Seule sa parole peut encore sauver un Etat qui se lézarde et part par petits morceaux. Son économie coupable dans la communication directe (pas même des vœux de la nation) alimente le trouble dans le pays. Une étrange vacance à l’origine de la déstabilisation rampante des institutions dont il est pourtant l’unique garant. C’est cette déplorable situation qui a progressivement installé l’Algérie dans un crépuscule politique inquiétant.

    Pour un président longtemps détaché des contingences de la gouvernance, il est temps qu’il se remette à sonder les états d’âme de ses concitoyens car l’heure est grave. Très grave même pour une nation ayant hypothéqué déjà son capital confiance, car les feux de la colère d’Oran, Alger, Constantine, Boumèrdes, Béjaïa, Souk-Ahras, Bouira, Bordj-Bou-Aréridj et Blida ne sont qu’une répétition générale avant l’apothéose du séisme.

    Par Boubakeur Hamidechi
    Le Soir d'Algérie
    "Je suis un homme et rien de ce qui est humain, je crois, ne m'est étranger", Terence

  • #2
    Excellente chronique de B. H., comme d'habitude.
    Avec style en plus, s'il vous plaît !
    Fortuna nimium quem fovet, stultum facit.

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    • #3
      Une société défaite et malheureuse engrosse en son sein la progéniture qui la vengera des humiliations.
      -
      Ce n’est pas un homme, c’est un champignon.
      -

      Commentaire


      • #4
        Envoyé par Boubakeur Hamidechi
        Or, comment voler au secours d’un régime qui est malmené par des manifestations constatant, à ses dépens, que les faux-semblants en politique se retournent fatalement contre celui qui en abuse ? Lui qui indiquait dès 1999 que la corruption sera son grand chantier, le voilà rattrapé et presque complice dans les magouilles de son entourage. Lui qui se disait préoccupé par la condition sociale des catégories fragiles ne se révèle-t-il pas comme le plus inattentif des régimes ? Onze années de subterfuges ont fini par lasser les strates les plus patientes.
        Que de promesses qui se sont volatilisées en l'air, comme de la fumée.
        Il y a des gens si intelligents que lorsqu'ils font les imbéciles, ils réussissent mieux que quiconque. - Maurice Donnay

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