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[INTERVIEW] "Le gouvernement tunisien n'est plus crédible"

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  • [INTERVIEW] "Le gouvernement tunisien n'est plus crédible"

    "On ne mesure pas le désespoir de ces jeunes descendus dans la rue au prix de leur vie", estime Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des droits de l'Homme.

    Que pensez-vous des dernières déclarations du gouvernement tunisien, qui a notamment promis de libérer toutes les personnes arrêtées lors des émeutes ?

    - C'est trop peu et trop tard... Si ces mesures avaient été annoncées dans le premier discours de M. Ben Ali, il y a quatre jours, peut-être qu'il y aurait eu un effet de surprise et un effet positif. Mais tarder à annoncer cela prouve que l'on ne mesure pas le désespoir de ces jeunes qui sont descendus dans la rue au prix de leur vie. Dire que les prisonniers vont être libérés est la seule mesure positive, mais nous attendons que les cyberdissidents arrêtés, Slim Amamou et Azyz Amami, soient effectivement libérés. Ce serait un signal fort aux internautes qui ont été l'image de ce soulèvement face à la communauté internationale. Mais je crains fort que ces annonces n'aient pas de répercussions importantes. Nous n'avons jamais su combien de personnes avaient été arrêtées. Donc, il sera difficile de mesurer le résultat de telles déclarations. Voilà l'illustration du musèlement de l'information, de l'absence de communication, de l'absence de transparence. Cela finit par se retourner contre le pouvoir. Quelque soit les décisions prises aujourd'hui, le gouvernement tunisien n'est plus crédible.

    Avez-vous des informations concernant le dernier bilan sur le nombre de personnes tuées lors des émeutes ?

    - Le dernier bilan syndical fait état d'une cinquantaine de morts. Mais je crains fort qu'il y en ait plus. On ne sait pas quel est le chiffre des morts. Si le gouvernement avait donné le nombre des arrestations et le véritable nombre des morts, alors les décisions de Ben Ali auraient eu une portée beaucoup plus grande. Mais là, on ne sait pas de quoi l'on parle.

    Que pensez-vous de la timide position de la France ?

    - La France n'a jamais été aussi loin de la réalité tunisienne. La France se repose sur une Union européenne qui n'est pas beaucoup plus brillante dans ses prises de positions. Si Mme [Catherine] Ashton a condamné les violences en Biélorussie après les élections, elle a simplement déploré les morts en Tunisie. Les mots ont leur poids. Faire cette distinction prouve que Mme Ashton ne se montre pas très préoccupée de la situation. Quant à la France, sa réserve est très grande. Ainsi Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture qui a la nationalité tunisienne, estime que "dire que M. Ben Ali est un dictateur, c'est franchement exagéré". On voit bien que M. Mitterrand, s'il est tunisien "de cœur", n'est pas le Tunisien qui a reçu une balle dans le corps. Mme [Michèle] Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères, est elle loin de se préoccuper de la situation, au-delà de son aspect économique. Le langage public des autorités françaises doit être à la fois dissuasif et incitatif envers un pays qui se veut démocratique.


    Interview de Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH, par Boris Manenti
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