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Ighil Ali : Mohand, 49 ans, abattu par des militaires alors qu’il chassait les grives

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  • Ighil Ali : Mohand, 49 ans, abattu par des militaires alors qu’il chassait les grives

    « Mon frère n’était pas un terroriste ! »
    Un homme est mort. Bavure, méprise ou abus, sa famille cherchent à savoir comment les militaires n'ont tué d'une rafale alors qu'il chassait la grive dans la forêt des Bibans, à la lisière entre la wilaya de Béjaia et de Bordj Bouararidj. Mohand, 49 ans, saisonnier, a été abattu par des militaires qui patrouillaient dans le secteur dans le cadre de la lutte anti-terroriste. Merzouk, le frère de Mohand, raconte.
    Bouza Mohand, 49 ans, est revenu d’Oran, où il vivait de menus travaux, pour ramasser ses olives. Azrou, son patelin natal est un petit village perché sur un piton rocheux à 900 mètres d’altitudes, au dessus d’Ighil Ali, en Kabylie des Bibans. Au-delà de ce hameau déserté où les vieilles maisons kabyles tombent les unes après les autres, la forêt des Ath Abbes s’étend à perte de vue.
    La pinède des Ath Abbes ou plutôt ce qui en reste. L’été passé, les feux ont dévoré une bonne partie de ses majestueux pins et genévriers. Des incendies en série que des mains criminelles avaient allumé.
    En hiver, il n’y a que deux occupations à Azrou : ramasser les olives et chasser la grive. Mohand a fini de ramasser ses olives et chasse désormais les grives qu’il revend à un de ses amis qui tenait une gargote à Ighil Ali. C’est ainsi qu’il arrondit ses fins de mois, lui qui venait de se marier quelques mois plutôt.
    Dans toute la région, la chasse à la grive est une très vieille tradition qui compte beaucoup d’adeptes. C’est une chasse qui se fait à l’affût, le soir, quand les passereaux remontent de la vallée pour passer la nuit dans les forêts de pins d’Alep. La chasse se fait exclusivement à la glu ou au filet.
    Ce mercredi 12 janvier, Mohand part avec son frère Merzouk pour poser de nouveaux filets. Mohand est un beau gaillard, plein de vie. Il connait bien la forêt. En fin d’après-midi, aux alentours de cinq heures, une rafale de kalachnikov met un terme sanglant à sa vie. Parti à sa recherche, son frère Merzouk ne trouvera que ses affaires sur place. Il le cherchera en vain. Près de 24 heures plus tard, son corps criblé de balles sera signalé à la morgue de l’hôpital d’Akbou. Nous avons rencontré Merzouk qui a accepté de nous livrer ce récit.
    « Chaque jour, on se lève aux alentours de six heures du matin. Vers 7 heures, on passe relever nos pièges et ramasser les grives prises à l’aube dans les filets. Hier, jeudi, on avait pris un peu de retard. C’est parce qu’on avait été obligés de descendre à Akbou acheter de nouvelles nasses. Au retour, on a pris le départ vers la forêt vers midi. Arrivés sur place, moi j’ai décidé de ne pas poser de nouveaux pièges car je n’étais pas encore bien remis de la grippe. J’étais encore très fatigué. Je suis resté à ma place habituelle et je ne l’ai pas accompagné vers son territoire de chasse.
    Un peu plus tard, ayant repris mes forces, je me suis déplacé vers lui aux alentours de 13 heures. Je l’ai trouvé dans sa hutte entrain de déjeuner. Il avait fini de poser ses nouveaux filets. Je suis resté avec lui quelques instants. On a discuté un peu puis on est passé de l’autre côté de la montagne, du côté ensoleillé, là où il y avait moins de vent. Nous sommes restés là bas à discuter jusqu’à 16 heures.
    C’est en général à cette heure que les grives commencent à remonter de la vallée vers la montagne. C’était le moment de se mettre à l’affût. Je me suis déplacé vers mon secteur et je me suis engouffré dans ma hutte. Une heure et demi plus tard, je me suis étonné de ne voir aucun passage de grive. C’était vraiment bizarre. Je n’avais pas encore pris connaissance du remue ménage des militaires plus bas. Sur le versant de montagne où j’étais, je ne pouvais rien entendre à cause du vent qui soufflait très fort.
    Voyant qu’il n’y avait pas de grives, j’ai pris mon portable pour appeler Mohand et lui demander qu’on plie bagages et qu’on rentre à la maison. Je l’ai appelé deux fois mais il ne répondait pas. Je me suis alors dit qu’il devait être occupé avec une grive empêtrée dans le filet. J’ai attendu un peu et je l’ai rappelé à plusieurs reprises. Son téléphone sonnait mais il ne répondait pas.
    Là, j’ai commencé à être inquiet. J’étais sûr que quelque chose lui était arrivé.
    J’ai pris mon sac à dos et je suis allé voir sur place. Ses affaires étaient là dans sa hutte et ses filets étaient en place avec même des grives prises. Je suis allé voir du côté des filets posés plus loin, il n’y également nulle trace de lui. Je l’ai appelé maintes fois, à haute voix. Aucune réponse. Je me suis dépêché de rentrer pour alerter les jeunes du village. Il fallait lancer les recherches tant qu’il était encore tôt. J’ai pris ma voiture et je suis rentré.
    A l’entrée d’Azrou des jeunes m’ont arrêté. Ils chassaient la grive eux aussi et venaient de prendre la fuite de la même forêt où nous étions Mohand et moi. Ils m’ont parlé de militaires et de tirs qu’ils avaient entendu avant de me demander des nouvelles de Mohand dont ils venaient de remarquer l’absence à mes côtés. « Justement, je suis venu vous chercher pour qu’on ne se lance à sa cherche », ai-je répondu. Ils m’ont raconté qu’eux-mêmes avaient été chassés par les militaires qui les ont pris pour cibles. Certains avaient été braqués avec des armes.
    Là, je suis allé à la maison pour chercher la carte d’identité de Mohand et je suis allé directement à la caserne de Vouni (Boni). S’il avait été arrêté par les militaires, au moins, j’allais leur dire qu’il n’était pas un terroriste. Je voulais juste m’assurer qu’il était entre les mains. Là, je n’ai eu aucune information de la part des militaires.
    De retour à Azrou, j’ai contacté la brigade de gendarmerie de Beni-Mançour. Là-bas, les gendarmes me répondent qu’ils n’ont dit pas d’informations à son sujet. Ensuite, à chaque fois que j’appelais ou qu’ils me rappelaient, les gendarmes cherchaient à gagner du temps en me promettant, à chaque fois, qu’ils allaient me donner les renseignements que je cherchais sur mon frère.
    Vers minuit, ils m’ont informé qu’un corps avait été remis à l’hôpital de Tazmalt. Je suis allé là bas avec quelques jeunes. Sur place on m’a informé qu’aucun corps n’avait été admis dans leur établissement. Ils ont contacté l’hôpital d’Akbou qui a également répondu par la négative. Cela a duré jusqu’au lendemain, c'est-à-dire jeudi, à midi. J’ai fini par me mettre en colère. Tout ce que je demandais, c’était de savoir si mon frère était vivant entre leurs mains ou mort.
    Nous avons des malades et des diabétiques à la maison, ai-je fini par leur dire et cette attente est insupportable. Vers les coups de 13 heures, les gendarmes m’ont appelé pour me demander d’aller voir du côté de la morgue d’Akbou où le corps d’un homme a été déposé. Je n’ai pas pu y aller, mais j’ai envoyé deux voisins pour vérifier.
    A l’hôpital, ils nous ont exigé l’autorisation de la brigade de gendarmerie. Nous avons fini par avoir l’aval de la brigade d’Akbou de nous accompagner à la morgue de l’hôpital. C’est là que nous avons pu identifier le cadavre de Mohand criblé de balles. Le maire d’Ighil Ali est venu au nom des militaires présenter des condoléances à la famille. »
    « Le problème, c’est le patriote qui a guidé les militaires lors de leurs déplacements dans la région. Il a fait des allées et venues toute la matinée. Il savait très bien que toute région est pleine de gens qui ramassent leurs olives ou qui chassent la grive. Les patriotes ne pouvaient pas ignorer que la forêt grouillait de monde. »
    Quand je suis allé voir les militaires de Vouni, ils m’ont dit qu’ils étaient tombés dans un accrochage avec un groupe terroriste qui a duré deux heures. C’est à ce moment là que Mohand, selon eux, aurait été atteint par eux ou par terroristes. J’ai dit à leur chef : « Ce n’est pas possible. J’étais là bas. Les chasseurs qui étaient là bas ont entendu une rafale suivie de quelques coups, pas plus. Vous n’avez tiré que sur mon frère ».
    J’ai fait mon service militaire entre 1994 et 1996 à Batna et je sais ce qu’est la lutte antiterroriste. J’ai vécu des accrochages et des ratissages par dizaines. Je sais ce que c’est.
    Un autre militaire m’a répondu : « On a tiré. On a abattu une personne et blessé une autre. Nous avons trouvé un Kalachnikov sur celui qu’on a abattu ». A cet autre militaire, j’ai répondu que mon frère ne chassait qu’avec un filet. Ses filets sont encore tendus dans la forêt, vous pouvez allez vérifier. Il n’avait qu’un petit couteau sur lui. C’est faux. Il n’était pas armé. Qu’ils l’aient tué par erreur, cela peut arriver, mais qu’ils le fassent passer pour un terroriste cela, nous ne pouvons pas peut l’accepter. »
    « Je n’en veux pas aux militaires. Ils ne sont pas de la région et ne connaissent pas le terrain ni la région. Mais les patriotes qui étaient avec eux n’avaient pas le droit de faire cette erreur. Ils savaient que toute la forêt est pleine de familles qui ramassent leurs olives et de jeunes qui chassent la grive. »
    Un profond sentiment de révolte animait les habitants de la région. La victime était un homme paisible et estimé de tous. Sans emploi fixe, il chassait les grives pour les revendre 70 dinars l’unité et se faire un peu d’argent.
    « Les militaires ont brûlé nos forêts, maintenant ils tuent nos jeunes. Bientôt, on n’osera même plus sortir de la maison si cela continue comme ça », pestait un jeune commerçant. Beaucoup se demandent ce qu’il fallait faire pour exprimer leur colère et leur sentiment d’injustice.
    L’enterrement de la victime aura lieu vendredi dans le cimetière de son village natal. La ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADH) exige l'ouverture d’une enquête judiciaire et que toute la lumière soi faite sur les circonstances de cette mort et demande que justice soi rendue.

    DNA

  • #2
    Et voilà,
    Il y en a qui cherche l’éclatement par tous les moyens
    TAHYA EL DJAZAIR.

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    • #3
      Et voilà,
      Il y en a qui cherche l’éclatement par tous les moyens


      mais non il ne sait pas immolé
      Faute de grives , nous mangeons des Merles

      Commentaire

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