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L'Europe s'organise face au partenariat Russie/Algérie

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  • L'Europe s'organise face au partenariat Russie/Algérie

    Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, cherche à dissiper les craintes des pays européens concernant leur approvisionnement en gaz russe. En visite à Bratislava, en Slovaquie, le chef de la diplomatie russe a déclaré que « les craintes sur la fiabilité des livraisons énergétiques russes en Europe n’ont absolument aucune justification économique, toutes les tentatives de spéculation dans ce domaine sont injustifiées ».

    Preuve supplémentaire, la Russie est en train de diversifier les routes pour atteindre directement ses clients en Europe de l’Ouest. Un consortium a été créé avec l’Allemagne pour construire un nouveau gazoduc. Le gazoduc nord-européen (GNE) va commencer dans le port russe de Vyborg et finira à Greiswald, au nord de l’Allemagne. Ce nouveau tuyau évite les pays situés à proximité de son tracé, ce qui fait polémique dans les pays baltes, eux aussi dépendants de la Russie. L’ouvrage passera sous la mer Baltique. Il est bien loin de l’Ukraine. Elle reste encore le pays de transit pour transporter le gaz russe vers les pays européens. Mais Kiev n’est plus un partenaire sûr. L’hiver dernier, au moment de la crise entre la Russie et son voisin qui refusait les nouveaux tarifs, l’approvisionnement des pays européens a été momentanément diminué.

    Un partenariat Russie/Algérie


    Malgré les déclarations rassurantes en provenance l’Est, les Européens peuvent également s’inquiéter de ce qui se passe au sud, de l’autre côté de la Méditerranée. Echaudée par le bras de fer de janvier entre l’Ukraine et la Russie, où se trouve la moitié de l’approvisionnement de l’Europe en gaz, cette dernière a décidé de sécuriser ses approvisionnements en provenance d’Algérie. Et surprise, un rapprochement est en gestation entre Gazprom, le géant russe appartenant à l’Etat, et la Sonatrach, l’entreprise publique algérienne spécialisée dans les hydrocarbures.

    Vladimir Poutine a fait une courte visite à Alger le mois dernier où on a surtout parlé annulation de dette et ventes d’armes. Mais les présidents russe et algérien ont également parlé de la signature d’un mémorandum d’entente entre Gazprom, dont le patron avait fait le voyage à Alger, et la Sonatrach. Selon des informations publiées au moment du voyage de Vladimir Poutine en Algérie, le mémorandum en gestation concerne la prospection et l’extraction de gaz en Algérie, ainsi que la modernisation du réseau de gazoducs algérien.

    Ce partenariat entre les deux grandes sociétés d’Etat devrait être signé dans le courant du mois d’avril. Selon le PDG de Gazprom, Alexei Miller, la coopération portera en particulier sur la liquéfaction de gaz algérien, ce qui permettra son transport par voie maritime. Une autre entreprise russe, Lukoil, entrera dans ce projet industriel avec la Sonatrach. A l’occasion de la visite de Poutine, un entretien a eu lieu entre le ministre algérien des Affaires étrangères, Mohammed Bedjaoui et Serguéï Lavrov, son homologue russe. Ce dernier a déclaré que la Russie et l’Algérie, qui exportent la majeure partie de leur gaz vers l’Europe, ont « un intérêt mutuel à agir ensemble et à coordonner leurs efforts sur le marché mondial ».

    Représentant la septième réserve mondiale de gaz, l’Algérie intéresse également la France, mais aussi d’autres pays plus lointains comme les Etats-Unis : Donald Rumsfeld a séjourné cet hiver à Alger. Le président sud-coréen a, lui aussi, tout récemment effectué une visite officielle en Algérie. La Chine est également sur les rangs.

    C’est dans ce contexte de négociations internationales intenses menées par le gouvernement algérien que la découverte de nouveaux gisements de gaz algérien a été annoncée. D’un côté le groupe italien Edison indiquait avoir trouvé un énorme gisement de gaz dans le désert algérien. « Il s’agit d’un gisement de 100 à 120 milliards de mètres cubes, soit un tiers de plus que le gisement égyptien, qui est un des plus importants de la Méditerranée », avait précisé l’administrateur délégué du groupe, Umberto Quatrino, au quotidien italien Corriere della Sera.

    D’un autre côté, le groupe pétrolier espagnol Repsol YPF faisait savoir, vingt-quatre heures plus tard, avoir lui aussi découvert du gaz dans le Sahara algérien, suite à des tests dans le bassin de Reggane. Le groupe espagnol avançait le chiffre d’une production de départ de 736 000 mètres cubes par jour.

    Quelques jours plus tard, les deux compagnies européennes se sont vues reprocher, par le ministre algérien de l’Energie et des Mines, d’avoir annoncé ces découvertes. « Les sociétés n’ont pas le droit d’annoncer quoi que ce soit sans se coordonner avec la Sonatrach et sans l’accord du ministère », a déclaré Chakib Khelil. « Nous avons réagi très sévèrement à l’encontre de ces sociétés qui annoncent des données incorrectes et qui portent préjudice à la crédibilité de Sonatrach et à celle de tout le pays », a encore insisté le ministre.

    L’Europe s’organise

    Comme dans n’importe quel pays, les données concernant les ressources énergétiques sont stratégiques. Et le gouvernement algérien n’a peut-être pas envie de s’engager trop vite avec les deux compagnies européennes qui ont découvert ces gisements. Car si la Russie a la possibilité de faire pression sur l’Europe en livrant plus de gaz à la Chine et moins à ses clients traditionnels de l’UE, l’Algérie, elle aussi, peut regarder ailleurs que vers la vieille Europe. Dans une réunion qui vient de se tenir en Algérie sur le thème « négoce et financement des hydrocarbures en Afrique », le PDG de la Sonatrach, Mohamed Meziane, a d’abord répété que l’initiative toute récente des deux sociétés européennes avait déplu. Mohamed Meziane a par ailleurs fait le panorama des investissements de sa compagnie en Amérique latine, en Europe et en Asie. Mais il a surtout annoncé que désormais la Sonatrach « fait de l’Afrique une zone d’intérêt prioritaire avec l’objectif d’acquérir de nouveaux blocs d’exploration et des projets de développement de gisements en Libye, en Tunisie, en Egypte, au Niger, au Mali ». Le responsable algérien a souligné que l’Afrique représente 9% des réserves mondiales d’hydrocarbures, largement sous utilisées. En plus, la majorité de la population africaine n’a pas encore accès à d’autre ressource énergétique que la biomasse et le bois.

    Le président Bouteflika pourrait donc lui aussi regarder vers le Sud. En aidant les pays africains à accéder au gaz et au pétrole, facteurs de développement, l’Algérie, comme la Russie, ferait peser l’arme énergétique sur l’Europe. Pour l’éviter, le secteur européen de l’énergie cherche à investir en Algérie. L’espagnol Repsol YPF, qui vient donc de découvrir un gisement de gaz, a signé, courant mars, un accord avec une autre entreprise espagnole, Gas Natural, et la Sonatrach. Il s’agit de construire une usine de gaz liquéfié dans l’est algérien. Le projet de Gassi Touil est « le plus important jamais réalisé » en Algérie, précise le communiqué de l’entreprise espagnole. On le sait, Gazprom entame également un partenariat de même nature avec l’entreprise publique algérienne.

    Depuis la crise entre l’Ukraine et la Russie, la France cherche, elle aussi, à dépendre moins du gaz russe. Gaz de France s’est déclaré prêt à investir dans deux projets de gazoducs. L’un, Medgaz, reliera dès 2007 l’Espagne à l’Algérie. L’entreprise publique française financera sa construction à hauteur de 12%, pour que l’Algérie devienne, d’ici 2010, « son deuxième fournisseur à égalité avec la Russie ». La Sonatrach fait bien sûr partie du consortium du projet Medgaz. La France s’intéresse également à un projet plus ambitieux et plus coûteux, le gazoduc Nabucco. Long de 3 300 kilomètres, il devrait acheminer jusqu’à l’Autriche du gaz iranien en provenance de la mer Caspienne. La mise en service est prévue pour 2020. Même si l’Algérie et la Russie parviennent à mettre en place, comme l’exprimait un journal algérien, « un puissant lobby du gaz à même de faire fléchir l’Europe », cette Europe est en train de s’organiser pour ne pas risquer de rupture dans son approvisionnement en énergie.

    Par RFI
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