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Hosni Moubarak face à une armée égyptienne ambivalente

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  • Hosni Moubarak face à une armée égyptienne ambivalente

    L'armée égyptienne entend survivre et ne pas se laisser emporter par un effondrement de l'appareil d'Etat du président Hosni Moubarak.

    Les généraux décideront-ils pour autant de précipiter son départ comme leurs homologues tunisiens l'ont fait en persuadant l'ex-président Zine Ben Ali de fuir son pays le 14 janvier dernier après plusieurs semaines de manifestations ?

    La réaction des forces armées au mouvement de protestation qui secoue l'Egypte depuis six jours relève de l'ambivalence.

    Maintenant que la police a perdu le contrôle des rues du Caire, des soldats protègent les installations clés mais ils ne tentent pas de faire appliquer le couvre-feu par la force et on les voit souvent fraterniser avec des manifestants.

    Sur les chars près desquels se tiennent des militaires, on lit des slogans comme "A bas Moubarak. A bas le despote. A bas le traître. Le pharaon hors d'Egypte. Ça suffit". Comme on lui demande des explications, un soldat répond: "Ce sont des mots écrits par les gens. C'est le point de vue des gens."

    Voyant sa légitimité politique s'évaporer, Moubarak a nommé samedi un ancien militaire, le chef des renseignements Omar Souleimane, au poste de vice-président qu'il avait laissé vacant depuis son accession au pouvoir, il y a trente ans. Il a aussi nommé Premier ministre Ahmed Chafik, ex-commandant de l'armée de l'air, après avoir dissous le cabinet.

    PRUDENCE ENVERS LA POLITIQUE

    Mais on ne peut pas encore savoir si les militaires maintiendront au pouvoir le raïs âgé de 82 ans, ou s'ils le sacrifieront aux intérêts nationaux de l'Egypte - et aux leurs.

    Paul Salem, directeur du Centre Carnegie pour le Moyen-Orient à Beyrouth, note que des soulèvements antérieurs ont conduit à l'effondrement de tout l'édifice étatique, par exemple avec le renversement du shah d'Iran en 1979 ou l'éviction de l'Irakien Saddam Hussein par l'armée américaine en 2003.

    "Les événements de Tunisie ont montré tout à fait le contraire", écrit-il dans un commentaire. "De fait, l'armée a compris que pour se tirer d'affaire il lui fallait éloigner le dirigeant au lieu de se tenir à ses côtés."

    "La leçon selon laquelle un engagement excessif en politique peut affaiblir les instances militaires au lieu de les renforcer est une leçon que la plupart des milieux militaires ont assimilée dans le monde au cours des dernières décennies - notamment l'armée turque", poursuit-il. "Nous espérons qu'elle fait aussi son chemin parmi les responsables militaires arabes, en particulier en Egypte."

    L'armée égyptienne - la dixième du monde avec plus de 468.000 hommes - est au coeur du pouvoir depuis le renversement de la monarchie par des officiers en 1952.

    Les quatre présidents (1) qui ont dirigé le pays depuis lors sont venus de l'armée, aujourd'hui commandée par le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, 75 ans. Elle reçoit une assistance annuelle d'environ 1,3 milliard de dollars des Etats-Unis.

    Les Egyptiens se font en général une haute idée de l'armée, moins associée à la répression courante que la police et les services de sécurité qui, selon des câbles diplomatiques américains diffusés par WikiLeaks, se sont transformés en une force considérable de 1,4 million d'hommes depuis la révolte islamiste avortée des années 1990.

    FORCE ÉCONOMIQUE

    Cependant, les foules de manifestants qui envahissent les rues ne veulent visiblement pas voir remplacer les trois décennies du régime autoritaire de Moubarak par un dispositif militaire comprenant ses plus proches alliés.

    Moubarak a rencontré la hiérarchie militaire dimanche, confirmant ainsi qu'il voit dans l'armée son unique espoir au moment où s'écroulent les autres piliers de son système.

    Sa machine politique discréditée, le Parti national démocrate (PND), est symboliquement partie en fumée vendredi au Caire, où des émeutiers en ont incendié le siège.

    L'armée est notoirement opaque. Il est quasiment interdit de faire des reportages à son sujet, même dans le décor médiatique beaucoup plus animé qui s'est mis en place depuis quelques années en Egypte. On sait peu de chose de ses importants biens fonciers, de ses intérêts économiques ou de son budget.

    "L'idée que l'armée reste une force politico-économique clé fait partie des idées reçues ici", dit un câble diplomatique américaine de juillet 2009 diffusé vendredi. "Mais d'autres observateurs nous disent que l'armée a perdu en influence, qu'elle s'est divisée et que sa direction s'est affaiblie."

    Il se peut néanmoins que les militaires considèrent comme leur devoir d'assurer une transition ordonnée vers un nouvel ordre politique encore mal défini.

    Parmi les impondérables que peut receler l'agitation en cours, certains n'excluent pas une coupure entre les généraux de l'entourage de Moubarak et les soldats déployés dans les rues.

    "C'est l'un de ces moments où, comme avec la chute du communisme en Europe de l'Est, il peut appartenir à des lieutenants et à des soldats de décider de tirer ou non sur la foule", dit Rosemary Hollis, spécialiste du Moyen-Orient à la City University de Londres.

    (1) Mohamed Néguib (1953-54), Gamal Nasser (1954-1970), Anouar Sadate (1970-1981) et Hosni Moubarak (depuis 1981).

    Source: Reuters
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