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Bouazara, directeur de l’Orchestre symphonique national

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  • Bouazara, directeur de l’Orchestre symphonique national

    Il nous a accueilli à l’Ecole supérieure de musique, l’occasion d’évoquer pour nous le rôle de l’Orchestre national symphonique dont il est le directeur émérite et ainsi tracer les objectifs et les projets de celui-ci.

    L’Expression: M.Bouazara, vous êtes, tout d’abord, le directeur de l’Orchestre symphonique national, vous venez de recevoir des mains de Son Excellence l’ambassadeur d’Italie, la distinction de commandeur de l’ordre de l’Etoile de solidarité italienne. Quel est votre sentiment après avoir été récompensé de cette médaille, d’autant, croyons-nous que vous êtes le seul Algérien à en être honoré?
    Abdelkader Bouazara:*Bien sûr que c’est un plaisir et un grand honneur pour moi en tant que musicien d’abord (violoniste) qui a fait des études supérieures en musique (musicologie) que de recevoir cette distinction. Comment dire, j’ai éprouvé une émotion extraordinaire lors de la remise de cet insigne de commandeur de l’ordre de l’Etoile de solidarité italienne qui est chapeauté par le président de la République italienne et qui m’a été remise par Son Excellence l’ambassadeur d’Italie à Alger, en présence de personnalités artistiques et bien sûr, ma grande famille, les musiciens de l’Orchestre national à qui je dédie cette médaille, à tous les musiciens, tous genres confondus, et tous ceux qui ont donné de leur vie pour que la musique règne dans ce pays. Je dois dire que cette distinction est aussi le fruit d’un travail de longue haleine et de durs efforts que nous avons entrepris pour l’identification de la culture dans notre pays. Je dis chapeau bas à nos amis italiens qui étaient là avec nous pendant les années de braise très difficiles qu’a vécues l’Algérie. Ils étaient avec nous. Nous avons sillonné ensemble le pays où on a donné de très grands concerts avec de grands chanteurs d’opéra, lesquels étaient accompagnés de musiciens de talent, des chefs d’orchestre de renommée internationale et tout ça a abouti à une amitié très profonde entre les musiciens algériens et italiens. Chaque année, ils étaient avec nous, malgré que nous ayons vécu des moments très forts avec d’autres musiciens ou chefs d’orchestre d’autres pays comme l’Asie, la Corée, le Japon, la Syrie, la Tunisie, l’Egypte, l’Autriche, la France et j’en passe...

    Qu’est-ce qui explique ce choix porté sur ce pays, l’Italie, justement avec lequel vous avez entamé une collaboration intense depuis quelques années?
    C’est une question pertinente. Comme je l’ai dit tout à l’heure, ils étaient là avec nous pendant les âpres années de la tragédie nationale. C’est l’un des pays qui ont soutenu l’Orchestre national et l’art algérien de manière générale. Cette musique qui enchante chaque homme sans distinction d’origine ni de langue, puisque la musique est l’inspiration de chaque artiste. C’est la raison pour laquelle cette forte amitié est née, laquelle ne nous a pas laissé indifférents envers nos amis italiens. Et vous savez, nous avons fait ces voyages par route, par bus, ils étaient là, ils vivaient ce qu’on vivait, la peur, le stress, l’angoisse, etc. On était nous mêmes ciblés en tant que musiciens. Moi je mettais mon violon dans un cabas pour que je puisse passer inaperçu. On donnait nos concerts à partir de 17h, ce n’était pas facile. On a sillonné tout le territoire. On a été à Constantine, Oran, Tizi Ouzou et dans d’autres villes. C’est magnifique. On a passé des moments incroyables entre musiciens, j’entends professionnels. Et là, ils nous ont donné cette envie de ne plus avoir peur, puisque l’Orchestre symphonique national algérien est lui-même une famille car il est constitué de musiciens venant de toute l’Algérie. Tout musicien professionnel qui a fait des études approfondies a sa place au niveau de l’orchestre qui est une véritable pépinière car on retrouve à la fois, le musicien chevronné et le jeune musicien débutant. Pour former un seul violoniste, je tiens à rappeler qu’il faut pas moins de dix ans pour qu’il puisse avoir sa place, à part entière, dans un orchestre symphonique.

    Nous l’avons compris, votre défi, c’est de valoriser le patrimoine musical national sous forme symphonique. N’est-ce pas difficile pour la musique classique algérienne, notamment la musique andalouse qui ne peut s’écrire à défaut de solfège, comment faites-vous?
    Je ne suis pas d’accord avec vous. Toute musique peut être écrite, pourquoi? Maintenant, avec la technologie, le monde est devenu un grand boulevard. Ce n’est plus comme avant. Aujourd’hui, on n’a qu’à prendre un petit CD et aller enregistrer à Djanet, Tébessa, Laghouat ou dans n’importe quelle ville algérienne ou n’importe quel village, n’importe quel son. A ce moment-là, on le transcrit et il devient écrit et on peut le jouer avec n’importe quel instrument. C’est ce qu’on fait. On puise nos mélodies du terroir, du folklore, de la musique andalouse, du chaâbi, je dirais de toute la musique algérienne de façon générale. La preuve, on a réussi à faire de notre musique une musique universelle qui peut être jouée par tous les orchestres du monde, que ce soit à Moscou, Tokyo, New York, Addis-Ababa ou au Caire, notamment. Notre musique peut être jouée d’une manière universelle, académique puisqu’elle est écrite et enseignée. Cela veut dire que tout musicien qui peut lire une note peut jouer de la musique algérienne telle que nous sommes en train de faire maintenant avec les différents compositeurs comme Rachid Saouli. On a joué des morceaux des regrettés Boudjemia Merzak, Abdelwahab Salim, et autres. Il y a les jeunes d’aujourd’hui à l’instar de Sid Ahmed Beli, Salim Dada, Rabah Kadem (qui est aussi compositeur, arrangeur et chef de choeur de la chorale de l’Orchestre national) et tout ça est un travail de longue haleine puisque notre slogan est «le professionnalisme au service de la culture».
    Rachid Saouli a étudié dans les grandes écoles, il est aussi chef d’orchestre et enseignant à l’Insm, moi aussi j’enseigne jusqu’à présent. Je suis professeur de violon et j’étais producteur d’une grande émission à la radio qui s’appelait Musique des peuples et ce, de 1995 à 2003 où j’ai parlé de l’histoire universelle de la musique, à ne pas confondre avec l’histoire de la musique universelle.
    J’ai fait écouter, expliquer des musiques, du monde entier, de l’Asie, de l’Afrique, des pays arabes, du continent américain, pour montrer que la musique est un langage universelle.

  • #2
    M. Bouazara, vous êtes aussi à l’origine du Festival annuel de la musique universelle qu’organise l’Orchestre symphonique et qui permet chaque année, à plusieurs pays du pourtour méditerranéen de se produire. Ce festival grandit tout doucement, mais sûrement. Un mot sur cette manifestation et ses objectifs?
    Je remercie d’abord notre ministère de la Culture, à sa tête Khalida Toumi, qui nous a soutenus, notamment depuis 2003 où elle nous a donné tous les moyens matériels humains et financiers pour qu’on puisse faire notre travail dans des normes professionnelles comme notre slogan le dit. Ce n’était pas facile, bien sûr. En ce qui concerne le festival qui a été créé en 2009, la première édition a vu la participation exceptionnelle de douze pays. C’est énorme par rapport à une première édition, laquelle était réussie sur tous les plans: organisation, participation et ce fut vraiment de très grands concerts avec des musiciens qui ont joué ensemble et interprété la fameuse symphonie de Beethoven, des extraits d’opéra... 90 musiciens, à partager avec le public le plaisir de la grande musique universelle. J’ai été nommé effectivement à la tête de ce festival en tant que commissaire pour l’année 2009, et l’année dernière, six nouveaux pays nous ont rejoints, en plus des douze précédents. Il s’agit de la Suède, la Turquie, la Tchékie, la Pologne, le Mexique, la Suisse.
    Vous voyez que ce n’est pas seulement les pays de la Méditerranée. Cette édition a vu la participation, à l’ouverture, de la chef d’orchestre Zahia Zouani et plusieurs solistes. L’Espagne était l’invité d’honneur. On a fait participer un très grand soliste guitariste. On a voulu rendre à la guitare ses lettres de noblesse, car aimée par tout le monde et ce, de 7 à 77 ans. Il a été joué le fameux concert d’Aranjuez de Joaquin Rodrigo qui est très connu. Ce qui m’a donné l’envie de continuer en endossant cette responsabilité était de voir quatre pays se produire, chaque soir, devant un public assoiffé et connaisseur surtout. Chaque soir, la salle était archicomble. La soirée de clôture a enregistré le double de ce que peut contenir le TNA. C’est inimaginable que les Algériens viennent en masse. Il y avaient beaucoup de jeunes aussi qui venaient apprécier un orchestre multinational, composé de musiciens de plus de 14 pays, ensemble pour jouer, notamment la fameuse suite symphonique de Shéhérazade. C’était fabuleux de voir ce grand public, et bien sûr, en la présence de Mme la ministre et de beaucoup d’ambassadeurs et de familles. C’est une première pour nous de voir le fruit d’un travail de proximité de plusieurs années. Et comme disait le défunt Athmane Bali: «Il faut faire connaître la musique algérienne aux Algériens d’abord!» C’est l’un de nos buts. Cette fameuse suite symphonique a été jouée par plus de 140 musiciens sur scène et a connu, en deuxième partie, la participation de notre chorale, dirigée par Maître Rabah Kadem. Dans l’ensemble, nous sommes vraiment très satisfaits pour ce début de festival qui a vu une affluence très nombreuse et surtout qualitative.

    L’Orchestre symphonique a été créé en 1992, mais n’a pu être opérationnel qu’en 1997. Il a été relancé en 2001 avec beaucoup de difficultés. Nous sommes en 2011, souffrez-vous toujours des mêmes problèmes budgétaires qu’avant?
    Permettez-moi de saluer ceux qui ont créé et institutionnalisé l’Orchestre symphonique, les différentes institutions à caractère artistique.
    Ces hommes d’Etat que je salue avec un grand respect, car tout le monde sait ce que c’était l’Algérie en 1992. Les hommes d’Etat de l’Algérie ont réfléchi et ils ont compris que la culture c’est important, car c’est ce qui demeure en l’homme quand il a tout oublié. Je remercie ces hommes d’avoir créé l’Orchestre symphonique national même s’il n’a commencé que cinq années plus tard. C’est grâce à ces hommes-là que nous sommes là, qu’un musicien professionnel algérien touche son instrument avec finesse et beaucoup d’amour. Certes, quand on a commencé, il y avait beaucoup de problèmes, et il y en a encore. Mais vu la volonté exceptionnelle de notre ministère, à sa tête Khalida Toumi qui est là, ça va mieux. Non seulement elle nous soutient, mais elle est présente à pratiquement tous nos concerts. Elle chapeaute presque toutes nos rencontres internationales, elle nous aide pour pouvoir donner le meilleur de nous-mêmes. Car le musicien est un membre actif de la société. On ne peut pas parler d’une société sans culture ou une culture sans société. L’art de la musique a toujours sa place dans le milieu algérien, même si nous avons vécu des années très dures. La seconde édition du festival nous a donné une leçon. Le message est passé, l’Algérien sait faire la différence entre ce qui est beau et ce qui ne l’est pas. Les problèmes de budget ne sont pas comme à nos débuts. Il y a des promesses faites de la part de la ministre de la Culture qui, on l’espère, d’ici une année ou deux, vont se concrétiser. Il s’agit d’avoir notre propre siège et une salle propre à l’Orchestre national. Tout cela est étudié par le ministère de la Culture. J’espère qu’on les aura très vite, pour aller au-delà de ce que nous voulons entreprendre.
    L’Orchestre symphonique national vit actuellement son âge d’or. On est arrivé à faire des choses que d’autres pays n’ont pu faire. L’Orchestre national est constitué de musiciens de toute l’Algérie et a sillonné quasiment tout le pays. Nous en sommes à la 43e wilaya. Nous serons le 10 février à Boussaâda qui est une daïra. Ça, c’est magnifique. On a commencé par le local, le national puis on est arrivé à l’international. On a commencé par une trentaine de musiciens, aujourd’hui on est 75. Nous avons aussi créée notre chorale. Cela nous a donné envie de continuer notre mission qui est noble et qui a rassemblé des musiciens professionnels et des musiciens de l’Algérie qui sont là dans cette maison qui s’appelle l’Orchestre symphonique national.

    L'Expression

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