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Les savants Arabes médiévaux au miroir de leur biographie.

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  • Les savants Arabes médiévaux au miroir de leur biographie.

    Françoise Micheau, Université de Paris I

    lundi 22 juillet 2002

    Dans la culture musulmane, le savant, l’ouléma, est le détenteur du savoir. C’est un personnage important comme le montre le hadith suivant : "aux yeux de Dieu, le sang du savant est plus précieux que le sang du martyr". Son savoir est avant tout religieux (la connaissance de Dieu) mais il s’étend à toutes les disciplines touchant à la connaissance du beau et du bien.

    Une source précieuse : les dictionnaires biographiques

    F. Micheau s’interroge ici sur la place de l’homme de science dans l’Islam médiéval à travers l’étude d’une source particulière, les dictionnaires biographiques (tabaqat). Il s’agit d’un genre littéraire spécifique à la culture arabe du Moyen-Age composé d’ensembles importants de notices bio-bibliographiques nécessaires à la communauté musulmane pour suivre et ainsi authentifier la transmission des paroles du prophète de génération en génération. L’ensemble des savants apparaît comme une chaîne de transmetteurs dont on cherche à s’assurer à partir du IXe siècle qu’elle est bien ininterrompue et que les maillons sont dignes de foi.

    On peut distinguer des oeuvres rassemblant les notices des savants d’une ville (Damas) ou d’une région (Al Andalus). Bagdad pour le X° s. ne compte pas moins de 7800 notices. S’y développe souvent un "orgueil de minaret" dans la mesure ou à travers la valeur de savants, c’est la gloire d’une ville ou d’une région qui est célébrée.

    Le dictionnaire peut aussi concerner les savants d’un groupe religieux, d’une école juridique ou d’une profession. Il existe ainsi des dictionnaires biographiques de grammairiens, de poètes, de médecins. Á partir du XIIIe s. les dictionnaires deviennent de véritables encyclopédies d’hommes illustres, qu’il s’agisse de savants ou d’hommes politiques.

    Et la grande expansion du genre qui se manifeste aux XIV-Xvèmes siècles traduit sans doute la volonté de conserver un patrimoine dans une période de crise.

    Du VIIIe s. au XV° s., les 150 dictionnaires biographiques qui nous sont parvenus représentent une littérature foisonnante à partir de laquelle il est possible de s’interroger sur la place de l’homme de science.

    La place des hommes de science

    Il s’agit, au départ d’une place réduite car la priorité est donnée à la connaissance religieuse. Cependant, au fur et à mesure, les hommes de science figurent en bonne place parmi les hommes illustres, ils sont reconnus comme des hommes importants.

    Ainsi le dictionnaire biographique d’Ibn Al Qiftî.(Syrie 1248) comprend 415 notices : y figurent de nombreux philosophes, mathématiciens, médecins.

    Celui d’Ibn Abî Usaybi’a (Syrie 1270) est entièrement consacré aux médecins. Dans ce cas, on peut se demander si il s’agit de garder la mémoire d’un groupe, d’en servir la fierté ou d’intégrer un groupe longtemps contesté dans l’Islam.

    Toujours est-il que des historiens les ont depuis longtemps utilisés. En 1876, Lucien Leclerc en fait la source principale de son "histoire de la médecine arabe". Depuis 30 ans se développe un regard plus quantitatif dans le cadre d’une histoire sociale de la science. En effet, ces sources permettent de connaître :

    * l’histoire d’individus : les notices comportent les noms complets, les lieux de naissance, la généalogie, des qualificatifs laudatifs et des renseignements circonstanciés sur l’enseignement, les disciplines pratiquées, les fonctions exercées la liste des oeuvres. La préoccupation des auteurs est différente des nôtres. Ils visent, d’une part, à rendre compte de la vie d’illustres notables appartenant à l’élite en insistant sur leur rôle dans la transmission du savoir (des maîtres prestigieux pour des élèves nombreux), sur les services rendus aux souverains et sur l’importance de leurs productions écrites. Les auteurs cherchent, d’autre part à instruire (éléments propres de biographie), à édifier (créer des modèles) et à divertir le lecteur par de nombreuses anecdotes ou des poèmes.

    * la place qu’une époque et une société donne aux hommes de science et la place des savoirs dans la société musulmane. Du XI° au XII° s., les hommes de science s’illustrent dans le domaine de sciences religieuses ou littéraires. On assiste à une évolution de la place des disciplines scientifiques vers une plus grande intégration dans la société et vers une perte de spécificité. La conception de la science dans le monde musulman médiéval place la transmission bien avant l’innovation, les savants sont alors instrumentalisés pour assurer la continuité de la science, ce qui fait du savoir, un ensemble plus ou moins clos.

    Laurent GUYOT
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
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