Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Nassera Dutour : Organisés, les jeunes s’imposeront comme une force de changement !

Réduire
Cette discussion est fermée.
X
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Nassera Dutour : Organisés, les jeunes s’imposeront comme une force de changement !

    Divergences au sein de la CNCD, rôle des partis, mobilisation des jeunes et perspectives du mouvement : Nassera Dutour, mère de disparu, porte-parole de SOS Disparus, revient sur les jalons de la dynamique de la Coordination, sa force et ses faiblesses.


    -Quel premier bilan tirez-vous de la marche interdite de samedi dernier à Alger ? Echec ? Réussite ?
    Ce n’est ni un échec ni une réussite. C’est vrai que nous n’avons pas pu marcher, nous avons été empêchés par l’impressionnant déploiement des services de sécurité. Mais, quand même, les Algériens ont fortement répondu à l’appel de la Coordination, ils ont montré leur soif de s’exprimer, leur soif de liberté. Un vieil homme me disait à la place du 1er Mai : «J’ai peur, je tremble, mais je suis là, pour que mes enfants vivent dans une Algérie meilleure.» Et, contrairement aux souhaits du pouvoir, il n’y a pas eu de débordements ou de violences : à chaque petit problème, les manifestants scandaient «Massira selmya ! (marche pacifique !)». L’autre côté positif est que les manifestants ont crié «Système dehors !», et pas seulement «Bouteflika dehors !» Les Algériens ont conscience que le problème, ce n’est pas seulement une personne, mais tout le régime ! «Si Bouteflika s’en va, “ils“ nous ramèneront sûrement quelqu’un d’autre», disait un des jeunes manifestants. Les gens ont conscience de ce qui se passe. Les jeunes surtout.

    -Justement, beaucoup de jeunes, pas forcément des militants d’ONG ou de partis classiques, ont rejoint la CNCD, comme par exemple le collectif Algérie Pacifique…
    Il faut encourager ces jeunes et c’est grâce à eux que je trouve du sens à notre présence au sein de la Coordination. Ils ont vite compris nos revendications en tant que familles de disparus. Maintenant, c’est à nous, les «plus vieux» de ne pas les décevoir. Parce que ces jeunes sont très lucides, surtout vis-à-vis de la classe politique. «Où ils étaient ces partis durant les vingt dernières années ?!», s’interrogent-ils. Nous avons besoin de leurs critiques, de leur regard, de leur énergie. Ils sentent que les «têtes» de la société civile ou des partis sont en décalage, déconnectées de la réalité.

    -On parle de divergences au sein de la CNCD, et certains évoquent des litiges datant des années 1990 qui fractionnent, depuis, la société civile…
    Je ne crois pas que c’est seulement lié à notre époque. De tout temps, société civile et partis ont été divergents. Ce n’est pas nouveau. Le gros problème, parfois, c’est l’ambition de certains. Nous, en tant qu’organisations de familles de disparus, nous avons notre droit à la parole au sein de la CNCD. Malgré cela, durant la manifestation de samedi, il y a eu quand même des manifestants qui nous ont interpellés : «Où sont les familles victimes du terrorisme ?» Or, elles étaient là aussi ! En tout cas, le plus important à mes yeux est que cette Coordination dure dans le temps, au-delà de n’importe quel agenda partisan. C’est là son grand défi. Et pour ce faire, nous avons proposé à nos collègues au sein de la CNCD d’établir une charte en précisant nos objectifs, en définissant exactement ce que nous voulons dire par «changement», comment le préparer…
    -Comment voyez-vous l’avenir de la mobilisation ?
    La Coordination n’appelle pas seulement à des marches ! On y discute de beaucoup d’actions à lancer, comme par exemple aller dans les communes et les quartiers, au contact direct des gens pour expliquer qui nous sommes, quelle est notre action, ce que nous voulons accomplir… Mais en gros, pour l’avenir, je reste très optimiste. D’abord à cause de tous ces jeunes, lucides, engagés, avec un nouveau regard : s’ils trouvent un cadre de mobilisation discipliné, encadré, organisé, je dirai que dans pas plus de deux ou trois ans, ils s’imposeront comme une importante force du changement. Ensuite, je vois notre jonction - après tant d’années de division - avec les familles victimes du terrorisme face aux dénis de justice et de vérité. Cette union et la réflexion qu’on a engagée ensemble donneront de nouvelles pistes pour l’avenir de notre Algérie. Les choses évoluent : il y a dix ans, jamais un anonyme n’aurait rejoint notre groupe en pleine manifestation pour reprendre nos slogans exigeant la vérité sur nos fils disparus ! Ils étaient plus d’une centaine samedi dernier derrière nous. La peur des années 1990 a reflué. On n’en est plus à se contenter de survivre aux violences. Les Algériens ont vite compris. Il faudrait donc que les partis comprennent à leur tour que les Algériens ne sont pas manipulables. Les Algériens sont très lucides.
    -Comment prévoyez-vous le déroulement de la marche de samedi prochain ?
    Soit le pouvoir laissera faire, soit il y aura une violente répression. Je ne vois pas d’autres issues. Et si le pouvoir continue à réprimer ainsi, l’émeute violente sera inéluctable.



    le 18.02.11 | 01h00 AL WATAN
Chargement...
X