Comme la marche réprimée du 12 février, celle d’hier a eu également son lot de contre-manifestants.
Si certains d’entre eux nous ont assuré qu’ils étaient venus exclusivement de leur propre chef, d’autres, en revanche, se sont révélés bel et bien payés pour revêtir le costume peu glorieux de «baltaguia».
Déjà, des SMS circulaient la veille avec ce contenu : «Ya Sadi rouh el darek, Bouteflika machi Moubarak !» (Saïd Sadi rentre chez toi, Bouteflika n’est pas Moubarak). Des affiches ont été, en outre, placardées un peu partout, selon l’AFP, avec ce mot d’ordre : «Ne touche pas à mon quartier !»
Omar, 46 ans, est maçon de métier, mais est actuellement au chômage. Quand quelques figures de la CNCD investirent la place du 1er Mai, elles se sont vu violemment prises à partie par Omar et quelques autres habitants du quartier qui les ont traitées de tous les noms d’oiseau. «Rentrez chez vous ! Il n’est pas question que vous marchiez ici !» tonne Omar, avant d’enchaîner : «Ya Saïd Sadi rentre chez toi en France!» «Nous, on a fait notre révolte. Quand ils ont augmenté l’huile et le sucre, nous nous sommes insurgés et ils se sont calmés.»
Et de nous confier : «Moi je dis barakat ! Vous savez, mon frère a été décapité en 1995 par les terroristes et, à ce jour, on n’a pas retrouvé sa tête. Je n’ai pas envie de revivre ça ! L’Algérie est un immense chantier, il faut laisser Bouteflika travailler.» Omar n’a guère été soudoyé pour affronter les manifestants, insiste-t-il : «Jamais de la vie ! Je n’ai pas reçu un centime de personne !»
Il plonge la main dans sa veste et en extirpe une vieille photo de son défunt père : «Mon père est un chahid. Vous comprenez?» «Jamais je ne me permettrai de marchander avec l’honneur de ma patrie !», martèle-t-il.
Ce n’est pas le cas de ce groupe de trublions qui présentent, eux, un tout autre profil : nettement plus jeunes, ce sont des adolescents pour nombre d’entre eux.
Des confrères croient savoir qu’il s’agit en partie de dealers et autres gardiens de parking qui servent à l’occasion d’indics pour la police. Approchés, ils crient en face des manifestants : «Bouteflika machi Moubarak !», «Ya la police, khelliwna n’hawzouhoum» (Police, laissez-nous les chasser). Ils sont une vingtaine. L’un d’eux brandit un portrait de Boutefika. La police montre une passive complicité à leur égard, alors que la bastonnade a frappé de nombreux militants pro-CNCD. Curieusement, il fuse de ce groupuscule un étonnant : «Madirouche alih, âtawlou tchippa !»
(Ne le croyez pas, il a reçu de l’argent). Nous demandons plus de précisions : «Absolument ! Je les connais parfaitement, ouled houmti ! Ces gens travaillent à l’APC de Sidi M’hamed. Ils ont été payés 2000 DA pour faire ça !», assure un membre de ce groupe. Un de ses acolytes l’approuve : «Je vous le confirme : le maire a payé des jeunes du quartier.»
Alors que les manifs embrasent de plus belle la rue Mohamed Belouizdad, des marcheurs se voient plaqués contre une façade par des jeunes qui scandent des slogans pro-Boutef. «Emchi lebladek !» (Rentre chez toi) «Rouh el Tizi Ouzou, ouelli leddouar» (retournez dans vos villages !) et autres railleries au ton franchement raciste pullulent dans la foulée.
Mais les supposés «baltaguia» finissent, comme samedi dernier, par changer de disque et aux «Echaâb yourid isqat ennidham» de la CNCD, ils rétorquent à présent : «Echaâb yourid zetla batal» (le peuple veut du cannabis gratos).
«Nous voulons juste qu’ils partent d’ici. On ne veut pas des arouch ici !», lâche l’un d’eux. En parlant des archs, Belaïd Abrika apparaît, encerclé par un dispositif de police féroce.
Il est brutalisé à la fois par les flics et par les durs du quartier. Un groupe de jeunes parmi les contre-manifestants nous entoure. Ils vident leur sac: «Quand les gens, ici, se sont soulevés en janvier, on nous traitait de ‘âraya’, de ‘voyous’, alors qu’ils dégagent d’ici. Ces gens-là gaâ feryinha, ils sont tous gâtés. Nous, on est de vrais zawalia et personne ne nous a payés !»
Mustapha Benfodil-elwatan-
Si certains d’entre eux nous ont assuré qu’ils étaient venus exclusivement de leur propre chef, d’autres, en revanche, se sont révélés bel et bien payés pour revêtir le costume peu glorieux de «baltaguia».
Déjà, des SMS circulaient la veille avec ce contenu : «Ya Sadi rouh el darek, Bouteflika machi Moubarak !» (Saïd Sadi rentre chez toi, Bouteflika n’est pas Moubarak). Des affiches ont été, en outre, placardées un peu partout, selon l’AFP, avec ce mot d’ordre : «Ne touche pas à mon quartier !»
Omar, 46 ans, est maçon de métier, mais est actuellement au chômage. Quand quelques figures de la CNCD investirent la place du 1er Mai, elles se sont vu violemment prises à partie par Omar et quelques autres habitants du quartier qui les ont traitées de tous les noms d’oiseau. «Rentrez chez vous ! Il n’est pas question que vous marchiez ici !» tonne Omar, avant d’enchaîner : «Ya Saïd Sadi rentre chez toi en France!» «Nous, on a fait notre révolte. Quand ils ont augmenté l’huile et le sucre, nous nous sommes insurgés et ils se sont calmés.»
Et de nous confier : «Moi je dis barakat ! Vous savez, mon frère a été décapité en 1995 par les terroristes et, à ce jour, on n’a pas retrouvé sa tête. Je n’ai pas envie de revivre ça ! L’Algérie est un immense chantier, il faut laisser Bouteflika travailler.» Omar n’a guère été soudoyé pour affronter les manifestants, insiste-t-il : «Jamais de la vie ! Je n’ai pas reçu un centime de personne !»
Il plonge la main dans sa veste et en extirpe une vieille photo de son défunt père : «Mon père est un chahid. Vous comprenez?» «Jamais je ne me permettrai de marchander avec l’honneur de ma patrie !», martèle-t-il.
Ce n’est pas le cas de ce groupe de trublions qui présentent, eux, un tout autre profil : nettement plus jeunes, ce sont des adolescents pour nombre d’entre eux.
Des confrères croient savoir qu’il s’agit en partie de dealers et autres gardiens de parking qui servent à l’occasion d’indics pour la police. Approchés, ils crient en face des manifestants : «Bouteflika machi Moubarak !», «Ya la police, khelliwna n’hawzouhoum» (Police, laissez-nous les chasser). Ils sont une vingtaine. L’un d’eux brandit un portrait de Boutefika. La police montre une passive complicité à leur égard, alors que la bastonnade a frappé de nombreux militants pro-CNCD. Curieusement, il fuse de ce groupuscule un étonnant : «Madirouche alih, âtawlou tchippa !»
(Ne le croyez pas, il a reçu de l’argent). Nous demandons plus de précisions : «Absolument ! Je les connais parfaitement, ouled houmti ! Ces gens travaillent à l’APC de Sidi M’hamed. Ils ont été payés 2000 DA pour faire ça !», assure un membre de ce groupe. Un de ses acolytes l’approuve : «Je vous le confirme : le maire a payé des jeunes du quartier.»
Alors que les manifs embrasent de plus belle la rue Mohamed Belouizdad, des marcheurs se voient plaqués contre une façade par des jeunes qui scandent des slogans pro-Boutef. «Emchi lebladek !» (Rentre chez toi) «Rouh el Tizi Ouzou, ouelli leddouar» (retournez dans vos villages !) et autres railleries au ton franchement raciste pullulent dans la foulée.
Mais les supposés «baltaguia» finissent, comme samedi dernier, par changer de disque et aux «Echaâb yourid isqat ennidham» de la CNCD, ils rétorquent à présent : «Echaâb yourid zetla batal» (le peuple veut du cannabis gratos).
«Nous voulons juste qu’ils partent d’ici. On ne veut pas des arouch ici !», lâche l’un d’eux. En parlant des archs, Belaïd Abrika apparaît, encerclé par un dispositif de police féroce.
Il est brutalisé à la fois par les flics et par les durs du quartier. Un groupe de jeunes parmi les contre-manifestants nous entoure. Ils vident leur sac: «Quand les gens, ici, se sont soulevés en janvier, on nous traitait de ‘âraya’, de ‘voyous’, alors qu’ils dégagent d’ici. Ces gens-là gaâ feryinha, ils sont tous gâtés. Nous, on est de vrais zawalia et personne ne nous a payés !»
Mustapha Benfodil-elwatan-
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