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La mondialisation : quels effets sur le Maroc ?

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  • La mondialisation : quels effets sur le Maroc ?

    Sous l'égide du Haut commissariat au Plan, une conférence fut organisée, le 12 avril dernier, au ministère des Affaires étrangères à Rabat. Malgré ce jour de fête, la salle Benhima était pleine.

    C'est qu'en effet, le conférencier et le thème choisi en valaient la peine. Le conférencier n'était autre que William Zartman, professeur à l'Ecole des études internationales avancées de l'Université John Hopkins de Washington, et le thème «Les enjeux mondiaux à l'horizon 2025». D'emblée, le Pr Zartman énonce que le rouleau compresseur de la mondialisation est en marche. La globalisation n'est pas imposée d'en haut, mais remonte du bas, et cela malgré les résistances issues du protectionnisme, de l'unilatéralisme, de l'isolationnisme ou de l'atavisme.

    Le mieux, conseille-t-il, est de prendre le meilleur, de s'adapter et de contribuer à cette culture mondiale.

    D'après le Pr Zartman, la mondialisation englobe plusieurs secteurs : économique, climatique, culturel et politique. Sur le plan économique, les maîtres mots sont les avantages comparatifs et la spécialisation. Il faut trouver sa place sur le marché mondial en offrant des produits et des services dans le meilleur rapport qualité/prix. Les exemples les plus communs sont l'aéronautique (Etats-Unis – Europe), l'automobile (Japon), l'offshoring (Inde), le textile (Chine).

    Chaque pays peut s'y tailler une place, à condition de faire des efforts nécessaires, et l'Occident n'a pas l'exclusivité. Le professeur cite parmi les problèmes économiques mondiaux, une nouvelle définition du partenariat capital/travail, et des rapports de production patronat/syndicats. Il met en exergue l'importance des hydrocarbures pétrole/gaz et le rôle primordial de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour réguler le marché mondial. La mondialisation est également climatique, puisque le réchauffement de la Terre concerne tous les pays. Le professeur déplore l'inefficacité de la communauté internationale dans ce domaine, et préconise l'invention d'un moyen institutionnalisé, quitte à utiliser la contrainte, pour faire respecter l'environnement.

    Il signale également le grave problème de l'eau, puisque nous consommons plus d'eau que nous en disposons. C'est ainsi que 25 pays sont menacés de pénurie d'eau, dont 15 appartiennent à la région MENA (Afrique du Nord/Moyen-Orient). Enfin, il insiste sur toute l'attention à apporter aux graves problèmes d'atteintes à l'environnement naturel de notre planète. La mondialisation n'est pas moins culturelle. On assiste en effet de plus en plus à une homogénéisation de la culture dans les domaines de l'enseignement, de l'alimentation, de l'habillement et des loisirs.

    Cette homogénéisation est surtout réclamée par les jeunes et concerne pratiquement tous les pays. Il faut reconnaître qu'elle vient surtout de l'Occident, et notamment des Etats-Unis d'Amérique. D'où l'émergence d'un problème d'identité que certains pays tentent de résoudre par des mesures protectionnistes. Le professeur atténue cette tendance, en signalant qu'elle peut être multiculturelle, et que chacun peut y contribuer (l'Afrique y collabore par exemple par la musique aux Etats-Unis).

    Sur le plan politique, la mondialisation se traduit par des avancées dans la démocratie, le respect des libertés individuelles et collectives, l'Etat de droit, l'égalité des sexes, la séparation des pouvoirs. L'exemple le plus frappant est celui de l'Europe centrale et de l'Est après la chute de l'ex-URSS. Certes, des pouvoirs autoritaires subsistent, et certains pays ont encore beaucoup d'efforts à faire, mais la tendance vers la démocratisation est inéluctable.

    Cependant, la situation politique du monde se concrétise aussi par l'éclosion de super-puissances qui dominent la planète. Le Pr Zartman identifie trois : les Etats-Unis, l'Europe, et la Chine, et envisage plusieurs scénarii. Le meilleur serait la conception institutionnalisée, qui mettrait au premier plan les institutions internationales, telles que l'Onu et l'OMC, au détriment de l'unilatéralisme.

    Le deuxième scénario serait l'alliance de deux super-puissances contre une, soit d'une façon flexible, soit d'une façon rigide, qui serait la plus dangereuse.
    D'autres problèmes ont été évoqués par le Pr Zartman, tels que le concept souveraineté/responsabilité et le droit d'ingérence de la communauté internationale, en cas de violation flagrante des droits de l'Homme. Une autre question récurrente est celle de la rivalité entre pays voisins, et le problème grave de la prolifération nucléaire.

    Tenant compte de ces éléments, comment le Maroc peut-il faire face à la mondialisation ? Comme l'a indiqué le Pr Zartman, le rouleau compresseur de la mondialisation est en marche, et notre pays a tout intérêt à s'ouvrir sur l'extérieur, et à éviter toute politique isolationniste.
    Il doit prendre le meilleur, s'adapter et contribuer à la culture mondiale.

    Sur le plan économique, il doit développer les secteurs où il dispose d'avantages comparatifs tels que le tourisme, l'agro-industrie, le textile et les autres branches industrielles identifiées par le plan Emergence. D'ailleurs, le Pr Zartman a cité pour le Maroc, l'out-sourcing et le complexe portuaire Tanger-Med, qui permet à notre pays de se positionner par rapport aux autres pays de la Méditerranée. Le Maroc doit continuer à libéraliser son économie en réduisant les tarifs douaniers et en améliorant la flexibilité du marché du travail. Il doit également réformer sa politique fiscale et de changes.

    Il doit redoubler d'efforts en matière de recherche pétrolière et de gaz, renforcer sa politique de l'eau, car le Maroc figure parmi les pays menacés de pénurie d'eau.

    Enfin, il doit donner toute son importance à la protection de l'environnement, vu les dégâts importants causés par la pollution de l'air et des eaux. Sur le plan culturel, le Maroc, tout en s'ouvrant largement sur les cultures étrangères, doit préserver son identité et ses spécificités, ce qui n'est pas antinomique. Des faiblesses sont à combler au niveau du théâtre, du cinéma, de l'audiovisuel. Il faut espérer que la libéralisation de l'audiovisuel va permettre d'augmenter la qualité et la diversité des programmes. L'audiovisuel est très important pour façonner l'identité nationale.

    Sur le plan politique, le Maroc doit continuer à faire avancer sa démocratisation. Certes, des avancées substantielles ont été réalisées durant la dernière décennie. D'autres efforts sont à faire, notamment au niveau d'une meilleure gouvernance du gouvernement et du Parlement, et d'un renforcement des libertés individuelles et collectives.

    Sur le plan extérieur, et en vue des enjeux mondiaux à l'horizon 2025, le Maroc devrait renforcer ses liens avec l'Europe et les Etats-Unis.
    Il devrait également, malgré les vicissitudes actuelles, militer pour l'édification de l'Union maghrébine, car l'avenir réservera de moins en moins de place aux petits Etats.

    *Président de l'IMRI Institut Marocain des Relations Internationales
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