Par*MIREILLE DUTEIL
Ils ne sont pourtant pas alliés, et sont même franchement ennemis. Pourtant, entre Muammar el-Kadhafi et les autorités saoudiennes, le combat est le même quand il s'agit de tenter de porter un coup d'arrêt au "printemps arabe". Le leader libyen a déclaré qu'il "purgera(it)" jeudi Benghazi des insurgés qui veulent le renverser. Il s'y emploie à coups de canon et de missiles qui risquent de faire de la capitale de l'insurrection libyenne une nouvelle ville martyre sur la liste déjà longue des cités abandonnées de tous.
C'est chez leur petit voisin et obligé, le Bahreïn, que les Saoudiens ont envoyé un millier d'hommes, soldats et policiers, pour aider le régime à mater la contestation de la majorité chiite. Cela faisait des semaines que Riyad en rêvait. Sans oser intervenir. En février, l'Arabie saoudite avait seulement envoyé des conseillers militaires à Manama. La semaine dernière, lors de la réunion du Conseil de coopération du Golfe (CCG, les pays de la péninsule arabique moins le Yémen), les Saoudiens ont forcé la main au roi Hamad al-Khalifa pour qu'il accepte l'envoi de troupes venues d'Arabie saoudite et des Émirats. Le 16 mars, à Bahreïn, les forces de l'ordre sont intervenues et ont chassé brutalement de la place de la Perle à Manama, capitale, les contestataires qui y campaient depuis un grand mois. En deux jours, six personnes étaient tuées ; les blessés se comptaient par centaines.
Répression brutale
Pour l'Arabie saoudite, c'est peut-être une victoire à la Pyrrhus. Sa crainte : que la contestation bahreïnie ne se propage dans la péninsule où, déjà, le Yémen et Oman connaissent des manifestations depuis plusieurs semaines. Certes, l'île de Bahreïn a une sociologie particulière : 70 % de la population, chiite, est gouvernée par une famille royale sunnite, les al-Khalifa. Elle règne sur l'archipel depuis la fin du XVIIIe siècle. Les chiites n'ont guère accès aux affaires du royaume, le Parlement est aux ordres et le Premier ministre, oncle du roi qui occupe ce poste depuis 1971, est le chef de file des conservateurs, proche de l'Arabie saoudite et partisan, ces dernières semaines, de la manière forte contre les contestataires. Son départ était la principale revendication des opposants. Au fil des semaines, une répression brutale aidant, les deux camps avaient haussé le ton. Certains parlaient même de "République".
Les Saoudiens ne voyaient pas d'un bon oeil que le prince héritier, Salman, ait été chargé par le roi d'ouvrir des pourparlers avec les opposants. On parlait de l'instauration d'une monarchie constitutionnelle. Difficilement acceptable pour Riyad.
L'Arabie saoudite s'affranchit des États-Unis
Car les Saoudiens ont aussi leurs contestataires qui commencent à réclamer l'accès aux emplois, plus de justice sociale et une vie politique moins opaque. Et une minorité chiite (10 % de la population) qui réside à l'est du pays, dans la zone pétrolière. Elle aussi se sent délaissée par la majorité sunnite saoudienne. La contestation des chiites de Bahreïn était donc jugée dangereuse à Riyad. L'Iran ne pourrait-il pas utiliser les chiites pour semer le poison de la contestation dans la péninsule arabique ?
En intervenant militairement au Bahreïn, siège de la sixième flotte américaine dans le Golfe, l'Arabie saoudite s'est officiellement posée comme le défenseur de la région en proie aux revendications sociales et politiques du "printemps arabe". C'est aussi une gifle infligée à son allié américain. Un envoyé spécial du Pentagone était à Manama la veille de la décision d'envoyer des troupes au Bahreïn. Il avait demandé au roi al-Khalifa d'ouvrir un dialogue avec ses opposants. Les Saoudiens ont voulu signifier à la Maison-Blanche qu'ils n'avaient pas apprécié la façon dont les États-Unis avaient laissé tomber leur allié égyptien, Hosni Moubarak.
Le Point
Ils ne sont pourtant pas alliés, et sont même franchement ennemis. Pourtant, entre Muammar el-Kadhafi et les autorités saoudiennes, le combat est le même quand il s'agit de tenter de porter un coup d'arrêt au "printemps arabe". Le leader libyen a déclaré qu'il "purgera(it)" jeudi Benghazi des insurgés qui veulent le renverser. Il s'y emploie à coups de canon et de missiles qui risquent de faire de la capitale de l'insurrection libyenne une nouvelle ville martyre sur la liste déjà longue des cités abandonnées de tous.
C'est chez leur petit voisin et obligé, le Bahreïn, que les Saoudiens ont envoyé un millier d'hommes, soldats et policiers, pour aider le régime à mater la contestation de la majorité chiite. Cela faisait des semaines que Riyad en rêvait. Sans oser intervenir. En février, l'Arabie saoudite avait seulement envoyé des conseillers militaires à Manama. La semaine dernière, lors de la réunion du Conseil de coopération du Golfe (CCG, les pays de la péninsule arabique moins le Yémen), les Saoudiens ont forcé la main au roi Hamad al-Khalifa pour qu'il accepte l'envoi de troupes venues d'Arabie saoudite et des Émirats. Le 16 mars, à Bahreïn, les forces de l'ordre sont intervenues et ont chassé brutalement de la place de la Perle à Manama, capitale, les contestataires qui y campaient depuis un grand mois. En deux jours, six personnes étaient tuées ; les blessés se comptaient par centaines.
Répression brutale
Pour l'Arabie saoudite, c'est peut-être une victoire à la Pyrrhus. Sa crainte : que la contestation bahreïnie ne se propage dans la péninsule où, déjà, le Yémen et Oman connaissent des manifestations depuis plusieurs semaines. Certes, l'île de Bahreïn a une sociologie particulière : 70 % de la population, chiite, est gouvernée par une famille royale sunnite, les al-Khalifa. Elle règne sur l'archipel depuis la fin du XVIIIe siècle. Les chiites n'ont guère accès aux affaires du royaume, le Parlement est aux ordres et le Premier ministre, oncle du roi qui occupe ce poste depuis 1971, est le chef de file des conservateurs, proche de l'Arabie saoudite et partisan, ces dernières semaines, de la manière forte contre les contestataires. Son départ était la principale revendication des opposants. Au fil des semaines, une répression brutale aidant, les deux camps avaient haussé le ton. Certains parlaient même de "République".
Les Saoudiens ne voyaient pas d'un bon oeil que le prince héritier, Salman, ait été chargé par le roi d'ouvrir des pourparlers avec les opposants. On parlait de l'instauration d'une monarchie constitutionnelle. Difficilement acceptable pour Riyad.
L'Arabie saoudite s'affranchit des États-Unis
Car les Saoudiens ont aussi leurs contestataires qui commencent à réclamer l'accès aux emplois, plus de justice sociale et une vie politique moins opaque. Et une minorité chiite (10 % de la population) qui réside à l'est du pays, dans la zone pétrolière. Elle aussi se sent délaissée par la majorité sunnite saoudienne. La contestation des chiites de Bahreïn était donc jugée dangereuse à Riyad. L'Iran ne pourrait-il pas utiliser les chiites pour semer le poison de la contestation dans la péninsule arabique ?
En intervenant militairement au Bahreïn, siège de la sixième flotte américaine dans le Golfe, l'Arabie saoudite s'est officiellement posée comme le défenseur de la région en proie aux revendications sociales et politiques du "printemps arabe". C'est aussi une gifle infligée à son allié américain. Un envoyé spécial du Pentagone était à Manama la veille de la décision d'envoyer des troupes au Bahreïn. Il avait demandé au roi al-Khalifa d'ouvrir un dialogue avec ses opposants. Les Saoudiens ont voulu signifier à la Maison-Blanche qu'ils n'avaient pas apprécié la façon dont les États-Unis avaient laissé tomber leur allié égyptien, Hosni Moubarak.
Le Point
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