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Batal
par El-Guellil
Il arrête, ouvre la portière arrière. Le client grimpe dans la voiture. Bien installé, le client, pour rendre la politesse à ce chauffeur exceptionnel, essaye de lui jeter quelques fleurs. «Ya khouya, c'est rare de voir un taxi propre comme le vôtre. En plus, ça sent bon. Sûrement que le désodorisant vient de là-bas…». «Merci», répond le chauffeur. Sans plus. «On ne dirait pas que la voiture date des années soixante-dix! On n'entend pas le moteur... Et puis cette tenue de route... Vous êtes sûrement mécanicien ?». «Non, je suis chauffeur de taxi ! Je prends par le centre-ville ou vous préférez le périphérique ?» C'était une manière de lui dire qu'il l'agaçait. Réponse. Requestion. Réponse. Silence.
«Un plaisir, brass bouya », poursuit le client. «Machi loto, on dirait un berceau... C'est pas comme ces tombeaux à ciel ouvert. C'est un plaisir... Le tableau de bord a sûrement été refait, yak ? J'étais certain !». Le chauffeur commence à montrer des signes d'agacement. «Les sièges aussi ne sont pas d'origine... Les housses sont très belles, tgoul namoussia... Voilà, c'est ce que j'appelle le service public».
Le chauffeur commence à regarder de travers ce «mechtari» trop élogieux. Il ne cache pas son irritation, il en a marre de cette grosse gueule qu'il fouette du regard à travers le rétroviseur. «Dès que vous vous êtes arrêté à mon niveau, j'étais certain, au vu de la couleur de la voiture, que le chauffeur était un homme de goût».
Le conducteur en a par-dessus la tête. Trop, c'est trop ! Il serre à droite. S'arrête. Ouvre la portière arrière et prie le client de descendre. «Désolé, je ne travaille plus... Je ne me sens pas bien. Je rentre chez moi...». Sans mot dire, le client joue au chien chassé. Il descend.
Ça marche à tous les coups. C'est comme ça qu'il se fait transporter gratis... Il ne lui restait au fait plus qu'une centaine de mètres à marcher pour arriver à sa bicoque, où il ne vendait que des trucs contre le mauvais oeil.
Le Quotidien d'Oran
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