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Mémoire Conflictuelle Algéro -française

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  • Mémoire Conflictuelle Algéro -française

    Quarante-quatre ans après l’indépendance, la guerre entre l’Algérie et la France prend de nouveaux raccourcis.


    Mémoire, visas et Maroc. Tels sont les principaux reproches d’Alger à l’encontre de Paris, selon la journaliste et écrivain française Florence Beaugé, auteur du livre Algérie, une guerre sans gloire. Invitée à donner un avis sur la polémique qui agite les deux rives de la Méditerranée, polémique d’autant plus exacerbée par la présence du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, et les propos hostiles des ultras français.
    Elle a refusé d’émettre quelque avis que ce fut, arguant que ce serait malvenu en France qu’elle se pose en analyste alors qu’elle est journaliste, mais précisant qu’elle pourrait formuler des critiques sur le fond de son livre, qu’elle présentera après-demain à Alger. Dans un récent article sur la question publié dans Le Monde, elle affirme: «Plus grave, car plus emblématique: l’affaire Louisette Ighilahriz-général Schmitt. Condamné en octobre 2003 par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir traité d’affabulatrice cette rescapée de la torture et des viols pendant la Bataille d’Alger, l’ancien chef d’état-major de l’armée française s’est vu finalement relaxé, en novembre 2005.
    La cour d’appel de Paris lui a reconnu l’excuse de la bonne foi. Cette décision de justice a semé la consternation en Algérie. Personne n’ignore là-bas que le général Schmitt a été basé, l’été 1957, à l’école Sarouy à Alger, l’un des pires centres d’interrogatoire de l’époque. Les Algériens ont vu dans cette relaxe un geste politique. Puisqu’une ancienne combattante de la guerre d’indépendance pouvait se faire traiter de menteuse à la télévision française (France 3), à une heure de grande écoute, par l’un des acteurs de la guerre d’Algérie, c’était le signe que la France restait incapable de regarder son passé en face». En recevant son homologue français, le chef de la diplomatie algérienne, Mohammed Bedjaoui, disait, il y aquelques jours: «Nous n’apprécions pas le passé commun de la même façon de part et d’autre de la Méditerranée. (...) Parce qu’ils ont souffert pendant cent trente années de la colonisation, les Algériens considèrent, quant à eux, le devoir de mémoire comme un élément central.» Claude Liauzu écrivait à juste titre dans Libération que «la guerre d’Algérie n’est pas finie.» Et ajoutait: «Drôle d’armée que celle dont le seul général, sanctionné sans avoir été rétabli dans ses droits, est le seul qui ait refusé de couvrir les crimes de la Bataille d’Alger, le général de Bollardière; drôle d’armée que celle dont les supplétifs continuent à enfanter encore, à la troisième génération, des «harkis». Drôle de loi que celle qui condamne Aussaresses non pour ce qu’il a fait torturé, étranglé, mais pour l’avoir dit».
    Dans tous ses travaux sur la guerre d’Algérie, brillants et précis, Suzanne Citron s’appesantit sur «le mythe national» et sur l’histoire de France en question pour mieux comprendre les trous de mémoire des Français. L’occultation de pans entiers de l’histoire de la colonisation, dit-elle, pose le problème des rapports que les Français entretiennent avec «le passé construit sur un imaginaire historique falsifié».
    Natif de Constantine, l’historien Benjamin Stora résume le problème: «Dans La gangrène et l’oubli», rédigé en 1990-1991, trente ans après l’indépendance de l’Algérie, j’avais tenté de montrer comment cette guerre ne se finissait pas, dans les têtes et dans les coeurs. Parce que, de part et d’autre de la Méditerranée, elle n’avait pas été suffisamment nommée, montrée, assumée dans et par une mémoire collective. La mise en mémoire qui devait permettre l’apaisement par une évaluation rationnelle de la guerre d’Algérie avait été «empêchée» par les acteurs belligérants. Le lecteur pouvait découvrir comment s’étaient mis en place les mécanismes de fabrication de l’oubli de ce conflit inavouable; comment les «événements» qui s’étaient produits entre 1954 et 1962 avaient structuré en profondeur la culture politique française contemporaine; comment une frénésie de la commémoration de la guerre, en Algérie, avait fondé une légitimité militaire étatique, appuyée sur un parti unique. En France, un oubli de la guerre, et en Algérie, un oubli de l’histoire réelle pour construire une culture de guerre.
    Elle risque de nuire au travail des historiens. Derrière cette polémique, on voit bien qu’il y a des enjeux idéologiques, peut-être certains ne veulent-ils pas de ce traité d’amitié, en préparation entre l’Algérie et la France. On est sur un terrain qui n’est plus historique mais idéologique.
    Hassan Remaoun, lui, définissait la crise de la sorte: «Le passé colonial continue à peser lourdement sur la mémoire des vivants. En Algérie d’abord où le jeune Etat national a tendance encore à y puiser l’essentiel de sa légitimité en tentant en premier lieu d’orienter le regard porté sur le Mouvement national et l’épopée de la Guerre de libération, de qui transparaît souvent (il ne s’agit pas de généraliser ici), à travers la floraison de mémoires et d’ouvrages publiés ces dernières années notamment [], et l’activité très médiatisée des associations, fondations et autres organisations et institutions.En France aussi où une tradition universitaire et d’historiographie critique plus établie n’arrive pas toujours encore à préserver des tentatives d’occultation, voire de révisionnisme et d’injonction aux historiens de se soumettre à ce qui ressemblerait à des «vérités officielles» concernant ce même passé colonial».
    Y a-t-il une thérapie à ce ma-laise? Stora en offre une: «L’essentiel est d’analyser les faits pour dépasser le stade des lamentations. La connaissance de l’Histoire permet d’engager une thérapie collective afin que de telles horreurs ne se reproduisent pas. Les jeunes ont du mal à imaginer que la patrie des droits de l’homme a pu pratiquer la torture. Les manuels scolaires, qui n’intègrent pas l’histoire coloniale à l’Histoire de France, ne les aident guère. Or, la France a gardé de son histoire coloniale des empreintes, notamment la présence de populations qui sont devenues françaises et dont l’intégration suppose une approche différente de son histoire».




    l'expression 23/047/2006
    Contrairement a la douleur, le bonheur ne s'écrit, pas il se vit... Moi je ne sais qu'écrire
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