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Entre le politiquement désastreux et le socialement inconcevable

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  • Entre le politiquement désastreux et le socialement inconcevable

    Lorsqu’elle est perçue correctement, la démocratie légitime les ambitions des hommes et des femmes qui en respectent, non seulement les mécanismes mais aussi - et surtout - les principes.

    Mais il en est certains, malheureusement, qui, à cause de leur conception fortement réductrice et tout aussi péjorative de la démocratie, n’en perçoivent que l’aspect «vente» et tournent ainsi le dos à ce qu’il y a de plus essentiel.

    Comme beaucoup d’autres sphères d’activités des hommes, la politique n’échappe pas à la prise du marketing et c’est tant mieux aussi bien pour la politique que pour le marketing. Mais lorsque certains politiciens, parce qu’ils donnent un peu trop d’importance au marketing, n’ont plus le temps de s’embarrasser de l’éthique, de la «correction» et des valeurs les plus partagées, il y a lieu de craindre que les moyens ne soient assimilés à la fin et que les hallucinations ne servent d’objectifs. Dans pareil cas, non seulement la clochardisation de l’acte politique devient inévitable et la décadence des comportements flagrante, mais l’injustifiable s’insère tapageusement entre le «politiquement désastreux» et le «socialement inconcevable». Et c’est exactement ce qui se passe, depuis quelque temps déjà, sur la scène politique française et qui l’a particulièrement marquée les derniers temps.

    Les évènements de la banlieue n’étaient autre qu’un cri de détresse lancé par une partie des Français qui n’en pouvaient plus de l’exclusion, de la ségrégation et d’une France à deux vitesses. Un cri dont la violence en disait long sur la grandeur du désarroi et dont la persistance renseignait clairement sur la profondeur d’un sédiment dont les couches sont faites de haine, de mépris et d’intolérance. Cette partie de la France, composée surtout de jeunes délaissés, avait lancé un cri qui attirait l’attention des politiques sur un aspect longtemps oublié: l’évolution sociale. Semblable à plusieurs égards au cri de mai 68, le soulèvement de la banlieue aurait dû servir, au moins, à ce que les hommes politiques français se rendent compte que, confinés dans les calculs de partis et le nez collé aux calendriers électoraux, ils n’avaient pas vu grandir une génération entière et que, pire encore, ils n’ont jamais eu le temps de l’accompagner dans l’évolution de ses aspirations somme toute légitimes.

    Au lieu de chercher à décoder le message, Sarkozy, du haut de son arrogance coutumière, n’a rien trouvé de mieux que de traiter les «banlieusards» de «voyous» et de «racaille». Ce faisant, il a confirmé la surdité d’une petite partie de la France aux appels d’une grande majorité et son insensibilité à ses préoccupations. Les promesses de Chirac de tirer les conclusions et de tenir compte des aspirations de ses électeurs au lendemain du fameux «Non» à la Constitution européenne étaient ainsi balayées d’un revers de main par un Sarkozy qui, l’esprit focalisé sur une compétition dont l’échéance était encore lointaine et l’oeil braqué sur les sondages, ne cherchait pas moins que d’affaiblir le Président de la République.

    Mais, lorsqu’on parle d’élections présidentielles, dans un pays comme la France, et exception faite d’un Général De Gaulle venu dans des conditions particulières, on ne parle pas individus avant de parler sensibilité. Le soulèvement de la banlieue n’avait, pour ainsi dire, pas éprouvé Chirac autant qu’il avait déstabilisé la Droite et la réaction de Sarkozy discréditait moins le Président de la République que le parti au pouvoir.

    Les manifestations anti-CPE étaient aussi perçues par le ministre de l’Intérieur français comme une opportunité pour «grignoter» quelques points aux sondages. Sacrifiant, cette fois, son chef du Gouvernement et - encore une fois - sa famille politique, il joua à tirer profit, à son compte personnel s’entend, des faiblesses d’une Droite touchée, fatiguée, chancelante et qui, il ne faudrait pas l’oublier, ne s’était pas sérieusement remise du fiasco du référendum sur la Constitution européenne et encore moins des événements de la banlieue.

    Sans doute conseillé par des experts en marketing, et agissant selon les prescriptions du Marketing Stratégique, Sarkozy a donc commencé par vouloir «s’assurer» un positionnement au niveau de «son» électorat, celui de la Droite. Après avoir certainement jugé que le positionnement interne était accompli, il devait donc - toujours selon les stratèges du marketing - s’attaquer au positionnement externe.

    Pour ce faire, il adopte une stratégie combinée: «attaque frontale» à l’égard de la Gauche et «latérale» à l’égard de l’extrême droite. En lui-même, le choix de cette combinaison est fort judicieux et laisse deviner un long travail de réflexion et de préparation.

    En effet, si l’on suppose qu’un travail interne est effectué (et continuera sans doute de l’être) au niveau de la Droite afin d’affaiblir les autres candidats potentiels, les concurrents valables aux présidentielles de 2007 ne peuvent être qu’au niveau du PS et du FN. Or, de par leur nature et leurs réactions, ces deux formations politiques ne doivent point faire l’objet d’une stratégie similaire. Pour les premiers, les socialistes, une attaque frontale, lorsqu’elle est bien menée, pourrait servir à jeter éventuellement la discorde dans leurs rangs et à multiplier le nombre de candidats, sachant la tendance «naturelle» de cette formation à se caractériser non pas par une candidature unique mais par plusieurs postulants.

    Pour le FN, par contre, connu pour avoir toujours présenté un seul (toujours le même) candidat, une attaque frontale serait vaine et inutile. Et c’est au niveau des électeurs de cette formation qu’il faut «travailler». L’option «attaque latérale» est celle qui convient donc le mieux contre le parti de Le Pen.

    Cependant, si l’élaboration de la stratégie en soi est hautement experte, la mise en oeuvre «sarkozienne» s’inscrit bien en deçà du génie de ses conseillers.

    Parce que, même dans les moments forts d’une attaque frontale, il faut garder les pieds sur terre et savoir choisir ses mots, Sarkozy a raté sa «sortie» contre Ségolène Royal. Certes, les sondages qui la donnent (jusqu’à aujourd’hui) gagnante contre lui, semblent l’irriter mais en stratégie, on n’agit pas sous le coup des impulsions. Mme Royal n’est pas encore candidate unique du PS et les prétentions de Jospin, de Fabius et d’autres candidats potentiels qui pourraient, à l’occasion, s’avérer plus redoutables que Royal, ne sont pas encore exprimées.

    Dans son attaque latérale du FN, Sarkozy a cru bon faire d’adopter le raisonnement raciste et xénophobe si cher à Le Pen, comme si les électeurs du FN ne pouvaient être récupérés autrement que par l’agitation de l’étendard de la haine et de l’exclusion. Comme si les valeurs de la démocratie changeaient au gré des saisons électorales. Comme si les principes des hommes servaient uniquement à être affichés pour épater et séduire.

    La loi sur «l’immigration choisie», ajoutée aux récentes déclarations inattendues à propos des immigrés dans lesquelles il leur demande tout simplement de quitter la France, affaiblira sans doute Sarkozy.

    Certes, «ce n’est pas parce que Villiers ou Le Pen disent qu’il fait beau que nous allons nous empêcher de le dire !» (dixit un proche de Sarkozy), mais d’abord faudrait-il s’assurer qu’on parle du même beau et des mêmes critères de beauté, car les critères selon lesquels le crapaud sélectionne sa grenouille ne sont certainement pas ceux retenus par le chacal !

    Parce qu’on ne méprise pas les hommes d’où qu’ils soient et d’où qu’ils viennent, Sarkozy a prêché par excès de marketing. Il a mal hiérarchisé ses actions et il a tout aussi mal choisi sa tactique et ses mots, donnant ainsi l’occasion à ses concurrents de la Droite de remonter la pente... sur son dos. De Villepin, qui a certes été touché par le retrait du CPE, n’a pas encore coulé, comme l’a si bien souligné un observateur de la politique française.

    Autre mare, autres éclaboussures. Villiers égal à lui-même dans ses positions inqualifiables et ses déclarations indécentes, s’en va chercher un positionnement sur la scène politique française.

    Il semble partir sans conseillers ou, au plus avec des conseillers datant du néolithique, l’ère où l’on polissait la pierre, exactement ce que fait Villiers qui compte récupérer des lecteurs du FN au javelot ! Faisant de «l’islamophobie» dégradante son unique repas, il calque bassement un Le Pen qui le raille et, par la voix de sa fille, le traite de «commerçant» et de «ridicule». En mal de voix, Villiers ne risque pas de s’embarrasser de principes ou autres valeurs. Il faut d’abord les avoir !

    Pas loin de Villiers, justement, l’ancien tortionnaire qui n’a pas manqué de marquer de sa conception maladive une extrême droite française qu’il monopolise depuis toujours.

    Gonflé par des résultats «accidentels» aux précédentes élections présidentielles, il risque malheureusement de faire mieux cette fois. En effet, champion du mépris des autres et de la xénophobie, Le Pen, qui fut aussi autrefois champion du poignard lorsqu’il s’agissait d’assassiner des Algériens, ne sera jamais battu sur son terrain ni par Sarkozy ni par Villiers et la confusion que pourront susciter ces derniers sera, fort probablement, avantageuse au Front National.

    A un an des élections, en faisant fi de toute éthique pour une cause qui aurait pu être autrement plus noble, Sarkozy et Villiers auront au moins servi à poser une question de fond: en démocratie, jusqu’où peut aller l’aspiration des individus ?

    Par Aissa Hirèche (Quotidien d'Oran)

  • #2
    Mais pourquoi autant discréditer un gouvernement pour lequel le Francais ont démocratiquement élu? Dénoncez la "catastrophe sociale en France" est vite dit; comparez avec le Maghreb ou l'Amérique latine. Il y des problèmes à resoudre en France mais la dépeindre de façon aussi négative n'est pas juste.

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