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Qui se souvient de Jacques Panijel ?

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  • Qui se souvient de Jacques Panijel ?

    En septembre dernier, disparaissait, à l’âge de 89 ans, Jacques Panijel, romancier, dramaturge et cinéaste maudit. Jacques Panijel était biologiste de profession et chercheur au CNRS. Mais ce n’est pas ce que l’histoire retiendra de lui.

    Ancien résistant d’origine roumaine, Jacques Panijel a publié en 1948, au Seuil, un roman intitulé la Rage, consacré à son rôle pendant l’occupation nazie de la France. Contrairement à beaucoup d’anciens résistants français, qui ont cautionné ou même conduit la répression et les massacres à Sétif et à Guelma, le 8 mai 1945, Jacques Panijel est resté fidèle à lui-même, acharné à défendre les droits des émigrés jusqu’en 1996 avec son intervention dans l’affaire des réfugiés de l’Église St Bernard à Paris aux côtés de l’actrice Emmanuelle Béart et du professeur Léon Schwartzenberg.

    Le nom de Jacques Panijel restera à jamais lié à l’histoire de la résistance algérienne en France.

    Il fut, en effet, cofondateur avec Pierre Vidal-Naquet et Laurent Schwartz du comité Maurice Audin et signataire, en 1960, du fameux appel des 121 pour l’insoumission. Il a abordé le cinéma en cosignant, avec Jean-Paul Sassy, un film de fiction, la Peau et les Os. Interprété par Gérard Blain et tourné en prison, le film avait obtenu le prix Jean-Vigo.

    L’année d’après, il apprend par ses collègues du Comité Audin que “quelque chose se préparait à Paris”. Il traverse Paris et découvre les centaines d’Algériens parqués sur les trottoirs. Il demande alors au comité Maurice Audin de l’aider à trouver le financement pour tourner un film sur cette journée inoubliable. Il contacte un certain nombre de cinéastes français, pour leur confier le projet, dont François Truffaut qui déclinera.

    Et c’est ainsi qu’il va réaliser Octobre à Paris, qui restera le plus bel hommage à la manifestation de l’automne 1961 des Algériens de France.

    D’octobre 1961 à avril 1962, il filme clandestinement et en utilisant toutes les archives qu’il avait pu rassembler, les témoins de la gigantesque manifestation des Algériennes et des Algériens qui ont bravé le couvre-feu imposé par Maurice Papon et ses protecteurs plus haut placés. Le film montre ce qui, cinquante ans plus tard dans Hors-la-Loi, a réveillé les mémoires des nostalgiques de la colonisation : des Algériens matraqués, torturés avant d’être jetés les mains ligotées dans la Seine. Le film fut immédiatement interdit et banni sans ménagement par les autorités françaises, tout comme le Petit soldat, de Godard, les Sentiers de la Gloire, de Kubrick, ou la Bataille d’Alger, de Pontecorvo.

    Ce n’est qu’en 1973 et après une grève de la faim d’un autre cinéaste militant de la cause algérienne, René Vautier, que le film réussit à obtenir un visa de censure, sans pour autant trouver de distributeur. En 1981, la télévision française avait bien promis de le diffuser, mais cette promesse est restée lettre morte.

    J’avais montré ce film à “Télécinéclub”, au début des années 1970, et j’avais invité des anciens de la Fédération de France à commémorer le 17 octobre 1961. Le film a été pendant des années systématiquement projeté à chaque anniversaire des manifestations d’Octobre à Paris. Et puis, vint l’oubli, que dis-je, l’amnésie.

    La mort de Jacques Panijel à l’automne dernier n’a suscité chez nous que très peu de réactions.

    Pourtant, cet homme, qui a tant consacré de son énergie à soutenir les Algériens en guerre et les Algériens émigrés, nous a laissé un film qui compte parmi les plus importants de notre mémoire visuelle. Benjamin Stora a écrit un jour que les Algériens avaient une vision “fantasmée” de leur histoire.

    Avec Octobre à Paris, Jacques Panijel nous a offert un film de 70 minutes qui contredit totalement cette affirmation.

    Ce qui s’est passé à Paris ce 21 octobre et qu’on revoit sous forme de fiction dans Hors-la-Loi, de Bouchareb, n’est pas un fantasme : c’est le triste spectacle d’une culture coloniale qui ne veut pas se regarder dans le miroir de l’histoire. Pour tout cela, je voudrais saluer la mémoire de Jacques Panijel, et rendre hommage à une autre figure de la lutte anticoloniale à travers le cinéma, j’ai nommé René Vautier.

    Merci à Jacques, merci à René, ainsi qu’à tous les intellectuels français qui nous ont soutenus, pour ce qu’ils nous ont apporté de lumière et de courage.

    Par Ahmed Bedjaoui, Liberté






  • #2
    quelques souvenirs de 1961-62

    malgré la censure sur les media, il était parfaitement possible d'être informé de la terrible répression d'Octobre 61, grâce à quelques journalistes et syndicalistes courageux.
    Octobre à Paris a ainsi été projeté clandestinement (j'ai assisté à une telle projection un Dimanche matin rue du Faubourg Montmartre à Paris ; on projetait aussi "J'ai huit ans" film poignant sur la guerre vue à partir de dessins d'enfants)
    Je ne me souviens plus de la date précise, mais suis absolument sur que c'était bien avant le cessez-le-feu de Mars 62.
    (j'étais lycéen, et les rythmes scolaires donnent de bons points de repères pour les dates).
    Cela veut dire que Jacques Panijel a tourné son film avec une vitesse impressionnante.
    (Il semble y avoir une petite erreur de chronologie dans l'article.)

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    • #3
      La première fois dont j'entends parler de cet homme.

      Oui, merci à tous ces intellectuels français et autres étrangers qui nous ont aidé à recouvrer notre dignité.

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      • #4
        Sincèrement, je ne connaissais pas ce Monsieur. Merci pour ton post morjane.
        La mort de Jacques Panijel à l’automne dernier n’a suscité chez nous que très peu de réactions.
        Nous ne sommes pas à une aberration près, l'ami.

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