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Actos : pourquoi l'Afssaps ne l'a toujours pas interdit

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  • Actos : pourquoi l'Afssaps ne l'a toujours pas interdit

    Le médicament du laboratoire japonais Takeda, autorisé en Europe depuis 2000 et réservé aux diabétiques en surcharge pondérale est révélateur de la mauvaise santé de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Comme Le Figaro le révélait le jeudi 28 avril, le sort de la pioglitazone (Actos et Competact) cristallise les tensions au sein de l'agence.

    Retour sur le parcours de ces médicaments qui sont en réalité les derniers survivants d'une classe pharmaco-thérapeutique (les glitazones), l'Avandia ayant été retirée du marché en septembre 2010.

    Le 29 mars dernier, la commission de pharmacovigilance (qui recense tous les effets secondaires liés aux médicaments) de l'Afssaps donne son avis à propos de l'Actos et du Competact. Elle estime qu'étant donné le risque de cancer de la vessie attribuable à ce produit, en plus des autres effets indésirables connus (prise de poids, insuffisance cardiaque, œdèmes, fractures…), il faut immédiatement suspendre sa commercialisation. Seulement, le 7 avril, la commission d'autorisation de mise sur le marché, dite d'AMM, (qui décide de la commercialisation et de la suspension d'une molécule) fait un autre choix : elle souhaite attendre la décision de l'Agence européenne du médicament qui interviendra d'ici à l'été.

    La commission d'AMM met également en avant une étude en cours à la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam) dont l'Afssaps attend le résultat d'ici à quelques semaines. La Cnam a eu pour mission d'étudier le lien entre la prise de pioglitazone et l'apparition de cancers de la vessie dans la population française. La commission d'AMM a donc choisi de botter en touche en attendant les résultats de la Cnam.

    «À quoi sert la pharmacovigilance ?, interroge, désabusé, un expert pharmacologue de l'Afssaps qui rappelle qu'il y a encore une quinzaine d'années, quand la commission de pharmacovigilance décidait de suspendre la commercialisation d'un médicament, le patron de l'Afssaps descendait de son bureau pour venir, sur le champ, signer la suspension du produit.» Autre évolution : aujourd'hui, la commission de pharmacovigilance dépend de la commission d'AMM (c'est d'ailleurs elle qui a le dernier mot) alors qu'il y a quelques années, elle était indépendante. Argument de ceux qui ont voulu maintenir l'Actos et le Competact : comme il s'agit d'une AMM européenne et non nationale (contrairement au Mediator), si la France décide de suspendre le produit, l'Agence européenne peut, quelques semaines plus tard, le remettre sur le marché. Voilà pour la théorie.

    Dans la pratique, les choses sont un peu plus subtiles. «Si un pays suspend un médicament en raison d'effets secondaires graves, comme c'est le cas avec la pioglitazone, il doit envoyer un courrier à tous les autres pays de l'Union, explique un expert. Ces derniers ont alors quelques jours pour répondre. Et l'on peut dire aujourd'hui que quand un État décide de suspendre un médicament, l'avenir de celui-ci est quand même très mal parti.» Autrement dit, en cas d'urgence, et même dans le cas d'une AMM européenne, pas besoin d'attendre une décision de l'Agence européenne. «Dire qu'il faut attendre les résultats de la Cnam est du pain béni pour les laboratoires pharmaceutiques qui adorent les études épidémiologiques, relève un expert. Évidemment, ça leur permet de gagner du temps et de maintenir leurs produits sur le marché !»

    L'autre problème qui apparaît avec cette nouvelle affaire, c'est la présence des mêmes experts à la commission d'AMM française et à la commission d'AMM européenne. C'est le cas d'Éric Abadie, conseiller scientifique auprès du directeur général de l'Afssaps et qui préside, depuis 2007, le comité des produits pharmaceutiques à usage humain à l'Agence européenne du médicament. Cet expert a donc plusieurs casquettes qui constituent un véritable conflit d'intérêt. Lors de la réunion du 7 avril, quand les experts s'interrogent sur le fait de suspendre ou non la pioglitazone, cet ancien directeur des affaires médicales au Snip (l'ancêtre du Leem, le syndicat des industries pharmaceutiques) prend la parole. «Est-ce qu'il y a un fait nouveau qui justifie ce phénomène d'urgence alors que c'est un problème (la survenue de cancers de la vessie, NDLR) dont on a connaissance depuis l'autorisation de mise sur le marché, depuis près de 10 ans», demande cet endocrinologue.

    Juste avant, la commission venait de rappeler que 15 cas de cancers de la vessie dont certains récents, étaient attribuables à la pioglitazone en France. «À titre personnel, je ne m'associe pas à cette procédure en urgence», ajoute-t-il. Autrement dit, il préconise d'attendre et de laisser Actos et Competact sur le marché. Ce que l'Afssaps a fait. Ce sera l'Agence européenne qui tranchera. Et plus précisément le comité présidé par Éric Abadie.

    Par le Figaro
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