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Laissez Mouloud Mammeri dans son sommeil du juste

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  • Laissez Mouloud Mammeri dans son sommeil du juste

    Lors d’une visite rendue au chercheur islamologue Tahar Benaïcha par un ensemble de jeunes écrivains, ce dernier a fait une déclaration, dont les propos ont été rapportés par le journal arabophone El-Khabar du 22-5- 2011, qualifiant Mouloud Mammeri d’écrivain berbériste plus qu’algérien et nationaliste.

    Dans cette parenthèse, je rappelle à M.Tahar Benaïcha et aux lecteurs, ces quelques vérités historiques qui placent Mouloud Mammeri sur l’échiquier des grands écrivains algériens nationalistes et universels.

    1- J’ai été le dernier écrivain algérien qui a eu la chance et le privilège de rencontrer Mouloud Mammeri et discuter avec lui “sur le culturel et le linguistique en Algérie”. Cela s’est passé dans un colloque sur “La culture de l’oralité” organisé par l’université d’Oujda au Maroc (22-24 février 1989). C’était sa dernière sortie scientifique avant sa disparition tragique sur la RN1, entre Aïn Defla et Alger. J’ai participé à ses côtés aux travaux et aux débats de ce colloque, j’ai traduit sa communication et son entretien donné à la radio d’Oujda. Dans nos diverses discussions, à la marge des travaux du colloque, Mammeri était fier de son algérianité, nobélisé par sa participation à la Révolution du 1er Novembre. Il était fier de trouver en ma génération d’écrivains ce bilinguisme qui est notre fenêtre ouverte vers l’Occident et l’Orient. Et il était triste de la situation bafouée que vivaient la langue et la culture amazighes en Algérie.
    2-Mouloud Mammeri était un intellectuel rassembleur. Et dans le but de rassembler pour mieux défendre les particularités et les différences qui font la grande Algérie plurielle, il fut le premier président de l’Union des écrivains algériens. Il a réussi à faire de cette Union créée le 28 octobre 1963 le foyer libre de tous les écrivains algériens sans exclusion. Il y avait des écrivains arabophones à l’image du poète Moufdi Zakariya, Djounaïdi Khalifa, Ahmed Tawfik el Madani, Mohamed el Mili, Mohamed Laïd Al-Khalifa, et d’autres au côté de leurs frères francophones : Jean Sénac, Kaddour M’hamsadji, Ahmed Sefta, Mourad Bourboune, Mohamed Dib, Malek Haddad et d’autres. En présidant une telle Union des écrivains, Mouloud Mammeri a fait preuve d’un intellectuel rassembleur loin de tous préjugés linguistiques, idéologiques ou religieux.
    3-Lors d’un entretien enregistré pour une de mes émissions télévisée Akwas (Parenthèses) en 1994, le philosophe et écrivain marocain Mohamed Aziz Lahbabi, m’a fait le témoignage suivant : L’idée de la création d’une Union des écrivains maghrébins fut un des souhaits culturels de Mouloud Mammeri. Seule la Culture plurielle défendue par des écrivains courageux et intègres, disait Mammeri, est capable de mettre la construction solide du Grand Maghreb sur de bons rails du bon train. Un Maghreb fort par son intelligence, par sa diversité linguistique et par son histoire commune et glorieuse.
    SVP laissez le maître de “La Colline oubliée” dormir en paix dans son “Sommeil du juste”.

    Par : Amine Zaoui
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    Berbériste n'est pas aux antipodes de l'Algériennité quant aux nationalisme primaire des individus tel que Tahar Benaïcha c'est à se rouler par terre ! L jour où un ignare pourra remettre en cause l'algériennité de Dda L'Mulud ce jour là les poules auront des dents en or massif !

    Mais bon je laisse la parole à Dda l'Mulud lui-même !

    "Quand je regarde en arrière"



    Quand je regarde en arrière, je n'ai nul regret, je n'aurai pas voulu vivre autrement ...De toutes façons, un fantasme n'est jamais que cela. Je ne me dis pas :J'aurais voulu être un citoyen d'Athènes au temps de Périclès, ni un citoyen de Grenade sous les Abencérages, ni un bourgeois de la Vienne des valses. Je suis né dans un canton écarté de haute montagne, d'une vieille race qui, depuis des millénaires n'a pas cessé d'être là, avec les uns, avec les autres...qui, sous le soleil ou la neige, à travers les sables garamantes ou les vieilles cités du Tell, a déroulé sa saga, ses épreuves et ses fastes, qui a contribué dans l'histoire, de diverses façons, à rendre plus humaine la vie des hommes.



    Les tenants d'un chauvinisme souffreteux peuvent aller déplorant la trop grande ouverture de l'éventail : Hannibal a conçu sa stratégie en punique ; c'est en latin qu'Augustin a dit la cité de Dieu, en arabe qu'Ibn Khaldoun a exposé les lois des révolutions des hommes. Personnellement, il me plait de constater dès le début de l'histoire cette ample faculté d'accueil. Car il se peut que les ghettos sécurisent, mais qu'ils stérilisent c'est sûr.



    C'est par là que je voudrais finir. Ceux qui, pour quitter la scène, attendent toujours d'avoir récité la dernière réplique à mon avis se trompent : il n'y a jamais de dernière réplique - ou alors chaque réplique est la dernière - on peut arrêter la noria à peu près à n'importe quel godet, le bal à n'importe quelle figure de la danse. Le nombre de jours qu'il me reste à vivre, Dieu seul le sait. Mais quelque soit le point de la course où le terme m'atteindra, je partirai avec la certitude chevillée que quelque soient les obstacles que l'histoire lui apportera, c'est dans le sens de sa libération que mon peuple - et avec lui les autres - ira. L'ignorance, les préjugés, l'inculture peuvent un instant entraver ce libre mouvement, mais il est sûr que le jour inévitablement viendra où l'on distinguera la vérité de ses faux semblants.



    Tout le reste est littérature.
    Mouloud Mammeri
    “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf

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    • #3
      merci imprevisible

      trop beau le texte de mammeri
      "En ces temps d'imposture universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire" (G. Orwell)

      Commentaire


      • #4
        Azul Kaiser

        Effectivement la plume de Da Lmumuld ne plonge pas dans l’encrier de la bassesse ! Voilà un autre texte de Da Lmulud plus de circonstance que le première il répondait à ses détracteurs lors du fameux printemps 1980 ! El Moudjahid n'a pas eu le courage de publier la réponse faite par Da Lmulud, Liberté l'a fait en 2002 :

        À propos des "donneurs de leçons" (texte publié par le quotidien Liberté du 19/04/2002)


        Mouloud Mammeri devait animer le 10 mars 1980 une conférence à l'Université de Tizi-Ouzou, dont le thème était "La poésie berbère". Son annulation par les autorités de l'époque avait servi de détonateur aux événements du Printemps berbère. Le lendemain, El Moudjahid, porte-parole du pouvoir, commet un pamphlet ordurier contre l'auteur de La mort absurde des Aztèques, sous l'intitulé qui restera célèbre : « Les donneurs de leçons ».

        Un extrait de cet article dont l'auteur s'en prend à l'immense Mammeri : "Des étudiants du centre universitaire de Tizi-Ouzou ont exprimé leur mécontentement, il y a quelques jours, à la suite d'une conférence annulée d'un homme qui, pour prétendre être le chantre de la culture berbère, n'a rien fait de tel comme contribution à son pays que de rédiger un travail de « création intellectuelle aztèque » avant d'accorder une interview à un quotidien parisien où il confond inquisition chrétienne, monarchie marocaine et révolution algérienne."

        Mouloud Mammeri adressera quelques jours après une réponse à El Moudjahid qui ne la publiera jamais. Ce texte que nous livrons en exclusivité est un chef-d'œuvre d'écriture qui traduit, tout à la fois, la hauteur de vue et la tolérance intellectuelle de son auteur.

        Voici le texte intégral d'une lettre adressée à El Moudjahid par l'écrivain Mouloud Mammeri en réponse à un article de ce quotidien le mettant en cause - sans d'ailleurs le nommer - après l'interdiction de la conférence sur la culture berbère qu'il devait donner à Tizi Ouzou le 10 mars dernier.

        Nous reproduisons également l'article en question qui témoigne du degré de bassesse et de médiocrité atteint par les plumitifs aux ordres du pouvoir algérien.

        " Dans la page culturelle du n°4579 de votre journal, en date du 20 mars 1980, vous avez fait paraître un article me mettant directement en cause, sous le titre « Les donneurs de leçons ». Le texte contenant un certain nombre de contrevérités, je vous prierai de faire paraître ce rectificatif dans la même page de votre prochain numéro. Sur les allégations me concernant personnellement, je fais l'hypothèse charitable que votre bonne foi a été surprise et que ce qui ailleurs s'appellerait mensonge et diffamation (et serait à ce titre passible des tribunaux), n'a été chez vous qu'erreur d'information. Il va de soi que je n'ai jamais écrit dans L'Echo d'Alger l'article mentionné dans votre texte.

        Il va sans dire que je n'ai jamais eu à refuser de signer le mystérieux manifeste de 1956 que vous évoquez en termes sibyllins. Je serais heureux néanmoins que cet incident soit pour vous l'occasion de prendre une dernière leçon sur la façon même dont vous concevez votre métier.

        Le journalisme est un métier noble mais difficile. La première fonction et à vrai dire le premier devoir d'un journal d'information comme le vôtre est naturellement d'informer. Objectivement, s'il se peut, en tout cas en soute conscience. Votre premier devoir était donc, quand vous avez appris ces évènements (et non pas dix jours plus tard) d'envoyer un de vos collaborateurs se renseigner sur place sur ce qui s'est passé exactement afin de le relater ensuite dans vos colonnes.

        Vous avez ainsi oublié de rapporter à vos lecteurs l'objet du mécontentement des étudiants. Cela les aurait pourtant beaucoup intéressés. Cela leur aurait permis en même temps de se faire une opinion personnelle. Ils n'ont eu hélas droit qu'à la vôtre. Vous auriez pu pourtant leur apprendre qu'il est des Algériens pour penser qu'on ne peut pas parler de la poésie Kabyte ancienne à des universitaires algériens.

        Nous sommes cependant quelques-uns à penser que la poésie kabyle est tout simplement une poésie algérienne, dont les Kabyles n'ont pas la propriété exclusive, qu'elle appartient au contraire à tous les Algériens, tout somme la poésie d'autres poètes algériens anciens comme Ben Msaïeb, Ben Triki, Ben Sahla , Lakhdar Ben Khlouf, fait partie de notre commun patrimoine.

        En second lieu, un journaliste digne (et il en est beaucoup, je vous assure) considère que l'honnêteté intellectuelle, cela existe, et que c'est un des beaux attributs de la fonction -même et surtout quand on écrit dans un organe national- là, moins qu'ailleurs, on ne peut se permettre de batifoler avec la vérité. Je parle de la vérité des faits, car pour celle des idées, il faut une dose solide d'outrecuidance pour prétendre qu'on la détient. Mais visiblement pareil scrupule ne vous étouffe pas. Avec une superbe assurance et dans une confusion extrême, vous légiférez, mieux, vous donnez des leçons.

        Vous dites la volonté, que vous même appelez unanime, du peuple algérien, comme si ce peuple vous avait, par délégation expresse, communiqué ses pensées profondes et chargé de les exprimer. Entreprise risquée ou prétention candide ? Quelques affirmations aussi péremptoires dans la forme qu'approximative dans le fond, peuvent être l'expression de vos idées (si l'on peut dire) personnelles. Pourquoi en accabler le peuple ? Il n'est naturellement pas possible de traiter en quelques lignes la masse des problèmes auxquels vous avez, vous, la chance d'avoir déjà trouvé les solutions.

        Je vais donc tenter de ramener à quelque cohérence la confusion des points que vous évoquez. Vous me faites le chantre de la culture berbère et c'est vrai. Cette culture est la mienne, elle est aussi la vôtre. Elle est une des composantes de la culture algérienne, elle contribue à l'enrichir à la diversifier, et, à ce titre, je tiens (comme vous devriez le faire avec moi) non seulement à la maintenir mais à la développer. Mais, si du moins j'ai bien compris votre propos, vous considérez, comme incompatibles le fait de vouloir le développement de cette culture avec ce qu'en vrac et au hasard de votre plume vous appelez : les valeurs arabo-islamiques, l'indépendance culturelle, etc. « Vous dites la volonté (...) du peuple algérien, comme si ce peuple vous avait ( ... ) communiqué ses pensées profondes et chargé de les exprimer ». Vous êtes naturellement libre d'avoir une pareille opinion. Ce n'est pas la mienne. Je considère personnellement qu'au fond de culture berbère, qui nous est commun à tous, l'Islam et les valeurs islamiques sont venus nous apporter un élément essentiel à la définition de notre identité. Je considère que l'Islam des premiers siècles a été un instrument de libération et d'émancipation de l'homme maghrébin. Je pense que par la suite il a été le ciment idéologique de la résistance nationale aux menées espagnoles et portugaises sur nos côtes.

        Naturellement, entre les différents visages qu'il peut prendre dans la réalité, j'opte quant à moi pour le plus humain, celui qui est le plus progressiste, le plus libérateur et non pour le visage différent qu'il a pu présenter aux heures sombres de notre histoire. La contradiction visiblement ne vous gêne pas. « La nation algérienne, écrivez-vous, a trouvé son unité dans sa diversité. » Voilà un sain principe, mais comment le conciliez-vous avec l'article que vous venez de commettre ? Cette diversité que vous êtes fier d'affirmer dans les mots, cela ne vous gêne pas de la refuser aussitôt dans les faits ?

        "Si je comprends bien, vous voulez vous donner en même temps le beau rôle d'un libéralisme de principe avec les avantages de la tyrannie idéologique, en un mot être en même temps progressiste dans les termes et totalitaire dans les faits ? Ne vous y trompez pas : ce genre d'agissements n'a pas la vie longue. On peut tromper tout le monde quelque temps, on peut tromper tout le temps quelques hommes, on ne peut pas tromper tout le monde tout le temps. C'est un autre que moi qui J'a dit au dix-neuvième siècle et l'adage depuis a toujours été vérifié.

        Le véritable problème est donc premièrement dans la conception étrange que vous avez de votre métier. Que vous soyez totalitaire c'est votre droit, mais vous concevrez aisément que d'autres Algériens préfèrent à la pratique des slogans contradictoires, celle de l'analyse honnête. Le véritable problème est deuxièmement dans la vision que vous voulez imposer de la culture algérienne, évoluant entre l'oukase et la déclaration de bonne intention toujours démentie dans les faits.

        L'unité algérienne est une donnée de fait. Elle se définit, comme incidemment vous l'avez écrit, dans la diversité, et non point dans l'unicité. À cette unité dans la diversité correspond une culture vivante. La culture algérienne est, dites-vous, « sortie de ses ghettos, de ses inhibitions et de ses interdits ». Votre article est la preuve éclatante qu'hélas, elle y est enfoncée jusqu'au cou. Mais soyez tranquille : elle en a vu d'autres, la culture algérienne, et une fois de plus, elle s'en sortira. Elle s'en sortira car « toute tentative d'imposer quelque chose à notre peuple est vaine et relève de l'irresponsabilité ». C'est votre propre propos. Dommage que vous n'y croyez pas
        ! (Réponse de Mouloud Mammeri à El Moudjahid)



        Source: " Ecole, population et société en Algérie ", Kamel Kateb, L'Harmattan, 2005

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        Dernière modification par l'imprevisible, 02 juin 2011, 14h05.
        “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf

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