«C’est le pouvoir qui est le principal problème du pays»
Mokdad Sifi dit non à Bensalah
L’ancien chef du gouvernement Mokdad Sifi décline officiellement l’invitation que lui a adressée la commission Bensalah, à prendre part aux «consultations politiques». Une position que Sifi explique longuement dans une lettre adressée, hier mercredi, à Abdelkader Bensalah. Mais qui, en réalité, dresse un bilan sans concession du régime Bouteflika.
«Au plan personnel, ma considération pour vous est sincère», écrit Sifi à Bensalah lui rappelant ses «positions patriotiques durant la décennie 90 qui nous avait réunis, en 1994 et 1995, dans la même équipe gouvernement-CNT, soudés par la cause nationale, au moment où l’Algérie, en cessation de paiement et dont le tiers des communes échappaient à l’autorité de l’Etat, subissait de plein fouet le terrorisme intégriste, l’isolement international et la lâcheté de beaucoup de personnalités politiques qui avaient préféré se terrer et se taire au moment où des Algériennes et des Algériens tombaient tous les jours, assassinés par les terroristes et au moment où le pays, menaçant de sombrer, avait le plus besoin d’eux… ». Même s’il utilise le pluriel, Sifi fait allusion, ici, en parlant de «la lâcheté de personnalités politiques» à un seul homme : Abdelaziz Bouteflika. «Aujourd’hui, nous n’avons plus les mêmes positions politiques », fera remarquer Sifi à Bensalah. Avant de lui rappeler son discours de Aïn Defla, du temps où il était chef du gouvernement, durant la pire période qu’a connue l’histoire de l’Algérie indépendante. Il y déclarait, notamment, que «c’est parce que les gouvernants ont failli que le sous-développement économique, la misère sociale et le sentiment de hogra ont favorisé l’émergence de la violence et de l’extrémisme (…) C’est une leçon terrible que nul Algérien, à quelque niveau que ce soit, ne doit oublier». Il demande à Bensalah de s’y inspirer en ce qu’il «est susceptible de vous projeter en 1995, au moment où nous avions les mêmes positions politiques». Mais pas que cela... «Je compte sur vous pour bien transmettre ce message à qui de droit.» C'est-à-dire à Bouteflika. L’ancien chef du gouvernement de Liamine Zeroual, tout comme Ghozali d’ailleurs et dont il était le chef de cabinet, rejette et le fond et la forme de la démarche du pouvoir, les consultations politiques en cours, en l’occurrence. «Je ne vous ferai pas l’injure, à vous et aux membres de votre commission, de croire que quiconque puisse penser que les solutions aux problèmes politiques, économiques et sociaux du pays se résument à un simple réaménagement du texte de la Constitution ou des textes de lois». Il constatera à juste titre que « depuis 12 ans», la Constitution et toutes les lois soumises à amendement depuis le 15 avril dernier sont violées à répétition, que «les partis et les personnalités opposées au régime dont certains sont invités aujourd’hui à votre débat ont été empêchés de faire entendre leur voix». Pour Sifi, il ne sert absolument à rien de changer de lois qu’on n’a jamais respectées. «Le problème du pays n’est donc pas d’ordre juridique, mais d’essence politique.» Pour Mokdad Sifi, les choses sont d’une simplicité criante : «C’est le pouvoir qui est le véritable problème du pays.» Car à quoi bon changer de Constitution et maintenir celui qui la viole, amender la loi électorale et reconduire ceux qui fraudent… Il ne manquera pas, ensuite, de constater que «la crise profonde que vit actuellement le pays coïncide avec un environnement régional explosif qui voit les régimes arabes sclérosés et corrompus, tomber l’un après l’autre». Ce à quoi, le régime Bouteflika répond «en réduisant la solution de cette crise majeure à de simples réformes juridiques». Pour l’ancien chef du gouvernement, nul doute que, comme en Tunisie, en Egypte, au Yémen, en Syrie, le peuple algérien aussi «veut un changement radical du système». Ce qu’il dit souhaiter se produire sans dégâts. «A mon humble avis, il importe au plus tôt d’instaurer une période de transition, conduite par un gouvernement de transition représentatif adossé à un conseil de transition». Certes, admet-il, «cela sera très difficile (à réaliser) mais le prix à payer sera mille fois moindre que celui que la Nation devra payer à la rue si le pouvoir continue à se murer dans son arrogance», mettra-t-il en garde.
K. A. - Le Soir d'Algérie
Mokdad Sifi dit non à Bensalah
L’ancien chef du gouvernement Mokdad Sifi décline officiellement l’invitation que lui a adressée la commission Bensalah, à prendre part aux «consultations politiques». Une position que Sifi explique longuement dans une lettre adressée, hier mercredi, à Abdelkader Bensalah. Mais qui, en réalité, dresse un bilan sans concession du régime Bouteflika.
«Au plan personnel, ma considération pour vous est sincère», écrit Sifi à Bensalah lui rappelant ses «positions patriotiques durant la décennie 90 qui nous avait réunis, en 1994 et 1995, dans la même équipe gouvernement-CNT, soudés par la cause nationale, au moment où l’Algérie, en cessation de paiement et dont le tiers des communes échappaient à l’autorité de l’Etat, subissait de plein fouet le terrorisme intégriste, l’isolement international et la lâcheté de beaucoup de personnalités politiques qui avaient préféré se terrer et se taire au moment où des Algériennes et des Algériens tombaient tous les jours, assassinés par les terroristes et au moment où le pays, menaçant de sombrer, avait le plus besoin d’eux… ». Même s’il utilise le pluriel, Sifi fait allusion, ici, en parlant de «la lâcheté de personnalités politiques» à un seul homme : Abdelaziz Bouteflika. «Aujourd’hui, nous n’avons plus les mêmes positions politiques », fera remarquer Sifi à Bensalah. Avant de lui rappeler son discours de Aïn Defla, du temps où il était chef du gouvernement, durant la pire période qu’a connue l’histoire de l’Algérie indépendante. Il y déclarait, notamment, que «c’est parce que les gouvernants ont failli que le sous-développement économique, la misère sociale et le sentiment de hogra ont favorisé l’émergence de la violence et de l’extrémisme (…) C’est une leçon terrible que nul Algérien, à quelque niveau que ce soit, ne doit oublier». Il demande à Bensalah de s’y inspirer en ce qu’il «est susceptible de vous projeter en 1995, au moment où nous avions les mêmes positions politiques». Mais pas que cela... «Je compte sur vous pour bien transmettre ce message à qui de droit.» C'est-à-dire à Bouteflika. L’ancien chef du gouvernement de Liamine Zeroual, tout comme Ghozali d’ailleurs et dont il était le chef de cabinet, rejette et le fond et la forme de la démarche du pouvoir, les consultations politiques en cours, en l’occurrence. «Je ne vous ferai pas l’injure, à vous et aux membres de votre commission, de croire que quiconque puisse penser que les solutions aux problèmes politiques, économiques et sociaux du pays se résument à un simple réaménagement du texte de la Constitution ou des textes de lois». Il constatera à juste titre que « depuis 12 ans», la Constitution et toutes les lois soumises à amendement depuis le 15 avril dernier sont violées à répétition, que «les partis et les personnalités opposées au régime dont certains sont invités aujourd’hui à votre débat ont été empêchés de faire entendre leur voix». Pour Sifi, il ne sert absolument à rien de changer de lois qu’on n’a jamais respectées. «Le problème du pays n’est donc pas d’ordre juridique, mais d’essence politique.» Pour Mokdad Sifi, les choses sont d’une simplicité criante : «C’est le pouvoir qui est le véritable problème du pays.» Car à quoi bon changer de Constitution et maintenir celui qui la viole, amender la loi électorale et reconduire ceux qui fraudent… Il ne manquera pas, ensuite, de constater que «la crise profonde que vit actuellement le pays coïncide avec un environnement régional explosif qui voit les régimes arabes sclérosés et corrompus, tomber l’un après l’autre». Ce à quoi, le régime Bouteflika répond «en réduisant la solution de cette crise majeure à de simples réformes juridiques». Pour l’ancien chef du gouvernement, nul doute que, comme en Tunisie, en Egypte, au Yémen, en Syrie, le peuple algérien aussi «veut un changement radical du système». Ce qu’il dit souhaiter se produire sans dégâts. «A mon humble avis, il importe au plus tôt d’instaurer une période de transition, conduite par un gouvernement de transition représentatif adossé à un conseil de transition». Certes, admet-il, «cela sera très difficile (à réaliser) mais le prix à payer sera mille fois moindre que celui que la Nation devra payer à la rue si le pouvoir continue à se murer dans son arrogance», mettra-t-il en garde.
K. A. - Le Soir d'Algérie
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