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Travailler moins pour vivre mieux (et vieux)

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  • Travailler moins pour vivre mieux (et vieux)

    Avec France Inter, la chronique de Bernard Maris, journaliste et écrivain. Le débat autour de la réforme des retraites offre l'occasion de revenir sur le temps choisi, vieille notion de la gauche des années 1970 aujourd'hui oubliée.

    Temps subi, temps choisi, temps du travail, temps de la liberté, voila le grand dilemme, sans doute éternel des hommes. En 1980, Jacques Delors était l’un des animateurs d’une revue Echange et Projets, avec Jean-Baptiste de Foucault, ancien commissaire au plan, et cette revue publiait « La Révolution du temps choisi ». C’était il y a trente ans. Un ministère du temps libre fut créé. Et trente ans plus tard, c’est travailler plus pour gagner plus et travailler plus longtemps qu’on nous propose, dans une société du bougisme, « du mouvement pour plus de mouvement », selon l’expression du philosophe Peter Sloterdijk, ou le « travail productif arrache l’individu à lui-même », disait Emmanuel Mounier, une société où l’on perd sa vie à la gagner, avait résumé avec un certain humour Karl Marx. Une société où tu pédales plus vite, sinon tu te casses la gueule. Est-il possible d’aller vers le temps choisi, vers une sobriété heureuse, une abondance frugale et vers le plein emploi dans une société où la nature est protégée ?


    Est-il possible de poser cette question, quand nous sommes en guerre économique, en guerre économique avec la Chine, et plus près de nous avec l’Allemagne ? Vous êtes un doux rêveur, Maris, un pacifiste sous la pluie des obus, bêlant « Mes frères, mes frères, aimez-vous les uns les autres ». Vous êtes ridicule. Et pourtant ! La guerre économique nous apporte un chômage durable, qui ronge le lien social ; une nature dévastée – regardez ce qui se passe en Louisiane, et pire, une frustration et un ressentiment qui sauront s’exprimer, tôt ou tard, dans la haine du voisin.
    Comme le dit joliment Jean-Baptiste de Foucault, dans son livre « L’abondance frugale », nous avons passé un pacte faustien avec le marché. Nous avons dit au marché : sors nous de condition misérable ! Et le marché a répondu : ne t’occupe de rien, laisse faire, surtout ne contrôles rien, surtout pas ton intérêt, ta consommation, tes envies, tes désirs et ton appétit d’argent, et je m’occupe du reste.

    Le reste, c’est qu’au lieu de sortir de la rareté et du besoin, nous nous sommes enfoncés dans le besoin et la rareté. La société devient plus inégalitaire, injuste, frustrante. L’un d’entre nous, Monsieur Z***, part avec une retraite de plus de deux millions d’euros par an, et les autres grignotent quelques trimestres de cotisation pour arriver à peine à un demi salaire. Les parents partent heureux à la retraite, et laissent aux enfants un monde qu’ils ont saccagé et dans lequel ils devront travailler longtemps – si la Chine nous laisse du travail. Non seulement le marché détruit le pacte social, mais aussi le pacte entre générations.

    Quel est le choix, alors ? Frugalité forcée ou frugalité choisie. Si tu ne choisis pas la frugalité, dame Nature que tu as violée, détruite et saccagée, te l’imposera, elle ne te donnera plus de pétrole, dit Jean-Baptiste de Foucauld. Mais en échange de cette frugalité choisie, tu pourras peut-être atteindre une autre abondance...

    Une abondance spirituelle, intellectuelle, savante, poétique, amoureuse... Celle là est infinie, tu ne pourras jamais l’épuiser.

    marianne2
    Rebbi yerrahmek ya djamel.
    "Tu es, donc je suis"
    Satish Kumar; "Tout est lié, c'est le don qui est le lien naturel entre tout".
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