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« Comment la Cia sous-traitait la torture » - Interview de Craig Murray

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  • « Comment la Cia sous-traitait la torture » - Interview de Craig Murray

    par Patricia Lombroso, il manifesto,
    Original : www.ilmanifesto.it . Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

    « L’Angleterre et l’Italie, les alliés « fidèles » de Bush, sont des gouvernements européens et membres de l’Union européenne au courant, sans aucun doute, des pratiques de torture appliquées dans les prisons secrètes de la Cia, qui fait partie du programme de « extraordinary renditions » (“restitutions extraordinaires” ou “transferts spéciaux” = enlèvement de citoyens étrangers suspectés de terrorisme et leur transfert dans des pays tiers). Les gouvernements européens, officiellement, ont promis de fournir leurs données et informations à l’enquête sur les prisons secrètes lancée par le Conseil de l’Europe. En fait, ils sont en train de faire tout ce qu’ils peuvent pour bloquer et entraver l’enquête qui révélerait leur complicité dans les crimes de guerre commis par l’administration Bush ».
    C’est avec ce « j’accuse » que commence l’interview au manifesto de Craig Murray, ambassadeur britannique en Ouzbékistan de 2002 à 2004, contraint par le Foreign Office à donner sa démission pour avoir publié sur son site des informations et mémos prouvant les liens sales entre les USA et la Grande-Bretagne concernant le programme de « extraordinary renditions » (“restitutions extraordinaires” ou “transferts spéciaux”).

    Quelles preuves avez-vous recueilli, pendant votre mandat en Ouzbékistan, sur les opérations de la CIA ?

    J’ai déjà remis à Strasbourg la totalité de la documentation et les enregistrements des transferts, en « business jet » de la Cia, de détenus provenant sûrement d’Afghanistan et d’autres régions en Europe. Parmi les documents, l’enregistrement des sigles qui prouve le passage aérien par et pour divers aéroports civils et militaires. Des documents secrets et en possession de l’Euro control (l’agence qui contrôle l’espace aérien).

    Et quelles preuves avez-vous recueilli de la complicité entre la Cia et le gouvernement ouzbek en ce qui concerne la disparition et les tortures infligées à des détenus en provenance de voies aériennes européennes et d’Afghanistan ?

    Les témoignages de familles entières, qui se sont adressées à moi pour assister leurs parents « disparus » et séquestrés par les services secrets ouzbeks. J’ai mené une enquête et je peux dire que, au total, plus de 7000 personnes, opposants du régime ouzbek, ont été séquestrées et torturées jusqu’à l’impensable par ordre du gouvernement. Dans certains cas les prisonniers sont morts et on a restitué aux familles les corps torturés. Cette action de répression interne féroce a « couvert » l’action de la Cia. Depuis août 2002 déjà, les Américains transféraient en Ouzbékistan les présumés terroristes capturés en Afghanistan.

    Comment êtes-vous arrivé à entrer en possession de données et enregistrements qui prouvaient les parcours des avions Cia depuis l’Europe vers Tachkent ?

    J’ai parlé directement avec le personnel affecté aux avions qui atterrissaient à Tachkent, et on m’a dit clairement que ces avions cargos ou « affaires » transportaient des détenus. J’ai enregistré les sigles des avions Cia. Les parcours effectués m’indiquaient l’origine et les différentes escales effectuées dans d’autres localités d’Europe jusqu’à l’atterrissage final à Tachkent.

    La Cia devait-elle demander l’autorisation au gouvernement ouzbek pour atterrir sur l’aéroport civil ou bien les avions avaient-ils une autorisation tacite pour atterrir sur les bases militaires US ?

    Les chargements de prisonniers atterrissaient sur l’aéroport international de Tachkent, pas à la base militaire Us, proche de l’aéroport. Les détenus provenant d’escales européennes étaient remis aux agents des services secrets ouzbeks qui les transportaient ensuite dans leur quartier général pour être soumis aux interrogatoires et torturés.

    Les agents de la Cia étaient-ils présents ?

    Jamais. Le travail sale, la Cia le faisait exécuter par les services secrets ouzbeks.

    Quand vous avez, vous, dénoncé ces crimes à votre gouvernement, quelle a été sa réponse ?

    On m’a répondu en date du 8 mars 2003 qu’il était « parfaitement légal » d’obtenir des informations de renseignements (intelligence) à travers les chambres de torture de l’Ouzbékistan.

    Pensez-vous qu’aujourd’hui encore, l’Ouzbékistan soit compromis dans le programme de “renditions” ?

    Je crois que l’Ouzbékistan ne joue plus le rôle de chambre de torture de la Cia, parce qu’il s’est rapproché de la Russie. Mais je ne doute pas que la Cia continue ailleurs son action, avec la connivence de nombreux gouvernements, et certainement des gouvernements européens « alliés » dans la lutte contre le terrorisme.

    Parmi les gouvernements européens qui sont au courant des crimes vous citez l’Italie. Pourquoi ?

    Je suis certain que le gouvernement Berlusconi était au courant. Abou Omar a été enlevé par des agents de la Cia à Milan pour être transféré en Égypte. En tant que diplomate je sais comment fonctionnent ces liaisons dangereuses (en français dans le texte, NDT) entre gouvernements. Je sais comment adviennent les connexions et les échanges d’informations. J’admire beaucoup vos magistrats pour avoir lancé le mandat d’arrêt contre 22 agents de la Cia mais je suis sûr qu’Omar n’aurait pas pu être enlevé sans que les services italiens ne soient au courant.
    Contrairement a la douleur, le bonheur ne s'écrit, pas il se vit... Moi je ne sais qu'écrire
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