Photos et documents à l'appui, le journal en ligne français Mediapart met à jour les relations entre des personnalités proches du président français et Ziad Takeddine, un personnage mis en dans le volet financier de l’affaire Karachi.
Marion Moussadek | 11.07.2011 | 15:45
Ziad Takieddine. Un prénom et un nom loin d’être inconnus pour un négociateur censé pourtant être dans l’ombre. Six syllabes aux consonances arabo-musulmanes, pour désigner un homme d’affaires franco-libanais de 61 ans, un nom publié à plusieurs reprises dans les médias français, pour avoir probablement été le principal intermédiaire dans la filière de rétro-commissions des contrats d’armements occultes où l’Etat français, clan balladurien en tête, aurait été trempé jusqu’au cou dans les années 90.
Et voilà que le média en ligne Mediapart avance encore ce nom pour révéler de nouveaux secrets de polichinelles. « Les documents Takieddine : le financier secret qui met en danger le clan Sarkozy ». C’est sous ce titre qu’est parue hier l’enquête – appuyée par des photos et des documents bancaires- du quotidien en ligne, rompu aux investigations de longue haleine. Et aux scoops.
Des photos inédites
Les images d’abord. Qu’y voit-on ?
- L’homme d’affaires libanais Ziad Takieddine et Brice Hortefeux, ancien ministre de l’Intérieur (2009-2011), ex ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Co-développemen (2007-2009)t. Le cadre : le bord de mer.
- Les mêmes hommes, accompagnés de leurs épouses respectives, auxquelles s’ajoute le couple de Jean-François Copé, actuel secrétaire général du parti au pouvoir, l’UMP, ancien porte-parole du gouvernement sous les gouvernements Raffarin et de Villepin (présidence Chirac). Le cadre : un port. Derrière eux, un yacht.
- Ce même Jean-François Copé nageant dans la piscine d’une vaste villa présentée par Mediapart comme étant celle de Ziad Takieddine.
- De nouveau Jean-François Copé, en compagnie de l’homme d’affaires d’origine libanaise Ziad Takieddine, au Liban. Le cadre : des vestiges historiques.
- Ziad Takieddine en compagnie, cette fois, de Thierry Gaubert, ancien conseiller de Sarkozy et actuel secrétaire général du parti majoritaire (l’UMP) et de Thierry Desseigne, actuel patron du Fouquet’s où Nicolas Sarkozy avait célébré sa victoire à la présidence de la République en mai 2007, et par ailleurs héritier des casinos Barrière.
Des preuves exclusives
Côté documents joints, voici ce que Mediapart présente :
- Un document de la Banque de la Méditerranée, qui écrit à Takieddine depuis Beyrouth en 1997, pour lui faire part que l’établissement crédite 75 millions de dollars américains sur son « compte secret ».
- Un tableau analytique des dépenses de l’homme d’affaires franco-libanais et sa colonne intitulée « paiements secrets » qui totalise près de 12 millions d’euros. « Credit Suisse » peut-on voir dans l’une des cases du tableau en question.
Des photos, des documents, certes. Mais pour prouver quoi ?
Ces documents bancaires et photographiques font partie d’un « premier volet d’articles que [Mediapart] va consacrer à Ziad Takieddine. En attendant, cette série de « photos inédites » démontre « des liens jusqu’ici insoupçonnés entre Takieddine et le premier cercle du chef de l’Etat ». Résultat : le média français affirme être en mesure d’avancer que l’homme d’affaires franco-libanais « est devenu à partir de 2002 un conseiller occulte et financier de l’ombre au cœur du sarkozysme ».
Toujours selon le média hexagonal, Monsieur Takieddine a reçu 91 millions d’euros (aujourd’hui 107 millions de francs suisses, encore bien davantage à l’époque), entre 1997 et 1998. Le motif de ce coquet versement ? La vente de frégates à l’Arabie saoudite. Le rapport avec l’Etat français ? Ce contrat juteux a été avalisé par le ministre du Budget de l’époque. Qui, en 1994, n’était autre que… Nicolas Sarkozy.
Enquête pour blanchiment en cours
Par ailleurs, on sait qu’une enquête préliminaire pour « manquements aux obligations déclaratives » et « suspicion de blanchiment » est en cours à l’encontre de Takieddine, 61 ans, depuis mars dernier. L’homme d’affaires s’était alors fait pincer à l’aéroport du Bourget avec pas moins de 1, 5 million d’euros en espèces (quelque 1, 8 million de francs) dans sa valise. Or, le Franco-Libanais revenait de… Libye. Ce qui n’augure évidemment rien de bon sur l’origine de ces fonds.
Pas plus tard que jeudi dernier, la Division nationale des investigations financières, partie aux trousses des hommes ayant trempé dans le volet financier de l’affaire Karachi – en 1992, le gouvernement français veut convaincre le Pakistan d’acheter des sous-marins français plutôt qu’allemands, en arrosant les responsables locaux – a perquisitionné le domicile de Thierry Gaubert (actuel secrétaire du parti majoritaire). Takieddine aurait été la cheville ouvrière de ces rétro-commissions qui auraient servi à financer la campagne présidentielle d’Edouard Balladur, finalement battu en 1995 par Jacques Chirac.
Jacques Chirac porte le coup de grâce à ces financements
En arrivant à l’Elysée justement, Chirac veut mettre de l’ordre dans cette gabegie (l’argent frais qui serait ainsi arrivé aux mains de son adversaire Balladur a failli lui coûter sa place de chef de l’Etat). Il arrête net le projet le plus important de la protection des frontières de l’Arabie saoudite, le « Saudi Border Guards Development Program ». Un marché estimé à… 7 milliards d’euros (quelque 8 milliards de francs aujourd’hui, bien davantage encore à l’époque).
Contacté par les journalistes de Mediapart avant la parution de cette enquête qui risque d’éclabousser le pouvoir en place, Ziad Takeddine a refusé de répondre aux questions, tout en leur lâchant (délibérément ?) une éventuelle autre piste : « Allez donc voir ce que Villepin a touché ! ».
Des conséquences déjà
La parution de cet article de Mediapart a immédiatement suscité des réactions. Dès lundi matin, l’avocat des familles de victimes de l’attentat de Karachi a demandé l’audition de Jean-François Copé et Brice Hortefeux.
tdg.ch
Marion Moussadek | 11.07.2011 | 15:45
Ziad Takieddine. Un prénom et un nom loin d’être inconnus pour un négociateur censé pourtant être dans l’ombre. Six syllabes aux consonances arabo-musulmanes, pour désigner un homme d’affaires franco-libanais de 61 ans, un nom publié à plusieurs reprises dans les médias français, pour avoir probablement été le principal intermédiaire dans la filière de rétro-commissions des contrats d’armements occultes où l’Etat français, clan balladurien en tête, aurait été trempé jusqu’au cou dans les années 90.
Et voilà que le média en ligne Mediapart avance encore ce nom pour révéler de nouveaux secrets de polichinelles. « Les documents Takieddine : le financier secret qui met en danger le clan Sarkozy ». C’est sous ce titre qu’est parue hier l’enquête – appuyée par des photos et des documents bancaires- du quotidien en ligne, rompu aux investigations de longue haleine. Et aux scoops.
Des photos inédites
Les images d’abord. Qu’y voit-on ?
- L’homme d’affaires libanais Ziad Takieddine et Brice Hortefeux, ancien ministre de l’Intérieur (2009-2011), ex ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Co-développemen (2007-2009)t. Le cadre : le bord de mer.
- Les mêmes hommes, accompagnés de leurs épouses respectives, auxquelles s’ajoute le couple de Jean-François Copé, actuel secrétaire général du parti au pouvoir, l’UMP, ancien porte-parole du gouvernement sous les gouvernements Raffarin et de Villepin (présidence Chirac). Le cadre : un port. Derrière eux, un yacht.
- Ce même Jean-François Copé nageant dans la piscine d’une vaste villa présentée par Mediapart comme étant celle de Ziad Takieddine.
- De nouveau Jean-François Copé, en compagnie de l’homme d’affaires d’origine libanaise Ziad Takieddine, au Liban. Le cadre : des vestiges historiques.
- Ziad Takieddine en compagnie, cette fois, de Thierry Gaubert, ancien conseiller de Sarkozy et actuel secrétaire général du parti majoritaire (l’UMP) et de Thierry Desseigne, actuel patron du Fouquet’s où Nicolas Sarkozy avait célébré sa victoire à la présidence de la République en mai 2007, et par ailleurs héritier des casinos Barrière.
Des preuves exclusives
Côté documents joints, voici ce que Mediapart présente :
- Un document de la Banque de la Méditerranée, qui écrit à Takieddine depuis Beyrouth en 1997, pour lui faire part que l’établissement crédite 75 millions de dollars américains sur son « compte secret ».
- Un tableau analytique des dépenses de l’homme d’affaires franco-libanais et sa colonne intitulée « paiements secrets » qui totalise près de 12 millions d’euros. « Credit Suisse » peut-on voir dans l’une des cases du tableau en question.
Des photos, des documents, certes. Mais pour prouver quoi ?
Ces documents bancaires et photographiques font partie d’un « premier volet d’articles que [Mediapart] va consacrer à Ziad Takieddine. En attendant, cette série de « photos inédites » démontre « des liens jusqu’ici insoupçonnés entre Takieddine et le premier cercle du chef de l’Etat ». Résultat : le média français affirme être en mesure d’avancer que l’homme d’affaires franco-libanais « est devenu à partir de 2002 un conseiller occulte et financier de l’ombre au cœur du sarkozysme ».
Toujours selon le média hexagonal, Monsieur Takieddine a reçu 91 millions d’euros (aujourd’hui 107 millions de francs suisses, encore bien davantage à l’époque), entre 1997 et 1998. Le motif de ce coquet versement ? La vente de frégates à l’Arabie saoudite. Le rapport avec l’Etat français ? Ce contrat juteux a été avalisé par le ministre du Budget de l’époque. Qui, en 1994, n’était autre que… Nicolas Sarkozy.
Enquête pour blanchiment en cours
Par ailleurs, on sait qu’une enquête préliminaire pour « manquements aux obligations déclaratives » et « suspicion de blanchiment » est en cours à l’encontre de Takieddine, 61 ans, depuis mars dernier. L’homme d’affaires s’était alors fait pincer à l’aéroport du Bourget avec pas moins de 1, 5 million d’euros en espèces (quelque 1, 8 million de francs) dans sa valise. Or, le Franco-Libanais revenait de… Libye. Ce qui n’augure évidemment rien de bon sur l’origine de ces fonds.
Pas plus tard que jeudi dernier, la Division nationale des investigations financières, partie aux trousses des hommes ayant trempé dans le volet financier de l’affaire Karachi – en 1992, le gouvernement français veut convaincre le Pakistan d’acheter des sous-marins français plutôt qu’allemands, en arrosant les responsables locaux – a perquisitionné le domicile de Thierry Gaubert (actuel secrétaire du parti majoritaire). Takieddine aurait été la cheville ouvrière de ces rétro-commissions qui auraient servi à financer la campagne présidentielle d’Edouard Balladur, finalement battu en 1995 par Jacques Chirac.
Jacques Chirac porte le coup de grâce à ces financements
En arrivant à l’Elysée justement, Chirac veut mettre de l’ordre dans cette gabegie (l’argent frais qui serait ainsi arrivé aux mains de son adversaire Balladur a failli lui coûter sa place de chef de l’Etat). Il arrête net le projet le plus important de la protection des frontières de l’Arabie saoudite, le « Saudi Border Guards Development Program ». Un marché estimé à… 7 milliards d’euros (quelque 8 milliards de francs aujourd’hui, bien davantage encore à l’époque).
Contacté par les journalistes de Mediapart avant la parution de cette enquête qui risque d’éclabousser le pouvoir en place, Ziad Takeddine a refusé de répondre aux questions, tout en leur lâchant (délibérément ?) une éventuelle autre piste : « Allez donc voir ce que Villepin a touché ! ».
Des conséquences déjà
La parution de cet article de Mediapart a immédiatement suscité des réactions. Dès lundi matin, l’avocat des familles de victimes de l’attentat de Karachi a demandé l’audition de Jean-François Copé et Brice Hortefeux.
tdg.ch
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