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L'économie mondiale doit-elle se faire à l'idée d'un pétrole cher ?

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  • L'économie mondiale doit-elle se faire à l'idée d'un pétrole cher ?

    Si les courbes des prix du brut et du prix à la pompe évoluent de conserve, la tendance est clairement à la hausse des marges du côté des pétroliers.REUTERS/Ina Fassbender

    Mauvaise nouvelle sur la route des vacances. Alors que le prix du baril de brut reprend doucement mais sûrement des couleurs sur les places financières, dépassant allègrement les 100 dollars, le PDG de Total, Christophe de Margerie, a annoncé lundi sur Europe 1 que le prix de l'essence à la pompe allait enregistrer, dans les prochaines semaines, une hausse de quelques centimes par litre.



    La classe politique n'a pas été longue à tancer la rapidité du pétrolier à répercuter la hausse des prix du brut sur les prix de détail, alors que – ont-ils soigneusement souligné – l'inverse est selon eux beaucoup moins vrai. Moins vrai ? Si les courbes des prix du brut et du prix à la pompe évoluent de conserve, la tendance est clairement à la hausse des marges du côté des pétroliers.

    Mais le pire reste peut-être à venir. Christophe de Margerie a en effet mis en garde contre un excès de naïveté, rappelant que, "par définition", le marché de l'énergie est un marché "qui se rétrécit", ce qui explique selon lui la hausse inéluctable des prix. Doit-on d'ores et déjà se faire à l'idée d'une croissance économique basée sur un pétrole de plus en plus cher ?

    Un pétrole cher, oui, estiment les spécialistes, mais tous n'ont pas la même idée du seuil qui conduirait à un changement de paradigme économique.

    Quelles sont les causes de la remontée des cours ces derniers mois ?
    Certains facteurs – structurels – de hausse n'ont pas changé depuis 2008. D'une part, la forte demande en pétrole des pays émergents, au premier rang desquels la Chine, continue à tirer les prix vers le haut. D'autre part, les pays membres de l'OPEP, qui regroupe les principaux producteurs de pétrole de la planète, rechignent à augmenter leurs quotas, considérant que le niveau des prix actuels satisfait leurs intérêts. Enfin, les pays producteurs de pétrole non membres de l'OPEP peinent à augmenter leur production.

    Facteur aggravant : les troubles dans le monde arabe, en particulier en Libye (8e producteur de l'OPEP en 2009), ont considérablement renchéri la prime de risque qui pèse sur le baril. Même si la crainte d'une large contagion des troubles ne semble plus justifiée, l'apaisement n'est pas encore à l'ordre du jour et le manque de pétrole libyen pèse sur les marchés.

    La conjoncture n'est pour autant pas tout à fait la même qu'en 2008, souligne Céline Antonin, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), car à l'époque "le secteur était proche de la saturation en termes de capacités de raffinage". D'autre part, l'économie mondiale était encore "en période de surchauffe, avec une inflation élevée". A l'heure actuelle, "le monde est en sortie de crise, la croissance a beaucoup reculé et les marchés pétroliers ne fonctionnent pas à plein régime", estime-t-elle. Le risque d'une "flambée" du pétrole est donc moindre.

    Peut-on déterminer un "pic" au-delà duquel toute hausse serait impossible ?
    Les économistes ont beaucoup de mal à dégager un consensus, même s'ils s'accordent à dire que le prix du pétrole présente encore une marge à la hausse. Les économistes de Barron's, principal magazine d'informations financières américain, estiment qu'un baril à 150 dollars est envisageable d'ici au printemps 2012, citant à titre de comparaison le choc pétrolier de 1980, qui a vu le baril monter à 39,5 dollars de l'époque, c'est-à-dire à 93,5 dollars actuels.

    Pour l'OFCE en revanche, dont les économistes ont établi des prévisions basées sur une crise arabe courte, il est peu probable que le baril de brent dépasse les 120 dollars d'ici la fin de l'année.

    Même dans les prévisions les plus pessimistes, il est important de garder à l'esprit le précédent de juillet 2008, qui a vu le baril brièvement grimper à 147 dollars. Or ce pic n'a pas aggravé la crise : au contraire, la récession a provisoirement affaibli la demande et cassé la spirale haussière.

    Existe-t-il un seuil à partir duquel la demande peut se contracter ?
    Là encore, les économistes divergent. D'une part, les pays développés sont logiquement moins dépendants du pétrole en 2011 qu'ils ne l'étaient dans les années 70, lors du premier choc pétrolier, du fait de la modification de la structure des économies, et de la nouvelle prépondérance du secteur tertiaire. D'autre part, "l'intensité pétrolière", c'est-à-dire la quantité de pétrole nécessaire pour produire un bien, a beaucoup baissé, et pas seulement dans les pays riches. Selon une étude de l'OFCE, elle a décrû de 1,6 % en 2010 et devrait encore baisser de 1,9 % en 2011.

    Cela dit, si l'on se réfère aux chiffres de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la consommation de pétrole en Chine a doublé entre 2000 et 2010. L'effet volume l'emporte donc largement : malgré la baisse de la dépendance au pétrole, la demande continue à croître de façon soutenue.

    Pourquoi l'Agence internationale de l'énergie a-t-elle choisi de puiser dans ses stocks stratégiques ?
    La manœuvre est essentiellement politique : les 60 millions de baril débloqués par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui regroupe les pays membres de l'OCDE, ne représentent que dix-huit heures de consommation de pétrole à l'échelle mondiale. Le coup d'éclat de l'AIE ne peut donc que casser temporairement une spirale haussière, sans effet sur le plus long terme. "L'AIE est un peu le contrepoids de l'OPEP, rappelle Céline Antonin. Il est donc normal qu'elle montre sa capacité de réaction en cas de coup dur."

    D'un point de vue interne, endiguer la tendance à la hausse est en outre important politiquement, surtout pour des pays qui entrent en année électorale, comme les Etats-Unis.

    Enfin, sur le plan technique, le geste de l'AIE traduit également une inquiétude sur l'ampleur des réserves de brut. Seuls les pays de l'OPEP disposent de réserves importantes (la "réserve" représente la quantité de pétrole qui peut être extraite rapidement, dans les 30-45 jours) et, selon les économistes de Barron's, les pays producteurs de pétrole non membres de l'OPEP "pompent déjà tout ce qu'ils peuvent".

    Qu'est-ce qui pourrait faire durablement redescendre le prix du baril ?
    En premier lieu, la fin des troubles en Libye et dans les pays voisins supprimerait la prime de risque qui plombe le prix du baril et permettrait la reprise de la production. Même si la Libye exporte peu de pétrole (1,5 million de barils par jour), celui-ci, un "light sweet crude" d'excellente qualité, est très prisé des acheteurs.

    Autre éventualité : une augmentation conséquente des quotas de l'OPEP, qui tient essentiellement au bon vouloir de l'Arabie saoudite.

    Par ailleurs, les inquiétudes sur la dette des pays européens, les incertitudes sur la reprise de la croissance en période post-crise sont autant de facteurs susceptibles de faire retomber les prix du pétrole, mais cette baisse, de par sa faible ampleur, reste cosmétique.

    Dans quelle mesure la hausse du pétrole affecte l'économie ?

    Tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne. Parmi les plus chanceux : les pays de la zone euro qui, grâce à la politique de dollar faible de la banque centrale américaine, voient leur facture pétrolière, libellée en dollars, considérablement réduite par le simple effet du taux de change. En France, une étude de la fondation Robert-Schuman, portant sur les années 2002-2007, estime que "le coût de l'augmentation des prix du pétrole en euro a été compris entre – 0,14 et – 0,34 point de PIB par an entre 2002 et 2007".

    Il n'empêche que tout renchérissement du prix du baril se répercute sur les prix de détail des produits et des activités gourmands en pétrole : "L'or noir est typiquement un facteur d'inflation importée", avertit Céline Antonin, "dont le poids est supporté par le consommateur". Ce n'est toutefois pas le cas partout : en Chine, le prix du pétrole est administré, toute hausse de la facture énergétique est donc prise en charge par le budget de l'Etat, et non par les consommateurs.

    Audrey Fournier
    LEMONDE.FR | 13.07.11
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    L'économie mondiale doit-elle se faire à l'idée d'un pétrole cher ?
    Je pense que OUI.

    En 2008, lorsqu'il avait dépassé les 100 dollars, cela faisait la une des journaux. Aujourd'hui, le Brent à 118,78 dollars relève de la normalité.

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