L’Algérie est le pays au monde où le budget de l’Etat a, en pourcentage, augmenté le plus durant l’année 2011. 25% de plus par la grâce de la LFC 2011.
Le Trésor public dépensera 25 milliards de dollars de plus que prévu par la loi de finances initiale pour boucler l’année. Une comparaison surgit. Immanquablement. Les 28 milliards d’euros de coupe budgétaire – sur trois ans - en Grèce.
Montant voté de justesse par le Parlement mercredi dernier pour ouvrir la voie au second plan de sauvetage des finances publiques du pays, par la communauté internationale, Europe en tête. Cet espace a déjà pris le risque de soutenir, il y a plusieurs mois, que l’Algérie n’est pas à l’abri d’un scénario grec.
A l’horizon 2025 lorsque les revenus des exportations énergétiques se seront affaissés, sans que d’autres revenus à l’export n’aient eu le temps de prendre le relais. L’architecture de la dépense publique algérienne est connectée à deux matrices. Le Nymex, qui donne entre autres les cours du brut léger et le rapport mensuel de la Gendarmerie nationale qui quantifie la tension sociale dans le pays.
La moitié des 25 milliards de dollars de dépenses additionnelles décidées pour 2011 ira payer les augmentations des salaires des fonctionnaires. Des alarmes ont été tirées. L’achat de la paix sociale sacrifie tout au court terme. Mauvaise option ?
C’est le théoricien algérien de l’organisation, Tayeb Hafsi, qui nous enseigne qu’à priori toutes les stratégies se valent. La meilleure est finalement celle qui réalise une convergence de tous les acteurs autour de ses objectifs. La pire celle qui produit de l’entropie.
C’est-à-dire un désordre des trajectoires et des énergies. Préserver la cohérence sociale dans le pays n’est bien sûr pas une mauvaise stratégie a priori. Mais pour aller où ensuite ? La Grèce a adhéré très tôt, en 1981, à l’Union européenne. Elle s’est, comme son pendant de la Méditerranée de l’Ouest, le Portugal, modernisée en partie grâce aux fonds structurels de Bruxelles. Elle est entrée dans la zone euro dès sa création en 2001.
Tout s’est bien passé jusque-là. Et même au-delà. Les taux de croissance de la période d’avant-crise sont parmi les plus hauts d’Europe : 3,5% en 2003, 4,7% en 2004, l’année des Jeux olympiques d’Athènes, 3,7% l’année suivante et celle d’après, 4,2% en 2007 et encore 3,7% de croissance du PIB en 2008, l’année du krach financier à Wall Street.
Le pilotage de l’économie grecque pouvait être considéré comme excellent. Sauf que le modèle était d’une fragilité considérable. Il ne pouvait supporter ni la connexion de son marché financier au monde – importations des produits toxiques - ni son degré d’ouverture commerciale par temps d’euro germanisé (fort). En 2008, la Grèce a exporté pour 30 milliards de dollars. Ces importations pour l’année ne dépassaient pas les 90 milliards de dollars. Les finances publiques de la Grande-Bretagne lui permettaient de nationaliser fin 2008-2009 la dette colossale de la city, pour éviter l’effondrement du système bancaire.
L’Irlande n’a pas pu faire de même sans s’étrangler à la dette souveraine. La Grèce était structurellement la moins armée pour cette collectivisation de l’ardoise privée des banques. En moins de dix années, le renversement de conjoncture est copernicien. –2% du PIB en 2009, -4% en 2010, et encore une récession prévisionnelle de 2,5% en 2011. Décennie de croissance quasiment effacée. Sans le préjudice des autres fractures.
Dans trois ans, l’Algérie croupira sans doute sur des réserves de change de plus de 200 milliards de dollars. Mais la trajectoire de l’économie grecque continuera de l’interpeller. Même fragilité, même structure. Le secteur public pèse 40% du PNB en Grèce et l’économie parallèle y est l’une des plus prospères sur la rive nord Méditerranée.
La stratégie grecque est entrée dans le monde sous le manteau de l’Europe. Elle en a profité pour accélérer son rattrapage. Arrivée à maturité, seules la compétitivité de ses entreprises et la diversification de ses exportations pouvaient amortir l’onde de choc des subprimes. Elle n’avait ni l’un ni l’autre. Comme l’Algérie d’aujourd’hui et peut-être encore demain. Le pays est en quelque sorte dans un cycle grec. A la place des fonds structurels communautaires (UE), la fiscalité pétrolière. Le rattrapage est en cours dans les infrastructures.
Les budgets enflent d’année en année. Mais cette manne va se tarir au-delà de 2025. Peut-être avant. Une autre source des finances publiques, une autre connexion vertueuse viendra- t-elle prendre le relais ? En stoppant le plan Valhyd en 1980, la gouvernance algérienne ne se posait pas plus de questions de prospective que celle d’aujourd’hui qui ne sait que vendre du pétrole et du gaz et stocker des bons de Trésor américains.
El Kadi Ihsane
El Watan
Le Trésor public dépensera 25 milliards de dollars de plus que prévu par la loi de finances initiale pour boucler l’année. Une comparaison surgit. Immanquablement. Les 28 milliards d’euros de coupe budgétaire – sur trois ans - en Grèce.
Montant voté de justesse par le Parlement mercredi dernier pour ouvrir la voie au second plan de sauvetage des finances publiques du pays, par la communauté internationale, Europe en tête. Cet espace a déjà pris le risque de soutenir, il y a plusieurs mois, que l’Algérie n’est pas à l’abri d’un scénario grec.
A l’horizon 2025 lorsque les revenus des exportations énergétiques se seront affaissés, sans que d’autres revenus à l’export n’aient eu le temps de prendre le relais. L’architecture de la dépense publique algérienne est connectée à deux matrices. Le Nymex, qui donne entre autres les cours du brut léger et le rapport mensuel de la Gendarmerie nationale qui quantifie la tension sociale dans le pays.
La moitié des 25 milliards de dollars de dépenses additionnelles décidées pour 2011 ira payer les augmentations des salaires des fonctionnaires. Des alarmes ont été tirées. L’achat de la paix sociale sacrifie tout au court terme. Mauvaise option ?
C’est le théoricien algérien de l’organisation, Tayeb Hafsi, qui nous enseigne qu’à priori toutes les stratégies se valent. La meilleure est finalement celle qui réalise une convergence de tous les acteurs autour de ses objectifs. La pire celle qui produit de l’entropie.
C’est-à-dire un désordre des trajectoires et des énergies. Préserver la cohérence sociale dans le pays n’est bien sûr pas une mauvaise stratégie a priori. Mais pour aller où ensuite ? La Grèce a adhéré très tôt, en 1981, à l’Union européenne. Elle s’est, comme son pendant de la Méditerranée de l’Ouest, le Portugal, modernisée en partie grâce aux fonds structurels de Bruxelles. Elle est entrée dans la zone euro dès sa création en 2001.
Tout s’est bien passé jusque-là. Et même au-delà. Les taux de croissance de la période d’avant-crise sont parmi les plus hauts d’Europe : 3,5% en 2003, 4,7% en 2004, l’année des Jeux olympiques d’Athènes, 3,7% l’année suivante et celle d’après, 4,2% en 2007 et encore 3,7% de croissance du PIB en 2008, l’année du krach financier à Wall Street.
Le pilotage de l’économie grecque pouvait être considéré comme excellent. Sauf que le modèle était d’une fragilité considérable. Il ne pouvait supporter ni la connexion de son marché financier au monde – importations des produits toxiques - ni son degré d’ouverture commerciale par temps d’euro germanisé (fort). En 2008, la Grèce a exporté pour 30 milliards de dollars. Ces importations pour l’année ne dépassaient pas les 90 milliards de dollars. Les finances publiques de la Grande-Bretagne lui permettaient de nationaliser fin 2008-2009 la dette colossale de la city, pour éviter l’effondrement du système bancaire.
L’Irlande n’a pas pu faire de même sans s’étrangler à la dette souveraine. La Grèce était structurellement la moins armée pour cette collectivisation de l’ardoise privée des banques. En moins de dix années, le renversement de conjoncture est copernicien. –2% du PIB en 2009, -4% en 2010, et encore une récession prévisionnelle de 2,5% en 2011. Décennie de croissance quasiment effacée. Sans le préjudice des autres fractures.
Dans trois ans, l’Algérie croupira sans doute sur des réserves de change de plus de 200 milliards de dollars. Mais la trajectoire de l’économie grecque continuera de l’interpeller. Même fragilité, même structure. Le secteur public pèse 40% du PNB en Grèce et l’économie parallèle y est l’une des plus prospères sur la rive nord Méditerranée.
La stratégie grecque est entrée dans le monde sous le manteau de l’Europe. Elle en a profité pour accélérer son rattrapage. Arrivée à maturité, seules la compétitivité de ses entreprises et la diversification de ses exportations pouvaient amortir l’onde de choc des subprimes. Elle n’avait ni l’un ni l’autre. Comme l’Algérie d’aujourd’hui et peut-être encore demain. Le pays est en quelque sorte dans un cycle grec. A la place des fonds structurels communautaires (UE), la fiscalité pétrolière. Le rattrapage est en cours dans les infrastructures.
Les budgets enflent d’année en année. Mais cette manne va se tarir au-delà de 2025. Peut-être avant. Une autre source des finances publiques, une autre connexion vertueuse viendra- t-elle prendre le relais ? En stoppant le plan Valhyd en 1980, la gouvernance algérienne ne se posait pas plus de questions de prospective que celle d’aujourd’hui qui ne sait que vendre du pétrole et du gaz et stocker des bons de Trésor américains.
El Kadi Ihsane
El Watan
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