0 dame de la profondeur,
Que faites-vous à la surface,
Attentive à ce qui se passe,
Regardant la montre à mon heure ?
Madame, que puis-je pour vous,
Vous qui êtes là si tacite,
Ne serez-vous plus explicite,
Vous qui me voulez à genoux ?
Ce regard solitaire et tendre
Aimerait à se faire entendre ?
Et c'est à lui que je me dois
Puisque vous n'avez pas de voix ?
Grande dame des profondeurs,
0 voisine de l'autre monde,
Me voulez-vous en eaux profondes
Aux régions de votre coeur ?
Pourquoi me regarder avec des yeux d'otage,
Jeunesse d'au-delà les âges ?
Votre fixité signifie
Qu'il faut à vous que je me fie ?
Pour quelle obscure délivrance
Me demandez-vous alliance ?
0 vous toujours prête à finir,
Vous voudriez me retenir
Sur ce bord même de l'abîme
Dont vous êtes l'étrange cime.
Dame qui me voulez fidèle à votre image
Voilà que maintenant vous changez de visage ?
Comment vous suivre en vos détours,
Je suis simple comme le jour.
Comment pourrais-je me fier
A ce que vous sacrifiez,
Ou pensez-vous ainsi me dire
Que changer n'est pas se trahir
Que vous vous refusez au gel
Définitif de l'éternel ?
Devez-vous donc, quoi qu'il arrive,
Demeurer secrète et furtive ?
Ecoutez, mon obscure reine,
II est tard pour croire aux sirènes.
0 vous dont la douceur étonne
Venez-vous de jours sans personne ?
Est-ce la cendre de demain
Que vous serrez dans votre main ?
Fille d'un tout proche avenir,
Venez-vous m'aider à finir
Avec ce délicat sourire
Qui veut tout dire sans le dire ?
0 dame de mes eaux profondes
Serais-je donc si près des ombres ?
Ou venez-vous m'aider à vivre
De tout votre frêle équilibre ?
Que faire d'un si beau fantôme
Dans mes misérables bras d'homme ?
Oh si profonde contre moi
Vous mettez toute une buée
Fragile, bien distribuée
Dessus mon plus secret miroir.
Déjà méconnaissable à tous vos changements
Pourquoi vous voilez-vous le visage à présent ?
Est-ce pour retrouver enfin votre figure
Véritable, après tant de touchante imposture ?
Jules Supervielle
Que faites-vous à la surface,
Attentive à ce qui se passe,
Regardant la montre à mon heure ?
Madame, que puis-je pour vous,
Vous qui êtes là si tacite,
Ne serez-vous plus explicite,
Vous qui me voulez à genoux ?
Ce regard solitaire et tendre
Aimerait à se faire entendre ?
Et c'est à lui que je me dois
Puisque vous n'avez pas de voix ?
Grande dame des profondeurs,
0 voisine de l'autre monde,
Me voulez-vous en eaux profondes
Aux régions de votre coeur ?
Pourquoi me regarder avec des yeux d'otage,
Jeunesse d'au-delà les âges ?
Votre fixité signifie
Qu'il faut à vous que je me fie ?
Pour quelle obscure délivrance
Me demandez-vous alliance ?
0 vous toujours prête à finir,
Vous voudriez me retenir
Sur ce bord même de l'abîme
Dont vous êtes l'étrange cime.
Dame qui me voulez fidèle à votre image
Voilà que maintenant vous changez de visage ?
Comment vous suivre en vos détours,
Je suis simple comme le jour.
Comment pourrais-je me fier
A ce que vous sacrifiez,
Ou pensez-vous ainsi me dire
Que changer n'est pas se trahir
Que vous vous refusez au gel
Définitif de l'éternel ?
Devez-vous donc, quoi qu'il arrive,
Demeurer secrète et furtive ?
Ecoutez, mon obscure reine,
II est tard pour croire aux sirènes.
0 vous dont la douceur étonne
Venez-vous de jours sans personne ?
Est-ce la cendre de demain
Que vous serrez dans votre main ?
Fille d'un tout proche avenir,
Venez-vous m'aider à finir
Avec ce délicat sourire
Qui veut tout dire sans le dire ?
0 dame de mes eaux profondes
Serais-je donc si près des ombres ?
Ou venez-vous m'aider à vivre
De tout votre frêle équilibre ?
Que faire d'un si beau fantôme
Dans mes misérables bras d'homme ?
Oh si profonde contre moi
Vous mettez toute une buée
Fragile, bien distribuée
Dessus mon plus secret miroir.
Déjà méconnaissable à tous vos changements
Pourquoi vous voilez-vous le visage à présent ?
Est-ce pour retrouver enfin votre figure
Véritable, après tant de touchante imposture ?
Jules Supervielle
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