Jacques Borde. Historien et journaliste
Peut-on vraiment soutenir que la Guerre de Libye est une guerre énergétique ?
Jacques Borde – Oui. Mais pas seulement ! Pourquoi, nos gouvernements noient-ils la Libye sous les bombes ? Vaste question. Nous ne le saurons vraiment que dans une dizaine d’années, au minium, quand les documents auront été déclassifiés. C’est une guerre géopolitique donc, quelque part, une guerre énergétique.
Notez que je ne suis pas le seul à le dire. William Blaine Bill Richardson III, ancien Secrétaire US à l’Énergie (de l’administration Clinton), est encore plus catégorique que votre serviteur, affirmant, à propos de la via factis occidentale en Libye, qu’« Il y a un autre intérêt et c’est l’énergie. La Libye est parmi les 10 principaux exportateurs de pétrole dans le monde. Vous pouvez dire, en toute certitude, que la hausse du prix du pétrole aux États-Unis est due à l’arrêt de la production en Libye. Aussi ce n’est pas un pays sans importance et je pense que notre engagement est justifié ».
Q – Est-elle, au moins, la guerre humanitaire que prétendent ceux que vous appelez les « Quatre âniers de l’Apocalypse » ?
Jacques Borde – Là nous parlons du médiamensonge primal. Celui qui, depuis le début de cette affaire, sert de viatique à MM. Cameron, Sarkozy, Hague et Juppé pour justifier leurs agissements. Hélas, leur argumentaire ne tient pas la route.
Q – Dans quel sens ?
Jacques Borde – Dans un article du Boston Globe, le Pr. Alan J. Kuperman, de l’Université du Texas et auteur de The Limits of Humanitarian Intervention, est revenu sur les annonces de massacres à Benghazi, par lesquelles le président nord-américain, Barack H. Obama, à justifié l’intervention en Libye.
Il y a fait remarquer que depuis les presque deux mois qu’a duré le siège de Misrata, les données publiées par Human Watch montrent que, pour une population d’environ 400.000 habitants, seules 257 personnes, y compris les combattants, ont été tuées, et que parmi les 949 blessés, seulement 22 étaient des femmes. Notez que ces pertes incluent, forcément, les victimes des insurgés pro-occidentaux et celles causée par les Guernica ininterrompus des appareils de l’Axe atlantiques. Acteurs dont il ne serait pas surprenant d’apprendre, un jour, qu’ils ont été les principaux contributeurs à ces pertes civiles…
En revanche, ce ratio des pertes civiles montre bien que Kadhafi n’est pas en train de massacrer délibérément sa population, mais que les forces loyalistes ciblent les contre-révolutionnaires pro-occidentaux qui se battent contre le pouvoir issu de la Révolution des officiers libres.
Le Pr. Kuperman fait remarquer que le massacre des civils de Misrata n’a tout simplement pas eu lieu. Pas plus que celui d’une autre ville. Ces éléments démontrent clairement, nous dit-il, que le massacre de Benghazi n’aurait pas davantage eu lieu non plus, en cas de prise de la ville par les forces loyalistes et qu’il ne s’agit, en l’espèce, que de propagande de guerre.
Le Pr. Alan J. Kuperman rappelle également que, dans son discours du 17 mars 2011, quand Kadhafi a promis d’aller à Benghazi, « maison par maison », chercher les rebelles, il a, aussi, promis l’amnistie à ceux qui déposeraient les armes, montrant là que c’était bien les insurgés pro-occidentaux qui étaient visés, et non les civils.
Q – Mais l’Otan a présenté ses excuses…
Jacques Borde – Et ça vous suffit ? Cette manière de se défausser donne véritablement le vertige. Je tue, et, après, je demande pardon ! Cool, pourquoi s’arrêter, alors ? Et si Eichmann s’était simplement excusé lors de son procès à Jérusalem, cela aurait-il justifié son acquittement ? Notez, en passant, que grâce au double jeu des Services de Renseignements de l’Allemagne fédérale, il avait déjà échappé à la justice française pour l’assassinat de Jean Moulin…
Q – Sinon, pensez-vous que les dirigeants occidentaux ont été abusés par les insurgés et leurs mentors ? Ou qu’il s’agit d’une opération de mystification visant à justifier leur via factis sur la Libye?
Jacques Borde – Clairement, la seconde hypothèse. En l’espèce, il s’agit d’un grossier travail de manipulation, voire de déception comme disent les gens du Renseignements. Les bellicistes occidentalo-centrés – qu’ils soient Américains, Britanniques, Français, ou appartiennent à la mangeoire des pseudo intellectuels-spécialistes arabo-musulmans qui se disputent leurs passages sur les plateaux télés, n’a aucune espèce d’importance – nous récitent, comme un mantra rouillé, cette affirmation des massacres annoncés de Benghazi et Tobrouk. Leur logorrhée ne repose sur rien de d’objectif.
Elle relève du montage grossier. Comme le fut l’Opération Himmler ou Incident de Gleiwitz qui, le 31 août 1939, a servi de prétexte aux hitlériens pour déclencher la guerre contre la Pologne…
Q – Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jacques Borde – C’est un classique du genre. Un commando de SS et d’opérationnels du SD nazi, déguisés en soldats polonais, ont attaqué l’émetteur radio frontalier de Gliwice (Gleiwitz, en allemand) et ont diffusé un message appelant la minorité polonaise de Silésie à prendre les armes. Ce prétexte, repris par le propaganda staffel nazi comme casus belli, permit à Hitler dès le jour suivant d’attaquer la Pologne, entraînant la déclaration de guerre de la France et du Royaume-Uni, et la 2ème Guerre mondiale.
Cette action surnommée Opération Himmler fut dirigée par l’agent du Sicherheitsdienst (SD) Alfred Helmut Naujocks – lisez son livre[1], il est très éclairant des dessous de l’hitlérisme – sous les ordres de Reinhard Heydrich[2]. Des détenus, provenant de camps de concentration tués et habillés avec des uniformes de l’armée polonaise, furent abandonnés sur place comme « preuve » (sic) de l’attaque.
Q – Un peu cousu de fil blanc, tout de même ?
Jacques Borde – Si. Mais, ce sont les vainqueurs qui écrivent l’Histoire ! Reinhard Heydrich dira, à propos de Gleiwitz : « Quand les blindés rouleront, plus personne n’en parlera ». C’est la défaite de l’Axe et la victoire des Alliés – et de la France Libre, j’y tiens – qui a permis de faire de l’incident de Gleiwitz un cas d’école dans le domaine de la manipulation. Mais prenez l’Affaire des couveuses de Koweït-City et des Armes de destruction massives (ADM) de Saddam Hussein. Avec, en point d’orgue le numéro de cirque, le 5 février 2003, du général (CR) Colin L. Powell, devant le Conseil de sécurité des Nations-unies, avec son éprouvette-bidon.
C’est bien l’appartenance des auteurs de ces forgeries avérées au camp de l’Occident qui fait qu’ils ne croupissent pas aujourd’hui derrière les barreaux, non ? En ce qui concerne les forgeries mises en place pour déclencher, et poursuivre, la Guerre de Libye, j’ai plus d’espoir dans l’avenir…
Q – Donc, c’est clair, pour vous, il y a bien eu manipulation et forgerie ?
Jacques Borde – Oui. Mais plus encore quant aux effets. En effet, comme le note le Pr. Kuperman, cette manipulation, et la guerre qui en a découlé, a eu deux effets pervers majeurs :
1. La guerre civile libyenne serait déjà terminée sans la via factis décrétée par Washington, Londres et Paris.
2. À l’avenir, des rebelles comme ceux de Libye, seront enclins à provoquer et exagérer l’action des gouvernements contre lesquels ils se soulèvent, pour pousser à une intervention militaire extérieure. C’est déjà le cas en Syrie…
Q – Et l’argument d’un Kadhafi s’accrochant au pouvoir ?
Jacques Borde – Certes, le Guide Libyen a passé 42 année fidèle au poste. Mais, primo, en quoi est-ce une raison pour le déboulonner ? Le record de longévité des hommes politiques n’est, d’ailleurs, pas détenu ni par Kadhafi, encore moins par les Africains comme beaucoup le croient, mais par les Occidentaux eux-mêmes.
Peut-on vraiment soutenir que la Guerre de Libye est une guerre énergétique ?
Jacques Borde – Oui. Mais pas seulement ! Pourquoi, nos gouvernements noient-ils la Libye sous les bombes ? Vaste question. Nous ne le saurons vraiment que dans une dizaine d’années, au minium, quand les documents auront été déclassifiés. C’est une guerre géopolitique donc, quelque part, une guerre énergétique.
Notez que je ne suis pas le seul à le dire. William Blaine Bill Richardson III, ancien Secrétaire US à l’Énergie (de l’administration Clinton), est encore plus catégorique que votre serviteur, affirmant, à propos de la via factis occidentale en Libye, qu’« Il y a un autre intérêt et c’est l’énergie. La Libye est parmi les 10 principaux exportateurs de pétrole dans le monde. Vous pouvez dire, en toute certitude, que la hausse du prix du pétrole aux États-Unis est due à l’arrêt de la production en Libye. Aussi ce n’est pas un pays sans importance et je pense que notre engagement est justifié ».
Q – Est-elle, au moins, la guerre humanitaire que prétendent ceux que vous appelez les « Quatre âniers de l’Apocalypse » ?
Jacques Borde – Là nous parlons du médiamensonge primal. Celui qui, depuis le début de cette affaire, sert de viatique à MM. Cameron, Sarkozy, Hague et Juppé pour justifier leurs agissements. Hélas, leur argumentaire ne tient pas la route.
Q – Dans quel sens ?
Jacques Borde – Dans un article du Boston Globe, le Pr. Alan J. Kuperman, de l’Université du Texas et auteur de The Limits of Humanitarian Intervention, est revenu sur les annonces de massacres à Benghazi, par lesquelles le président nord-américain, Barack H. Obama, à justifié l’intervention en Libye.
Il y a fait remarquer que depuis les presque deux mois qu’a duré le siège de Misrata, les données publiées par Human Watch montrent que, pour une population d’environ 400.000 habitants, seules 257 personnes, y compris les combattants, ont été tuées, et que parmi les 949 blessés, seulement 22 étaient des femmes. Notez que ces pertes incluent, forcément, les victimes des insurgés pro-occidentaux et celles causée par les Guernica ininterrompus des appareils de l’Axe atlantiques. Acteurs dont il ne serait pas surprenant d’apprendre, un jour, qu’ils ont été les principaux contributeurs à ces pertes civiles…
En revanche, ce ratio des pertes civiles montre bien que Kadhafi n’est pas en train de massacrer délibérément sa population, mais que les forces loyalistes ciblent les contre-révolutionnaires pro-occidentaux qui se battent contre le pouvoir issu de la Révolution des officiers libres.
Le Pr. Kuperman fait remarquer que le massacre des civils de Misrata n’a tout simplement pas eu lieu. Pas plus que celui d’une autre ville. Ces éléments démontrent clairement, nous dit-il, que le massacre de Benghazi n’aurait pas davantage eu lieu non plus, en cas de prise de la ville par les forces loyalistes et qu’il ne s’agit, en l’espèce, que de propagande de guerre.
Le Pr. Alan J. Kuperman rappelle également que, dans son discours du 17 mars 2011, quand Kadhafi a promis d’aller à Benghazi, « maison par maison », chercher les rebelles, il a, aussi, promis l’amnistie à ceux qui déposeraient les armes, montrant là que c’était bien les insurgés pro-occidentaux qui étaient visés, et non les civils.
Q – Mais l’Otan a présenté ses excuses…
Jacques Borde – Et ça vous suffit ? Cette manière de se défausser donne véritablement le vertige. Je tue, et, après, je demande pardon ! Cool, pourquoi s’arrêter, alors ? Et si Eichmann s’était simplement excusé lors de son procès à Jérusalem, cela aurait-il justifié son acquittement ? Notez, en passant, que grâce au double jeu des Services de Renseignements de l’Allemagne fédérale, il avait déjà échappé à la justice française pour l’assassinat de Jean Moulin…
Q – Sinon, pensez-vous que les dirigeants occidentaux ont été abusés par les insurgés et leurs mentors ? Ou qu’il s’agit d’une opération de mystification visant à justifier leur via factis sur la Libye?
Jacques Borde – Clairement, la seconde hypothèse. En l’espèce, il s’agit d’un grossier travail de manipulation, voire de déception comme disent les gens du Renseignements. Les bellicistes occidentalo-centrés – qu’ils soient Américains, Britanniques, Français, ou appartiennent à la mangeoire des pseudo intellectuels-spécialistes arabo-musulmans qui se disputent leurs passages sur les plateaux télés, n’a aucune espèce d’importance – nous récitent, comme un mantra rouillé, cette affirmation des massacres annoncés de Benghazi et Tobrouk. Leur logorrhée ne repose sur rien de d’objectif.
Elle relève du montage grossier. Comme le fut l’Opération Himmler ou Incident de Gleiwitz qui, le 31 août 1939, a servi de prétexte aux hitlériens pour déclencher la guerre contre la Pologne…
Q – Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jacques Borde – C’est un classique du genre. Un commando de SS et d’opérationnels du SD nazi, déguisés en soldats polonais, ont attaqué l’émetteur radio frontalier de Gliwice (Gleiwitz, en allemand) et ont diffusé un message appelant la minorité polonaise de Silésie à prendre les armes. Ce prétexte, repris par le propaganda staffel nazi comme casus belli, permit à Hitler dès le jour suivant d’attaquer la Pologne, entraînant la déclaration de guerre de la France et du Royaume-Uni, et la 2ème Guerre mondiale.
Cette action surnommée Opération Himmler fut dirigée par l’agent du Sicherheitsdienst (SD) Alfred Helmut Naujocks – lisez son livre[1], il est très éclairant des dessous de l’hitlérisme – sous les ordres de Reinhard Heydrich[2]. Des détenus, provenant de camps de concentration tués et habillés avec des uniformes de l’armée polonaise, furent abandonnés sur place comme « preuve » (sic) de l’attaque.
Q – Un peu cousu de fil blanc, tout de même ?
Jacques Borde – Si. Mais, ce sont les vainqueurs qui écrivent l’Histoire ! Reinhard Heydrich dira, à propos de Gleiwitz : « Quand les blindés rouleront, plus personne n’en parlera ». C’est la défaite de l’Axe et la victoire des Alliés – et de la France Libre, j’y tiens – qui a permis de faire de l’incident de Gleiwitz un cas d’école dans le domaine de la manipulation. Mais prenez l’Affaire des couveuses de Koweït-City et des Armes de destruction massives (ADM) de Saddam Hussein. Avec, en point d’orgue le numéro de cirque, le 5 février 2003, du général (CR) Colin L. Powell, devant le Conseil de sécurité des Nations-unies, avec son éprouvette-bidon.
C’est bien l’appartenance des auteurs de ces forgeries avérées au camp de l’Occident qui fait qu’ils ne croupissent pas aujourd’hui derrière les barreaux, non ? En ce qui concerne les forgeries mises en place pour déclencher, et poursuivre, la Guerre de Libye, j’ai plus d’espoir dans l’avenir…
Q – Donc, c’est clair, pour vous, il y a bien eu manipulation et forgerie ?
Jacques Borde – Oui. Mais plus encore quant aux effets. En effet, comme le note le Pr. Kuperman, cette manipulation, et la guerre qui en a découlé, a eu deux effets pervers majeurs :
1. La guerre civile libyenne serait déjà terminée sans la via factis décrétée par Washington, Londres et Paris.
2. À l’avenir, des rebelles comme ceux de Libye, seront enclins à provoquer et exagérer l’action des gouvernements contre lesquels ils se soulèvent, pour pousser à une intervention militaire extérieure. C’est déjà le cas en Syrie…
Q – Et l’argument d’un Kadhafi s’accrochant au pouvoir ?
Jacques Borde – Certes, le Guide Libyen a passé 42 année fidèle au poste. Mais, primo, en quoi est-ce une raison pour le déboulonner ? Le record de longévité des hommes politiques n’est, d’ailleurs, pas détenu ni par Kadhafi, encore moins par les Africains comme beaucoup le croient, mais par les Occidentaux eux-mêmes.
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