Marianne Vendredi 2 Septembre 2011 Martine Gozlan
Une jeune fille a failli être lynchée à Alger parce qu’elle portait un short. Cette sinistre affaire en dit long sur l’état du pays et fait le buzz sur la toile.
Pendant que tout le monde a les yeux fixés sur la Libye ou sur le dernier attentat kamikaze qui a fait 18 morts à Cherchell le 26 août, la rue algérienne reprend à toute vitesse les réflexes et les moeurs d’un Etat islamiste. En témoigne la tentative de lynchage qui s’est produite à la fin du Ramadan, en plein centre d’Alger, place Maurice-Audin. C’était la 27 ème nuit du mois sacré, à 23 heures 40 et on doit le récit de l’affaire au journaliste du quotidien l’Expression Karim Aimeur.
Extraits :
« Les terrasses des cafés sont pleines, l’ambiance est à son comble. Mais subitement tout bascule. Un jeune couple arrive. La jeune fille porte un short. Le couple est d’abord chahuté puis une meute de plus de soixante personnes se forme. Les deux jeunes pressent le pas. La foule les suit et grossit. En face de la Fac centrale, il est totalement assiégé. Sous les insultes, il frôle le passage à tabac et le lynchage... »
Ce sont les policiers qui sauveront la petite en short ( 17 ans) et son copain. Arrivés à la hâte, ils les installent à l’abri dans un fourgon , en face du siège d’Air Algérie. On donne un pantalon à la jeune fille. Mais, rapporte l’Expression, le couple est toujours en grand danger de lynchage : « Le pire reste à craindre. Les policiers intiment aux « protestataires » l’ordre de se disperser. Peine perdue, ils sont toujours aux aguets. Ce sont pour la plupart des adolescents et aucun d’eux ne porte la barbe. C’est la frustration qui les anime »Il faudra dépêcher un autre fourgon et finalement évacuer le couple vers le commissariat de la rue Didouche Mourad pour le mettre définitivement à l’abri. Certains candidats au lynchage l’ont même attendu à la sortie. Heureusement en vain.
Ces faits nous ont été confirmés par téléphone dans la capitale algérienne. L’article de l’Expression, qui a osé dénoncer « le retour de l’Inquisition » a fait le buzz sur Facebook. De nombreuses jeunes filles, épouvantées par cette loi de la barbarie qui ressurgit dans un pays tant éprouvé, ont même décidé d’une « Journée du short » à Alger ! Quels que soient les risques, elles veulent braver cette atroce loi du non-dit mais du tout-permis aux talibans locaux qui est en train de s’imposer. La parole des femmes déferle sur le net et beaucoup ont même choisi d’afficher un short en signe de ralliement sur leur profil.
A Boumerdès, dans cette Kabylie où on compte de plus en plus de jeunes avides de « monter au maquis » rejoindre le djihad, une fille écrit, la rage au cœur : « Suis-je une prostituée ? Parce que les pseudo-hommes qui ont envahi ma ville, c’est comme ça qu’ils me voient et qu’ils me traitent ! Nous descendions hier à la plage et les insultes ont fusé : « Vous crèverez en enfer, putes ! Personne n’épousera des putes comme vous ! « Or, je suis une citoyenne de ce bled ! Jusqu’à preuve du contraire, je ne vis pas dans un pays appliquant la charia ! je revois les images de ces femmes qui marchaient à Alger pour leurs droits dans les années 1990...Je revois ces femmes tuées parce qu’elles voulaient continuer à exercer un métier, à sortir, à se faire belles... Je pense à Assia Djebbar, à Wassila Tamzali, à Maïssa Bey et à toutes ces féministes qui ont fui ce pays...Je ne sais pas s’il faut les féliciter pour avoir pris la bonne décision ou les maudire de nous avoir abandonnées... »
Voilà ce qu’on peut lire, entre cent messages, sur cette affaire de lynchage un soir d’Alger où, comme à l’ordinaire, le terrible ordinaire, dans la douceur renversante de la nuit, la violence des frustrations et la sauvagerie du regard sur la femme, se haïr semblait plus naturel que de s’aimer. Même à 20 ans. Surtout à 20 ans.
Une jeune fille a failli être lynchée à Alger parce qu’elle portait un short. Cette sinistre affaire en dit long sur l’état du pays et fait le buzz sur la toile.
Pendant que tout le monde a les yeux fixés sur la Libye ou sur le dernier attentat kamikaze qui a fait 18 morts à Cherchell le 26 août, la rue algérienne reprend à toute vitesse les réflexes et les moeurs d’un Etat islamiste. En témoigne la tentative de lynchage qui s’est produite à la fin du Ramadan, en plein centre d’Alger, place Maurice-Audin. C’était la 27 ème nuit du mois sacré, à 23 heures 40 et on doit le récit de l’affaire au journaliste du quotidien l’Expression Karim Aimeur.
Extraits :
« Les terrasses des cafés sont pleines, l’ambiance est à son comble. Mais subitement tout bascule. Un jeune couple arrive. La jeune fille porte un short. Le couple est d’abord chahuté puis une meute de plus de soixante personnes se forme. Les deux jeunes pressent le pas. La foule les suit et grossit. En face de la Fac centrale, il est totalement assiégé. Sous les insultes, il frôle le passage à tabac et le lynchage... »
Ce sont les policiers qui sauveront la petite en short ( 17 ans) et son copain. Arrivés à la hâte, ils les installent à l’abri dans un fourgon , en face du siège d’Air Algérie. On donne un pantalon à la jeune fille. Mais, rapporte l’Expression, le couple est toujours en grand danger de lynchage : « Le pire reste à craindre. Les policiers intiment aux « protestataires » l’ordre de se disperser. Peine perdue, ils sont toujours aux aguets. Ce sont pour la plupart des adolescents et aucun d’eux ne porte la barbe. C’est la frustration qui les anime »Il faudra dépêcher un autre fourgon et finalement évacuer le couple vers le commissariat de la rue Didouche Mourad pour le mettre définitivement à l’abri. Certains candidats au lynchage l’ont même attendu à la sortie. Heureusement en vain.
Ces faits nous ont été confirmés par téléphone dans la capitale algérienne. L’article de l’Expression, qui a osé dénoncer « le retour de l’Inquisition » a fait le buzz sur Facebook. De nombreuses jeunes filles, épouvantées par cette loi de la barbarie qui ressurgit dans un pays tant éprouvé, ont même décidé d’une « Journée du short » à Alger ! Quels que soient les risques, elles veulent braver cette atroce loi du non-dit mais du tout-permis aux talibans locaux qui est en train de s’imposer. La parole des femmes déferle sur le net et beaucoup ont même choisi d’afficher un short en signe de ralliement sur leur profil.
A Boumerdès, dans cette Kabylie où on compte de plus en plus de jeunes avides de « monter au maquis » rejoindre le djihad, une fille écrit, la rage au cœur : « Suis-je une prostituée ? Parce que les pseudo-hommes qui ont envahi ma ville, c’est comme ça qu’ils me voient et qu’ils me traitent ! Nous descendions hier à la plage et les insultes ont fusé : « Vous crèverez en enfer, putes ! Personne n’épousera des putes comme vous ! « Or, je suis une citoyenne de ce bled ! Jusqu’à preuve du contraire, je ne vis pas dans un pays appliquant la charia ! je revois les images de ces femmes qui marchaient à Alger pour leurs droits dans les années 1990...Je revois ces femmes tuées parce qu’elles voulaient continuer à exercer un métier, à sortir, à se faire belles... Je pense à Assia Djebbar, à Wassila Tamzali, à Maïssa Bey et à toutes ces féministes qui ont fui ce pays...Je ne sais pas s’il faut les féliciter pour avoir pris la bonne décision ou les maudire de nous avoir abandonnées... »
Voilà ce qu’on peut lire, entre cent messages, sur cette affaire de lynchage un soir d’Alger où, comme à l’ordinaire, le terrible ordinaire, dans la douceur renversante de la nuit, la violence des frustrations et la sauvagerie du regard sur la femme, se haïr semblait plus naturel que de s’aimer. Même à 20 ans. Surtout à 20 ans.
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