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Grave atteinte à la gravité en Algérie .

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    Grave atteinte à la gravité en Algérie


    Wikileaks vient de parler de l'Algérie. Il a dit mais sur la lune. Il a dit que Chekib Khellil est soupçonné d'être au cœur de la corruption de Sonatrach selon des pétroliers. Il a dit que Bouteflika vire vers le mystique. Wikileaks a dit aussi que la Kabylie est un gros cratère creusé par un météorite tombé du ciel selon le Pouvoir. Wikileaks a aussi dit que les Américains ne comprennent pas qui est Saïd Bouteflika. Un frère du Président ? Le futur Président ou le frère de personne ? Même les Français, disent les Américains, n'arrivent pas à comprendre. Comme nous et les gens qui aiment aller avec le vent et qui ne savent où adhérer à son parti fantôme. Wikileaks dit aussi que Bouteflika cherche Dieu et que personne ne cherche à remplacer le gaz qui va s'épuiser dans quelques années. Wikileaks a parlé mais inutilement. Cela n'a provoqué ni enquête, ni débat, ni polémique, ni interpellation. La raison ? Il ne s'agit pas d'un projet de parking à étages dans le bois des Pins. Ni du CNCD, ni d'une marche pour la démocratie réelle et pas celle des cheveux, ni d'une menace contre le Pouvoir.

    Pour que des révélations ne soient pas un bavardage international, il faut qu'il existe une opinion qui pèse plus qu'une tasse de café, des mécanismes d'amplification et un système causal qui lie les actes et leurs sens. Cela n'existe pas chez nous, pays où même la gravité ne fonctionne pas : vous prenez un Chakib Khellil, vous le lancez dans les airs et que se passe-t-il ? Rien. Il ne tombe pas. Même des années après le lancement. Donc, la causalité est en panne et personne ne peut faire le lien entre la main et le prénom. Vous dénoncez un crime ? Vous le faites dans un milieu clos, sans air ni poumons, dans un pays assourdi et dans une langue qui retombe comme des feuilles dès qu'elle sort de votre bouche. Il ne se passe rien. Personne n'est jugé. Cette panne de la logique touche les chiffres aussi : prenez un gros chiffre de détournement et parlez-en aux Algériens. Il ne se passe rien. Le détournement existe mais son chiffre n'a pas de sens, ne peut provoquer ni le scandale ni le frémissement de la patte de la grenouille. Rien. Il y a quelque chose de brisé entre l'oreille et la signification. Khellil peut sourire quand on va lui parler des révélations de Wikileaks : il sait qu'il n'y a que deux choses qui sont continues dans l'espace-temps algérien : le pipeline et la transmission de la présidence d'une main à une autre. Le reste est du morse ou des cycles ou des bipages. C'est l'univers au ralenti, où le geste est lent, le pied engourdi, le corps sans os, la parole en stalactite et où on ne peut accuser personne sauf soi-même. Il n'y a pas de liens en Algérie entre le poids et la chute, le peuple et chacun, la responsabilité et la justice. C'est la meilleure formule pour assurer l'impunité sans fin : casser la relation entre la cause et l'effet jusqu'à dans le cerveau. C'est fait.

    Et pour le reste ? C'est le Pouvoir lui-même qui s'amuse à fabriquer des liens ludiques. Jugez-en : pendant que des Algérois sont logés hors d'Alger, des membres de la famille de Khadafi seraient hébergés à Club des Pins.





    par Kamel Daoud
    Le Quotidien d'Oran .
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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