Annonce

Réduire
Aucune annonce.

L'aventure libyenne ne fait que commencer

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • L'aventure libyenne ne fait que commencer

    Après la victoire des rebelles et de la diplomatie française, se pose la question de l'après-Kadhafi. L'islamisation et la dispersion des armes inquiètent les pays encore engagés sur le terrain.

    Il est bien évident que les acclamations de Benghazi ne feront pas taire les critiques contre Nicolas Sarkozy. A l'instar de presque tous ses prédécesseurs depuis 1958, c'est pourtant dans sa politique extérieure qu'il a sans doute le mieux réussi - sachant qu'il a peu à en attendre en retour. Même si l'on peut dire que Kadhafi aura eu la peau dure et qu'il y a beaucoup à reconstruire, la Libye est entrée dans une nouvelle ère - à laquelle le président français a contribué de manière tout à fait décisive. Le pays ne s'engage certes pas dans la voie des démocraties européennes, mais personne de sérieux ne s'en étonnera: les adeptes du "Sarko bashing" perdent tout crédit en découvrant subitement les fractures - personnelles, tribales ou idéologiques - au sein du CNT (Conseil national de transition).

    Qui pouvait espérer une assemblée de notables adeptes du consensus? Notons surtout qu'après quatre décennies de stagnation les Libyens ne sont plus coupés du reste du monde, mais au centre de tous les regards. C'est en soi historique et, quoi qu'on en dise, cela marque le rétablissement régional d'une France qui a, autant que les autres nations (mais avec davantage d'implication, donc de responsabilité), manqué le démarrage du printemps arabe.

    Plus solides, en revanche, sont les réserves qu'entraîne l'"après-guerre" et plus inquiétants les risques qui se dessinent à l'horizon africain. Sur le plan interne, la Libye va servir de terrain d'observation d'une situation post dictatoriale; sur le plan externe, l'extension du désordre menace le Sahel, déjà propice aux guérillas transfrontalières.

    Risque d'islamisation

    En annonçant, le lundi 12 septembre, quelques jours avant la visite de Nicolas Sarkozy et de David Cameron en Libye, que la charia sera "la source principale de la législation", le président du CNT (Conseil national de transition), Moustapha Abdeljalil, n'a fait que confirmer ce que certains redoutent depuis le début du soulèvement - mais qui constituait un des arguments de la tyrannie de Kadhafi -, à savoir l'islamisation du pouvoir. A cette crainte on peut répondre qu'il ne fait guère de doute que les islamistes progresseront dès qu'un régime arabe s'effondrera. La vraie question n'est donc pas de se demander si ces derniers vont avancer, mais de savoir s'ils vont se transformer en avançant. En d'autres termes, suivront-ils un schéma salafiste, ou plutôt l'exemple turc? La différence est de taille et engage l'avenir; pour éviter le pire, l'Occident ne peut pas se désengager complètement.

    Le CNT est confronté à une situation très complexe: dans son ensemble, le peuple libyen, peu urbanisé, reste très conservateur, comme l'a montré l'absence de visages féminins dans la rébellion. Mais, en raison de la présence des Occidentaux aux côtés du CNT, le cas libyen va offrir aux observateurs une grande première. Si l'islamisme devait faire son nid à Tripoli ou à Benghazi, ce serait sous le regard des Européens, qui devraient alors choisir une attitude cohérente; si, en revanche, le fondamentalisme s'atténue à la faveur de l'alternance, un point de jonction inédit sera trouvé.

    Reste la question du Sahel, où, sous l'effet de la dispersion des forces de Kadhafi, les armes (voire les missiles) circulent comme jamais. Du Tchad à la Mauritanie, une zone immense et incontrôlable, "Triangle des Bermudes" minéral, va-t-elle se trouver parcourue par de nouveaux trafics et par de nouvelles bandes? Propre à la Libye, cette dimension géopolitique, est pour l'heure l'inconnue la plus préoccupante - elle obsède notamment les Algériens - et la donnée qui pourrait justifier, à terme, l'installation d'une présence militaire en plein désert. Or on sait ce qu'il en fut de tous les Fort Saganne. L'aventure libyenne, comme les révolutions arabes, ne fait que commencer.

    L'Express
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
Chargement...
X