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Algérie : télévisions privées, et après?

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  • Algérie : télévisions privées, et après?

    L’option d’ouverture du secteur de l’audiovisuel à l’investissement privé annoncée lors du conseil des ministres des 10 et 11 Septembre est pour le moins surprenante. Elle constitue une évolution majeure par rapport à ce qui était arrêté dans le discours à la Nation du chef de l’Etat. A ce moment-là nous avons eu droit à l’annonce que « le paysage audiovisuel public sera renforcé par la création de chaînes thématiques spécialisées et ouvertes à toutes les opinions, dans leur diversité. »[i].Décision vite relayée par des personnalités de l’alliance présidentielle aux lendemains du 15 Avril pour qui l’ouverture de ce secteur à l’initiative privé est totalement exclue.


    Dans l’ignorance des « conclusions » des consultations-alibi de la commission Ben Salah, il nous est impossible de connaitre le cheminement de ce changement radical de position. Le pouvoir s’est-il rangé à l’avis largement présent dans la société civil, ou bien sa décision répond-t-elle à d’autres impératifs?


    En faisant abstraction du point de vue doctrinal des démocrates auquel le pouvoir est demeuré constamment sourd, il restera un point de vue particulier qui pourrait être celui qui a infléchi la décision sur cette question névralgique. Exprimé par des enseignants de sciences politiques et de communication de l’université d’Alger, ce point de vue identifie la fermeture du champ médiatique comme une vulnérabilité majeure de l’Algérie[ii]. Cette approche semble avoir trouvé échos au sein de l’institution militaire ; puisque, El Djaich, organe de l’ANP, la reprend dans un commentaire du mois d’Août passé et souligne qu’« à la faveur des nouvelles technologies de l’information et de la communication, il devient de plus en plus aisé de faire le plein usage de cette arme dont l’objectif consiste avant tout à justifier l’acte de guerre, à annihiler toute velléité de résistance chez l’ennemi en tentant de fragiliser son front interne, à mobiliser les opinions contre l’Etat ciblé et à influer directement sur le cours des événements, souvent avant même l’engagement de moyens militaires sur le terrain. (…) »[iii]. Cette prise de conscience exprimée au cœur même de l’Etat expliquera raisonnablement le revirement de position du triumvirat présidentiel.



    N’en demeure que si l’alliance présidentielle a adopté cette approche patriotique, le doute perdure pour ce qui est de sa capacité à l’assimiler et à l’intégrer. Les ministres conseillers ont vite fait de monter au créneau pour re-légitimer, en parfaits gardiens de la morale (sic) et de l’intérêt national (re-sic), leurs visions tutélaires sur la société, et multiplier les avertissements au sujet de « l’atteinte à la vie » privé, ou à « l’intérêt supérieur de la nation ». Comme si le débat qu’ouvre ce ralliement du pouvoir à cette revendication démocratique pouvait se limiter à cela ! Ou bien qu’il suffit, comme le fait le ministre de la communication, de se délester du passif de l’entv pour être dans le coup. Ces réactions ataviques d’hommes du système, conjuguées aux intimidations occultes qui ont visé le groupe El Watan, montrent bien qu’au-delà de l’intention exprimée tout reste à conquérir.



    L’annonce de l’ouverture au privé du secteur de l’audiovisuel a rencontré la disponibilité d’un certain nombre d’hommes d’affaires qui manifestement n’ont pas été pris au dépourvu. Certains se disent en mesure de déposer dès à présent des dossiers finalisés de chaines de télévision, et de radios. La motivation de ces investisseurs est en elle-même un gage de réussite pour la nouvelle option. S’il est dangereux de la diaboliser, il serait tout aussi néfaste de l’acclamer avec candeur. D’où l’importance de l’encadrement de cette ouverture. Mais qui va décider des limites de ce cadre ? Qui a suffisamment de crédit pour être légitime dans cette mission ? le déficit en crédibilité ne manquera pas d’entacher cette initiative et de la miner de l’intérieur.



    L’ouverture de ce secteur névralgique va-t-elle être une ouverture de la société sur elle-même ? Une occasion pour nous de nous reconstruire ? Va-t-elle produire un effet de dynamisation de secteurs jusque-là délaissés et léthargiques, ceux de la production culturelle, du cinéma, du théâtre, du spectacle en général ? Sera-t-elle l’occasion de prendre conscience que la question des langues se règlera par une réelle prise en charge dans la vie, et surtout pas par une sanctuarisation bureaucratique aussi dangereuse qu’inefficiente ? Le débat public, politique ou de société, accédera-t-il à une nouvelle qualité qui le mettra en phase avec la société et le rendra efficient, crédible et digne d’intérêt aux yeux des algériens ? L’ouverture des médias lourds à l’initiative privée est sans conteste une grande promesse sur l’ensemble de ces questions.



    Mais, l’expérience de par ailleurs souligne l’importance d’un secteur de communication de service (mission) public dans ce secteur. Les effets pervers de la recherche de l’audimat, ou le poids naturel de la recherche du gain, auront tendance à s’exprimer au détriment de cette mission de service public. Là se trouve l’importance d’une réforme profonde des télévisions du pouvoir, pour les amener à devenir des télévisions publiques au service de la société et de la nation.



    Tous les effets bénéfiques attendus d’un secteur audio-visuel libéré des tutelles et ouvert à la concurrence ne se réaliseront qu’à la condition d’une totale liberté de la presse. Le journaliste dans l’exercice de sa mission (qui s’assimile finalement à un engagement patriotique de défense de la société, et en devient – n’en déplaise à Belkhadem et consort - logiquement plus honorable) doit être protégé des abus des pouvoirs de l’autorité ou de l’argent. Sans réel accès aux sources de l’information, sans liberté de son traitement, les nouvelles chaines seront, selon le cas, des boites à musiques, des mosquées cathodiques, ou des miroirs à Bled Mikey.

    Disons-le avec lucidité sur cette question tout est jouable, mais tout reste à jouer.
    Si tu parles, tu meurs. Si tu te tais, tu meurs. Alors, dis et meurs

  • #2
    on va juste passer d'un moyen de propagande ancien et dépassé à un autre plus dans l'air du temps et plus inique. Il y a deux manières de faire avaler une pilule amère à un enfant: lui donner telle quelle et il la refusera, ou la diluer dans un verre de jus de fruit coloré et sucré. La parabole de l'enfant prend tout son sens quand on analyse les procédés utilsés par les hommes de médias.
    Ceux qui ont mécru, n'ont-ils pas vu que les cieux et la terre formaient une masse compacte? Ensuite Nous les avons séparés et fait de l'eau toute chose vivante. Ne croiront-ils donc pas? S21 V30

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