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Les grands chantiers de la transition démocratique

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  • Les grands chantiers de la transition démocratique

    Il ne s’agit plus de remplacer un mauvais zaïm par un bon zaïm, comme c’est arrivé en Tunisie en 1987, mais de ne pas avoir de zaïm
    du tout et remplacer les hommes par les institutions.


    Un débat passionnant devait clôturer la dernière séance de samedi. Les intervenants, sur l’Egypte et le Maroc, ont eu à répondre à une multitude de questions au sujet des différents aspects de la transition démocratique dans ces deux pays et éclairer davantage l’assistance. L’une des questions, interpellant l’ensemble de la tribune, était liée à l’archétype du leader charismatique. L’historien Omar Carlier s’est interrogé si cette notion, fondamentale dans cette région du monde, n’était pas devenue obsolète, à quoi l’historienne Sophie Bessis a répliqué en affirmant que si vraiment il y a eu révolutions dans le monde arabe aujourd’hui, elles ont été marquées par un fait : c’est que les populations de cette région donnent congé à la figure du zaïm.

    Il ne s’agit plus de remplacer un mauvais zaïm par un bon zaïm, comme c’est arrivé en Tunisie en 1987, mais de ne pas avoir de zaïm du tout et remplacer les hommes par les institutions. Idée d’ailleurs partagée par les autres conférenciers.Tewfik Aclimandos, chercheur invité du Collège de France, a été interpellé, quant à lui, sur plusieurs questions relatives à ce qui se passe en Egypte, notamment concernant le rapprochement entre les directions de l’armée et les Frères musulmans au lendemain de la révolution du 25 janvier.

    L’historien expliquera que du temps de Moubarak, une tentative d’infiltration des services par les Frères musulmans était considérée comme un casus belli, c’est-à-dire un fait capable de déclencher une guerre. Après la répression, poursuit Aclimandos, il y a eu un arrangement qui a vécu aujourd’hui, à cause des crocs-en-jambe faits essentiellement du côté des islamistes, et aussi parce que l’armée a compris qu’il ne suffisait pas de négocier avec eux pour faire taire la rue, et enfin qu’ils étaient devenus trop prisonniers des salafistes. «Maintenant, nous sommes au stade des échanges de menaces», soulignera-t-il.

    A une autre question posée par Mohammed Hachemaoui sur le rôle de l’armée comme meneur ou arbitre du pouvoir, Aclimandos croit que celle-ci veut établir une démocratie en imposant un nombre de conditions aux candidats au pouvoir, notamment concernant le rapport avec Israël et l’Etat civil. Aujourd’hui, le rôle que s’attribue l’armée de garant constitutionnel de l’Etat civil est refusé par les islamistes et aussi par les libéraux, qui exigent de prolonger la transition à 4 ans, selon le conférencier.

    D’autres questions liées au rôle de la femme dans ces révolutions ont été soulevées, notamment par l’universitaire algérienne Khaoula Taleb Ibrahimi et la moudjahida Zelikha Benkaddour. Pour Sophie Bessis, on ne peut parler de démocratie sans mettre en avant la question d’égalité des sexes. Au contraire des révolutions monogames du 19, soutient-elle, nous avons eu cette fois des révolutions mixtes, à l’image de la Tunisie, bien que même ici, où le statut des femmes est le plus avancé dans le monde arabe, le processus de transition souffre d’une frilosité concernant la participation féminine dans les instances de transition. Constat partagé par Tewfik Aclimandos, pour qui, la libération des femmes est irréversible et si aujourd’hui les acquis dérangent, les femmes peuvent compter sur de nouveaux alliés.

    La salle s’interrogera aussi sur la validité du concept d’exception marocaine, à quoi la politologue Khadidja Mohsen a répondu qu’il ne s’agit là que d’une notion instrumentalisée par le pouvoir, sans doute dans le but d’éviter la contagion révolutionnaire. Pour elle, le Maroc, comme les autres pays, est interpellé par ses jeunes qui ont les mêmes demandes et aspirations.

    René Galissot reprochera aux deux intervenants sur le Maroc de n’avoir pas utilisé les mots de makhzen, Sahara, associations, ou encore le mot jeune, qui, pour lui, sont des concepts-clés pour la compréhension de la situation. A la fin des échanges, le journaliste Aboubakr Jemaï stigmatisa l’élite française pour son rôle réactionnaire vis-à-vis de la question de démocratie au Maroc : «Ce qui se passe en Tunisie ou en Afrique subsaharienne c’est de la série B, comparé à la corruption des élites françaises au Maroc. En tant que démocrate, je considère que c’est un vrai problème, et je n’accepte pas que des gens de facture importante, capables de disserter sur Habermas, deviennent débiles quand on vient à parler de nous et de l’Islam. Il suffit de voir ce qui s’écrit sur le Maroc, dans l’Hexagone, cette saloperie est indigne d’un pays comme la France.»

    Concernant le Sahara occidental, «je croyais qu’il ne faisait pas partie de l’équation des révolutions arabes, sinon, je suis convaincu que le Sahara est marocain, seulement, je ne peux pas forcer quelqu’un à rester avec moi», a-t-il encore déclaré à l’assistance.

    Nouri Nesrouche
    El Watan
    Pas à la tique ..
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