Des valises d'argent en Libye ?
Plus de 11 millions d'euros auraient été versés par le CNT pour s'assurer le ralliement de la ville pro-Kadhafi de Sabha.
Le nouveau ministre libyen de l'Économie, Ali al-Tarhouni, aurait livré à la ville kadhafiste de Sabha 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros). © Tara Todras-Whitehill / Sipa
La Libye tient-elle son affaire Bourgi ? Ce sont en effet 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros) qui ont été livrées mardi par le gouvernement de transition libyen à la ville de Sabha, l'un des derniers bastions fidèles à Muammar Kadhafi. D'après l'Associated Press, qui dévoile l'affaire, le but de la manoeuvre est clair : rallier le soutien des derniers combattants fidèles à l'ex-dictateur déchu. Pour ce faire, c'est le ministre du Pétrole et des Finances en personne, Ali al-Tarhouni, qui a accompagné la livraison des 20 mallettes de 78 kilos chacune, remplies de billets de 20 dinars. Puis les valises ont pris l'avion et c'était là le premier vol à atterrir dans cette ville du sud du pays, depuis mars et la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne par l'Otan.
Interrogé par Le Point, le nouvel ambassadeur de Libye en France ne confirme pas la nouvelle. "S'il y a eu un transfert d'argent, celui-ci a dû servir au paiement des fonctionnaires qui n'ont touché aucun salaire depuis des mois", explique Mansour Saif al-Nasr. Il affirme en outre que, contrairement aux dernières informations, la ville de Sabha a été entièrement libérée. L'ambassadeur ajoute que "des versements d'argent ont déjà eu lieu dans toutes les villes du Djebel Nefoussa (ouest de la Libye), où chaque famille a reçu une certaine somme pour pouvoir effectuer ses achats".
"Pas surprenant" (un ex-diplomate)
Une explication qui ne convainc pas entièrement Patrick Haimzadeh*, diplomate en Libye de 2001 à 2004, pour qui la ville de Sabha est loin d'être acquise au nouveau gouvernement libyen. "Si la distribution d'argent était généralisée, pourquoi le Conseil national de transition (CNT) n'a-t-il pas communiqué sur les précédentes opérations ? Pourquoi le ministre en personne s'est-il déplacé ?" s'interroge l'ancien diplomate français.
Selon ce dernier, une tentative de monnayer le soutien des dernières poches pro-Kadhafi ne serait "pas surprenante" et prouverait que le CNT "n'a pas les moyens de l'emporter sur tous les fronts". Pendant ce temps, les combats font toujours rage à Bani Walid et à Syrte (nord), où plus de dix membres des forces régulières ont été tués mardi. Seulement, le gouvernement provisoire affirme, pour sa part, que les deux dernières villes aux mains des forces kadhafistes seraient sur le point de tomber. Ainsi, ses combattants ont annoncé mardi s'être emparés du port de Syrte et se préparaient mercredi à pénétrer à l'intérieur de Bani Walid, aidés par les frappes intensives de l'Otan.
Corruption ?
D'un point de vue légal, le fait de payer des personnes opposées aux autorités légitimes pour obtenir leur reddition est "assimilable à une forme de corruption", estime Daniel Lebègue, président de Transparence International France. Celui-ci justifie néanmoins la méthode "inhabituelle" des valises d'argent en arguant: "Les infrastructures et les services publics du pays étant à terre, les nouvelles autorités libyennes ont beaucoup de mal à rétablir les circuits classiques de paiement des fonctionnaires."
Désespérément en manque de liquidités il y a à peine un mois, les nouvelles autorités du pays se retrouvent aujourd'hui à la tête d'une gigantesque manne financière potentielle de 185 milliards de dollars de fonds publics, hérités de la Libye de Kadhafi. À moins qu'il ne s'agisse du milliard de dinars (600 millions d'euros) que l'ancien dictateur avait en effet demandé à Londres d'imprimer en février. Cette dernière information est confirmée par l'ambassadeur. Cette somme avait été bloquée in extremis par un gel des avoirs libyens à l'étranger et commence à arriver en Libye.
(*) Auteur du livre Au coeur de la Libye de Kadhafi, édition JC Lattès
La Libye tient-elle son affaire Bourgi ? Ce sont en effet 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros) qui ont été livrées mardi par le gouvernement de transition libyen à la ville de Sabha, l'un des derniers bastions fidèles à Muammar Kadhafi. D'après l'Associated Press, qui dévoile l'affaire, le but de la manoeuvre est clair : rallier le soutien des derniers combattants fidèles à l'ex-dictateur déchu. Pour ce faire, c'est le ministre du Pétrole et des Finances en personne, Ali al-Tarhouni, qui a accompagné la livraison des 20 mallettes de 78 kilos chacune, remplies de billets de 20 dinars. Puis les valises ont pris l'avion et c'était là le premier vol à atterrir dans cette ville du sud du pays, depuis mars et la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne par l'Otan.
Interrogé par Le Point le nouvel ambassadeur de Libye en France ne confirme pas la nouvelle. "S'il y a eu un transfert d'argent, celui-ci a dû servir au paiement des fonctionnaires qui n'ont touché aucun salaire depuis des mois", explique Mansour Saif al-Nasr. Il affirme en outre que, contrairement aux dernières informations, la ville de Sabha a été entièrement libérée. L'ambassadeur ajoute que "des versements d'argent ont déjà eu lieu dans toutes les villes du Djebel Nefoussa (ouest de la Libye), où chaque famille a reçu une certaine somme pour pouvoir effectuer ses achats".
"Pas surprenant" (un ex-diplomate)
Une explication qui ne convainc pas entièrement Patrick Haimzadeh*, diplomate en Libye de 2001 à 2004, pour qui la ville de Sabha est loin d'être acquise au nouveau gouvernement libyen. "Si la distribution d'argent était généralisée, pourquoi le Conseil national de transition (CNT) n'a-t-il pas communiqué sur les précédentes opérations ? Pourquoi le ministre en personne s'est-il déplacé ?" s'interroge l'ancien diplomate français.
Selon ce dernier, une tentative de monnayer le soutien des dernières poches pro-Kadhafi ne serait "pas surprenante" et prouverait que le CNT "n'a pas les moyens de l'emporter sur tous les fronts". Pendant ce temps, les combats font toujours rage à Bani Walid et à Syrte (nord), où plus de dix membres des forces régulières ont été tués mardi. Seulement, le gouvernement provisoire affirme, pour sa part, que les deux dernières villes aux mains des forces kadhafistes seraient sur le point de tomber. Ainsi, ses combattants ont annoncé mardi s'être emparés du port de Syrte et se préparaient mercredi à pénétrer à l'intérieur de Bani Walid, aidés par les frappes intensives de l'Otan.
Corruption ?
D'un point de vue légal, le fait de payer des personnes opposées aux autorités légitimes pour obtenir leur reddition est "assimilable à une forme de corruption", estime Daniel Lebègue, président de Transparence International France. Celui-ci justifie néanmoins la méthode "inhabituelle" des valises d'argent en arguant: "Les infrastructures et les services publics du pays étant à terre, les nouvelles autorités libyennes ont beaucoup de mal à rétablir les circuits classiques de paiement des fonctionnaires."
Désespérément en manque de liquidités il y a à peine un mois, les nouvelles autorités du pays se retrouvent aujourd'hui à la tête d'une gigantesque manne financière potentielle de 185 milliards de dollars de fonds publics, hérités de la Libye de Kadhafi. À moins qu'il ne s'agisse du milliard de dinars (600 millions d'euros) que l'ancien dictateur avait en effet demandé à Londres d'imprimer en février. Cette dernière information est confirmée par l'ambassadeur. Cette somme avait été bloquée in extremis par un gel des avoirs libyens à l'étranger et commence à arriver en Libye.
(*) Auteur du livre Au coeur de la Libye de Kadhafi, édition JC Lattès
Par Armin Arefi , Le Point
Plus de 11 millions d'euros auraient été versés par le CNT pour s'assurer le ralliement de la ville pro-Kadhafi de Sabha.
Le nouveau ministre libyen de l'Économie, Ali al-Tarhouni, aurait livré à la ville kadhafiste de Sabha 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros). © Tara Todras-Whitehill / Sipa
La Libye tient-elle son affaire Bourgi ? Ce sont en effet 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros) qui ont été livrées mardi par le gouvernement de transition libyen à la ville de Sabha, l'un des derniers bastions fidèles à Muammar Kadhafi. D'après l'Associated Press, qui dévoile l'affaire, le but de la manoeuvre est clair : rallier le soutien des derniers combattants fidèles à l'ex-dictateur déchu. Pour ce faire, c'est le ministre du Pétrole et des Finances en personne, Ali al-Tarhouni, qui a accompagné la livraison des 20 mallettes de 78 kilos chacune, remplies de billets de 20 dinars. Puis les valises ont pris l'avion et c'était là le premier vol à atterrir dans cette ville du sud du pays, depuis mars et la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne par l'Otan.
Interrogé par Le Point, le nouvel ambassadeur de Libye en France ne confirme pas la nouvelle. "S'il y a eu un transfert d'argent, celui-ci a dû servir au paiement des fonctionnaires qui n'ont touché aucun salaire depuis des mois", explique Mansour Saif al-Nasr. Il affirme en outre que, contrairement aux dernières informations, la ville de Sabha a été entièrement libérée. L'ambassadeur ajoute que "des versements d'argent ont déjà eu lieu dans toutes les villes du Djebel Nefoussa (ouest de la Libye), où chaque famille a reçu une certaine somme pour pouvoir effectuer ses achats".
"Pas surprenant" (un ex-diplomate)
Une explication qui ne convainc pas entièrement Patrick Haimzadeh*, diplomate en Libye de 2001 à 2004, pour qui la ville de Sabha est loin d'être acquise au nouveau gouvernement libyen. "Si la distribution d'argent était généralisée, pourquoi le Conseil national de transition (CNT) n'a-t-il pas communiqué sur les précédentes opérations ? Pourquoi le ministre en personne s'est-il déplacé ?" s'interroge l'ancien diplomate français.
Selon ce dernier, une tentative de monnayer le soutien des dernières poches pro-Kadhafi ne serait "pas surprenante" et prouverait que le CNT "n'a pas les moyens de l'emporter sur tous les fronts". Pendant ce temps, les combats font toujours rage à Bani Walid et à Syrte (nord), où plus de dix membres des forces régulières ont été tués mardi. Seulement, le gouvernement provisoire affirme, pour sa part, que les deux dernières villes aux mains des forces kadhafistes seraient sur le point de tomber. Ainsi, ses combattants ont annoncé mardi s'être emparés du port de Syrte et se préparaient mercredi à pénétrer à l'intérieur de Bani Walid, aidés par les frappes intensives de l'Otan.
Corruption ?
D'un point de vue légal, le fait de payer des personnes opposées aux autorités légitimes pour obtenir leur reddition est "assimilable à une forme de corruption", estime Daniel Lebègue, président de Transparence International France. Celui-ci justifie néanmoins la méthode "inhabituelle" des valises d'argent en arguant: "Les infrastructures et les services publics du pays étant à terre, les nouvelles autorités libyennes ont beaucoup de mal à rétablir les circuits classiques de paiement des fonctionnaires."
Désespérément en manque de liquidités il y a à peine un mois, les nouvelles autorités du pays se retrouvent aujourd'hui à la tête d'une gigantesque manne financière potentielle de 185 milliards de dollars de fonds publics, hérités de la Libye de Kadhafi. À moins qu'il ne s'agisse du milliard de dinars (600 millions d'euros) que l'ancien dictateur avait en effet demandé à Londres d'imprimer en février. Cette dernière information est confirmée par l'ambassadeur. Cette somme avait été bloquée in extremis par un gel des avoirs libyens à l'étranger et commence à arriver en Libye.
(*) Auteur du livre Au coeur de la Libye de Kadhafi, édition JC Lattès
La Libye tient-elle son affaire Bourgi ? Ce sont en effet 20 valises contenant un montant total de 20 millions de dinars (11,7 millions d'euros) qui ont été livrées mardi par le gouvernement de transition libyen à la ville de Sabha, l'un des derniers bastions fidèles à Muammar Kadhafi. D'après l'Associated Press, qui dévoile l'affaire, le but de la manoeuvre est clair : rallier le soutien des derniers combattants fidèles à l'ex-dictateur déchu. Pour ce faire, c'est le ministre du Pétrole et des Finances en personne, Ali al-Tarhouni, qui a accompagné la livraison des 20 mallettes de 78 kilos chacune, remplies de billets de 20 dinars. Puis les valises ont pris l'avion et c'était là le premier vol à atterrir dans cette ville du sud du pays, depuis mars et la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne par l'Otan.
Interrogé par Le Point le nouvel ambassadeur de Libye en France ne confirme pas la nouvelle. "S'il y a eu un transfert d'argent, celui-ci a dû servir au paiement des fonctionnaires qui n'ont touché aucun salaire depuis des mois", explique Mansour Saif al-Nasr. Il affirme en outre que, contrairement aux dernières informations, la ville de Sabha a été entièrement libérée. L'ambassadeur ajoute que "des versements d'argent ont déjà eu lieu dans toutes les villes du Djebel Nefoussa (ouest de la Libye), où chaque famille a reçu une certaine somme pour pouvoir effectuer ses achats".
"Pas surprenant" (un ex-diplomate)
Une explication qui ne convainc pas entièrement Patrick Haimzadeh*, diplomate en Libye de 2001 à 2004, pour qui la ville de Sabha est loin d'être acquise au nouveau gouvernement libyen. "Si la distribution d'argent était généralisée, pourquoi le Conseil national de transition (CNT) n'a-t-il pas communiqué sur les précédentes opérations ? Pourquoi le ministre en personne s'est-il déplacé ?" s'interroge l'ancien diplomate français.
Selon ce dernier, une tentative de monnayer le soutien des dernières poches pro-Kadhafi ne serait "pas surprenante" et prouverait que le CNT "n'a pas les moyens de l'emporter sur tous les fronts". Pendant ce temps, les combats font toujours rage à Bani Walid et à Syrte (nord), où plus de dix membres des forces régulières ont été tués mardi. Seulement, le gouvernement provisoire affirme, pour sa part, que les deux dernières villes aux mains des forces kadhafistes seraient sur le point de tomber. Ainsi, ses combattants ont annoncé mardi s'être emparés du port de Syrte et se préparaient mercredi à pénétrer à l'intérieur de Bani Walid, aidés par les frappes intensives de l'Otan.
Corruption ?
D'un point de vue légal, le fait de payer des personnes opposées aux autorités légitimes pour obtenir leur reddition est "assimilable à une forme de corruption", estime Daniel Lebègue, président de Transparence International France. Celui-ci justifie néanmoins la méthode "inhabituelle" des valises d'argent en arguant: "Les infrastructures et les services publics du pays étant à terre, les nouvelles autorités libyennes ont beaucoup de mal à rétablir les circuits classiques de paiement des fonctionnaires."
Désespérément en manque de liquidités il y a à peine un mois, les nouvelles autorités du pays se retrouvent aujourd'hui à la tête d'une gigantesque manne financière potentielle de 185 milliards de dollars de fonds publics, hérités de la Libye de Kadhafi. À moins qu'il ne s'agisse du milliard de dinars (600 millions d'euros) que l'ancien dictateur avait en effet demandé à Londres d'imprimer en février. Cette dernière information est confirmée par l'ambassadeur. Cette somme avait été bloquée in extremis par un gel des avoirs libyens à l'étranger et commence à arriver en Libye.
(*) Auteur du livre Au coeur de la Libye de Kadhafi, édition JC Lattès
Par Armin Arefi , Le Point
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