Le Japon a la réputation d’être l’un des pays les plus sûrs de la planète et il peut même prétendre à la première place de ce podium si on le compare aux autres pays de l’OCDE. Certes de nombreuses affaires sanglantes ont entaché cette victoire telles l’affaire Sakakibara en 1997 à Kôbe où la tête d’un collégien de 11 ans, décapitée par un garçon de 14 ans, fut retrouvée sur le portail de son école, ou plus récemment la tuerie de Akihabara en 2008 qui a couté la vie à 8 passants dans les rues de ce célèbre quartier. Cependant aussi impressionnants soient ces évènements, le nombre de cas de petite criminalité reste infime en comparaison à ceux des pays occidentaux.
Néanmoins, il existe un problème de criminalité récurrent au Japon qui ne semble vouloir se solutionner : celui des agressions diverses sur le genre féminin. En effet, dans ce domaine, le Japon peut honteusement s’enorgueillir d’être champion dans cette catégorie.
Ces agressions se classent en diverses catégories.
Outre le harcèlement sexuel dans la sphère professionnelle, le Japon est surtout connu pour ses cas d’attouchements dans les lieux publics et plus précisément dans le train de banlieue. Ce phénomène est si rependu et en augmentation qu’il existe un terme pour le désigner : chikan (痴漢). Le premier caractère désigne la bêtise tandis que le second signifie le genre mâle. Une troisième catégorie, plus insolite que les deux premières mais non moins grave, est l’activité consistant à harceler et traquer une personne dans les lieux publics et jusque dans la sphère du privé et dont certains cas se sont soldés par le meurtre de la victime. Cette activité s’appelle au Japon « stôkâ » (ストーカー) de l’anglais « stalker ».
Pour le seul cas du chikan, la situation est préoccupante.
Il faut d’abord avoir à l’esprit que le Japon concentre la quasi totalité de sa population, soit 127 millions d’habitants, sur un territoire grand comme le Benelux (oui, peu de plaines, énormément de montagnes quasi sauvages!) et Tokyo, la plus grande mégalopole du monde, s’étend sur une surface incroyablement vaste. Pourtant, le système routier est loin d’être roi dans les agglomérations nippones. A contrario, le réseau ferré japonais est ultra-moderneset incroyablement bien organisé et les trains restent le moyen de transport incontournable pour la population japonaise qui, lors des rushs, n’ont rien à envier aux sardines en boites.
Quoi qu’il en soit, c’est dans ces trains bondés que les pervers japonais sévissent le plus.
L’ambiance dans les trains au Japon est assez spéciale. Tout le monde s’évite du regard et la plus part des voyageurs sont trop occupés à tapoter sur leur portable, lire, ou récupérer quelques minutes de sommeil pour s’occuper de la vie de leur voisin. Par ailleurs, il est consternant de constater que même lorsqu’un évènement inhabituel se produit (une dispute, un bébé qui se met à hurler, un homme ayant trop bu se mettant à geindre…), pas une personne ou presque ne se retournera pour examiner l’insolite scène. Et si un individu se met à toucher directement une victime, il y a de bonnes chances pour que personne ne s ‘en aperçoive. Il est fâcheux aussi de constater que dans bon nombres de cas de chikan, la victime n’osera demander de l’aide à un tiers (honte) ni même tenter quoi que ce soit (peur). Elle se laissera alors tripoter jusqu’à l’arrêt suivant, ce qui peut prendre un temps relativement long sur les lignes express de grandes banlieues.
Lors des 6 premiers mois de l’année 2009, 708 cas de chikan faisant l’œuvre de plainte ont été recensées mais il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg car un nombre effectif hautement supérieur ne fait pas l’œuvre de plainte. Et ce nombre ne fait qu’augmenter.
Une étude réalisée dans la ville de Hiroshima montre que 36,9 % des agresseurs ont entre 30 et 39 ans. 21,7 % ont entre 20 et 29 ans et 20,6 % entrent dans la catégorie des 40-49 ans. La loi stipule qu’ils encourent une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans ou une amende allant jusqu’à 50.000 yens.
Le phénomène est allé encore plus loin et les agresseurs deviennent organisés. Aussi, des réunions s’organisant sur le net permettent aux criminels de se donner rendez-vous dans un lieu à une heure précise, afin d’opérer en bande et ainsi de toucher leur victimes à l’abri des regards, entourés et cachés par leurs complices.
Le train est aussi le lieu favori de ceux qui prennent des photos sous les jupes des lycéennes en uniforme scolaire ou des jeunes employées. Les plus experts en électronique useront d’inventivité pour cacher l’appareil photo dans une mallette ou un sac, les autres se contenterons d’utiliser leur téléphone portable. Ce phénomène est si rependu que la société Apple a décidé de ne pas incorporer sur ses iPhone d’option silencieuse au déclenchement de l’appareil photo sur le marché japonais et de nombreuses compagnies de téléphones ont suivi cet exemple. Dernièrement, l’équipe olympique japonaise de natation a fait la une des scandales avec des photos prises par des appareils ayant une fonction infrarouge permettant de voir à travers les vêtements. Depuis 2004, les nageuses nippones sont équipées de maillots bloquant ce rayonnement et des entreprises ont même commercialisé ce tissu pour la gamme de leurs sous-vêtements grand publique.
Alors, qu’est-ce qui pousse un si grand nombre de Japonais à agir de la sorte ? Quelles en sont les causes.
Alors qu’il est si facile d’observer l’industrie du sexe dans la rue (présence de love hôtel, nudité sur les couverture de magazines dans les combini, présence de quartiers chaud), le sexe reste un sujet délicat et n’est que trop peu évoqué au sein de la famille et dans l’éducation. La communication entre les deux sexes est-elle insuffisante ? Notons dans tout les cas la difficulté pour les jeunes couples d’entretenir une relation simple et épanouie dans une société où la vie en concubinage sous le même toit ne se fait qu’après le mariage. La difficulté d’entretenir une intimité dans la vie post mariage est elle aussi réelle car le mari est accaparé en temps et en énergie par son travail et la femme n’endosse plus que son costume de mère à plein temps délaissant son rôle d’épouse et les plaisirs conjugaux qui vont de paire. Au Japon, 30 pourcents des couples mariés n’ont pas fait l’amour depuis plus d’un mois et rentrent dans la catégorie des « sex less ». Une autre étude faite sur une trentaine de pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique place le Japon dernier en nombre de relation sexuelle et en taux de satisfaction de l’acte.
Alors que le sexe « simple » et conventionnel devient difficile d’accès, les supports à caractère porno mettant en scène de véritables fantasmes malsain (manga, hentaï, vidéo, …), la présence de bars à thèmes où des hôtesses en mini jupe sans culottes se mettent à faire les soubrettes ou bien encore la prostitution de lycéennes et d’étudiantes dite « de confort matériel » (car elle a pour objectif l’achat de produit n’étant pas de première nécessité) se vulgarise et amène dans les mœurs l’idée d’un sexe fantasme, facile et bon marché.
En 1985 Le Japon a ratifié, la convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) mais la Division pour le Développement des Femmes (branche de L’ONU) s’inquiète de la banalisation de la violence sexuelle au Japon et ce n’est pas la présence en vente sur Amazon Japon d’un jeu vidéo dans lequel le but du jeu est de violer une mère et sa fille dans un train qui va rassurer (le jeu a été retiré il y a peu).
Toutefois, l’opinion publique se mobilise et les actions pour stopper les cas de chikan se multiplient.
Depuis 2001, des wagons entièrement réservés aux femmes pendant les heures de pointe sont disponibles dans les agglomérations de Tôkyô et d’Ôsaka.
De même, cette année, des annonces vocales dans les gares signalent, tel la RATP avec ses pickpockets, la présence de tripoteurs susceptibles d’agir sur la ligne. De plus, des policiers en civil et des brigades spéciales en uniformes sont déployées sur le réseau de Tôkyô.
Enfin -et c’est peut être là la nouvelle la plus réjouissante- de plus en plus de femmes osent crier « chikan » à la présence d’une main baladeuse. Et cette manifestation de lycéennes à la station Ikebukuro portant les écriteaux « l’attouchement est méprisable, ne le pardonnons pas ! » sera peut être à l’aube de changer l’image de la femme-objet que bien trop de Japonais entretiennent.
Par Antoine Legastelois
Néanmoins, il existe un problème de criminalité récurrent au Japon qui ne semble vouloir se solutionner : celui des agressions diverses sur le genre féminin. En effet, dans ce domaine, le Japon peut honteusement s’enorgueillir d’être champion dans cette catégorie.
Ces agressions se classent en diverses catégories.
Outre le harcèlement sexuel dans la sphère professionnelle, le Japon est surtout connu pour ses cas d’attouchements dans les lieux publics et plus précisément dans le train de banlieue. Ce phénomène est si rependu et en augmentation qu’il existe un terme pour le désigner : chikan (痴漢). Le premier caractère désigne la bêtise tandis que le second signifie le genre mâle. Une troisième catégorie, plus insolite que les deux premières mais non moins grave, est l’activité consistant à harceler et traquer une personne dans les lieux publics et jusque dans la sphère du privé et dont certains cas se sont soldés par le meurtre de la victime. Cette activité s’appelle au Japon « stôkâ » (ストーカー) de l’anglais « stalker ».
Pour le seul cas du chikan, la situation est préoccupante.
Il faut d’abord avoir à l’esprit que le Japon concentre la quasi totalité de sa population, soit 127 millions d’habitants, sur un territoire grand comme le Benelux (oui, peu de plaines, énormément de montagnes quasi sauvages!) et Tokyo, la plus grande mégalopole du monde, s’étend sur une surface incroyablement vaste. Pourtant, le système routier est loin d’être roi dans les agglomérations nippones. A contrario, le réseau ferré japonais est ultra-moderneset incroyablement bien organisé et les trains restent le moyen de transport incontournable pour la population japonaise qui, lors des rushs, n’ont rien à envier aux sardines en boites.
Quoi qu’il en soit, c’est dans ces trains bondés que les pervers japonais sévissent le plus.
L’ambiance dans les trains au Japon est assez spéciale. Tout le monde s’évite du regard et la plus part des voyageurs sont trop occupés à tapoter sur leur portable, lire, ou récupérer quelques minutes de sommeil pour s’occuper de la vie de leur voisin. Par ailleurs, il est consternant de constater que même lorsqu’un évènement inhabituel se produit (une dispute, un bébé qui se met à hurler, un homme ayant trop bu se mettant à geindre…), pas une personne ou presque ne se retournera pour examiner l’insolite scène. Et si un individu se met à toucher directement une victime, il y a de bonnes chances pour que personne ne s ‘en aperçoive. Il est fâcheux aussi de constater que dans bon nombres de cas de chikan, la victime n’osera demander de l’aide à un tiers (honte) ni même tenter quoi que ce soit (peur). Elle se laissera alors tripoter jusqu’à l’arrêt suivant, ce qui peut prendre un temps relativement long sur les lignes express de grandes banlieues.
Lors des 6 premiers mois de l’année 2009, 708 cas de chikan faisant l’œuvre de plainte ont été recensées mais il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg car un nombre effectif hautement supérieur ne fait pas l’œuvre de plainte. Et ce nombre ne fait qu’augmenter.
Une étude réalisée dans la ville de Hiroshima montre que 36,9 % des agresseurs ont entre 30 et 39 ans. 21,7 % ont entre 20 et 29 ans et 20,6 % entrent dans la catégorie des 40-49 ans. La loi stipule qu’ils encourent une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans ou une amende allant jusqu’à 50.000 yens.
Le phénomène est allé encore plus loin et les agresseurs deviennent organisés. Aussi, des réunions s’organisant sur le net permettent aux criminels de se donner rendez-vous dans un lieu à une heure précise, afin d’opérer en bande et ainsi de toucher leur victimes à l’abri des regards, entourés et cachés par leurs complices.
Le train est aussi le lieu favori de ceux qui prennent des photos sous les jupes des lycéennes en uniforme scolaire ou des jeunes employées. Les plus experts en électronique useront d’inventivité pour cacher l’appareil photo dans une mallette ou un sac, les autres se contenterons d’utiliser leur téléphone portable. Ce phénomène est si rependu que la société Apple a décidé de ne pas incorporer sur ses iPhone d’option silencieuse au déclenchement de l’appareil photo sur le marché japonais et de nombreuses compagnies de téléphones ont suivi cet exemple. Dernièrement, l’équipe olympique japonaise de natation a fait la une des scandales avec des photos prises par des appareils ayant une fonction infrarouge permettant de voir à travers les vêtements. Depuis 2004, les nageuses nippones sont équipées de maillots bloquant ce rayonnement et des entreprises ont même commercialisé ce tissu pour la gamme de leurs sous-vêtements grand publique.
Alors, qu’est-ce qui pousse un si grand nombre de Japonais à agir de la sorte ? Quelles en sont les causes.
Alors qu’il est si facile d’observer l’industrie du sexe dans la rue (présence de love hôtel, nudité sur les couverture de magazines dans les combini, présence de quartiers chaud), le sexe reste un sujet délicat et n’est que trop peu évoqué au sein de la famille et dans l’éducation. La communication entre les deux sexes est-elle insuffisante ? Notons dans tout les cas la difficulté pour les jeunes couples d’entretenir une relation simple et épanouie dans une société où la vie en concubinage sous le même toit ne se fait qu’après le mariage. La difficulté d’entretenir une intimité dans la vie post mariage est elle aussi réelle car le mari est accaparé en temps et en énergie par son travail et la femme n’endosse plus que son costume de mère à plein temps délaissant son rôle d’épouse et les plaisirs conjugaux qui vont de paire. Au Japon, 30 pourcents des couples mariés n’ont pas fait l’amour depuis plus d’un mois et rentrent dans la catégorie des « sex less ». Une autre étude faite sur une trentaine de pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique place le Japon dernier en nombre de relation sexuelle et en taux de satisfaction de l’acte.
Alors que le sexe « simple » et conventionnel devient difficile d’accès, les supports à caractère porno mettant en scène de véritables fantasmes malsain (manga, hentaï, vidéo, …), la présence de bars à thèmes où des hôtesses en mini jupe sans culottes se mettent à faire les soubrettes ou bien encore la prostitution de lycéennes et d’étudiantes dite « de confort matériel » (car elle a pour objectif l’achat de produit n’étant pas de première nécessité) se vulgarise et amène dans les mœurs l’idée d’un sexe fantasme, facile et bon marché.
En 1985 Le Japon a ratifié, la convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) mais la Division pour le Développement des Femmes (branche de L’ONU) s’inquiète de la banalisation de la violence sexuelle au Japon et ce n’est pas la présence en vente sur Amazon Japon d’un jeu vidéo dans lequel le but du jeu est de violer une mère et sa fille dans un train qui va rassurer (le jeu a été retiré il y a peu).
Toutefois, l’opinion publique se mobilise et les actions pour stopper les cas de chikan se multiplient.
Depuis 2001, des wagons entièrement réservés aux femmes pendant les heures de pointe sont disponibles dans les agglomérations de Tôkyô et d’Ôsaka.
De même, cette année, des annonces vocales dans les gares signalent, tel la RATP avec ses pickpockets, la présence de tripoteurs susceptibles d’agir sur la ligne. De plus, des policiers en civil et des brigades spéciales en uniformes sont déployées sur le réseau de Tôkyô.
Enfin -et c’est peut être là la nouvelle la plus réjouissante- de plus en plus de femmes osent crier « chikan » à la présence d’une main baladeuse. Et cette manifestation de lycéennes à la station Ikebukuro portant les écriteaux « l’attouchement est méprisable, ne le pardonnons pas ! » sera peut être à l’aube de changer l’image de la femme-objet que bien trop de Japonais entretiennent.
Par Antoine Legastelois
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