Voici ce que m'a transmis un professeur d'une université algérienne:
Comment sont traités (par les Services de visa) les universitaires Algériens qui se rendent en France dans le cadre de collaboration scientifique ?
Il y a quelques jours un de nos collègues (Professeur d’Université) a reçu la notification de refus de visa pour la France. C’est la première fois que cela arrive. On lui a écrit : « Les informations communiquées pour justifier l’objet et les conditions du séjour ne sont pas fiables ».
Tous les ans, sa demande est acceptée; avec toujours un dossier aussi convaincant (stage, accueil, ressources, justificatifs en tout genre, lettre d’appui du Vice-Recteur Chargé des Relations Extérieures (de notre Université), …. Il a des relations de recherche avec un laboratoire d’une université française, et s’y rend régulièrement ; Les services de sécurité de l’université d’accueil avaient pourtant contacté la personne qui l’a invité, et qui a confirmé sa venue attendue, avec la période, …
Nous avons été très choqués par cet événement « de type nouveau ». Nous avons l’habitude de voir à chaque fois la liste des pièces à fournir encore plus longue, nous avons l’habitude des retards de plus d’un mois (alors que le jour du dépôt de dossier on nous assure « vous aurez la réponse dans 15 à 20 jours maximum »).
Chacun de nous ne sait plus programmer une visite en France ; on nous demande de présenter une réservation d’hôtel avec des dates précises, une assurance de voyage avec des dates précises, une autorisation d’absence des autorités de notre université avec des dates précises, et quand on a réussi à obtenir tout cela, la programmation du séjour prévu est bafouée par le service des visas, on n’en tient pas compte !! Et le visa « arrive » (quand il arrive) avec beaucoup de retard. Dernièrement, un de nos étudiants doctorants devait aller à Grenoble participer à une Conférence Internationale ; avec toutes les difficultés que cela suppose, il a réussi à obtenir un financement intégral de notre université, il devait y présenter un poster ; il a réglé toutes les formalités… Sauf une… Il a obtenu son visa le 8 Août, la Conférence a eu lieu du 21 au 27 Juillet !!! Pourtant c’était bien clair, il demandait le visa pour se rendre à cette Conférence, et les dates figuraient dans toutes les pièces du dossier… Il n’est pas parti, car pourquoi ?
Notez la grande aberration : le collègue (à qui le visa a été refusé) vient d’être contacté par le Centre Culturel Français d’Oran pour présenter une Conférence à la manifestation scientifique : « La fête de la Science », qui se déroulera au CCF du 10 au 22 Octobre. De plus, il est invité par l’université de Paris-Créteil à contribuer au Séminaire « Armoire de TP de Physique » en Janvier 2012. On lui refuse pourtant d’entrer en France !
Une autre aberration : pour chaque demandeur de visa, une enquête « de sécurité » est faite ; chaque fois, à chaque demande, tous les ans, des dizaines de fois… Comme si c’était la première fois !
Il faut dire que ces jours-ci nous raisonnons autrement, ne comprenant plus cette « escalade », ne sachant pas si on veut empêcher les échanges scientifiques, malgré les grands discours et les investissements sur la coopération. Que faut-il comprendre de cela ?
Tout cela pèse énormément, nous affecte énormément, cela exige de nous d’être très forts pour supporter, et suscite cette question qui revient : « Mais pourquoi accepte-t-on cela ?». Il y a des pays où on jure de ne plus retourner, pour des raisons bien moindres ; mais les liens sont si forts avec la France, avec aussi les amis que nous y avons, que nous continuons à subir cette situation. Cela dépasse même le fait de faire de la physique là où on apprend beaucoup, c’est aussi « être avec des Français que nous aimons », et plus encore, « être en France» dans le pays historiquement de libertés, d’accueil, de mélange de populations.
Nos amis Français sont tout autant offusqués par la situation, c’est leur soutien qui nous encourage… Mais jusqu’à quand ?
Source Mediapart
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