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Egypte/Les Frères Musulmans égyptiens à l’épreuve de la révolution 3/3

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    Egypte/Les Frères Musulmans égyptiens à l’épreuve de la révolution 3/3
    René Naba | 26.10.2011 | Paris
    IV- Les Frères Musulmans, la principale force d’opposition
    A cette époque, le Président Moubarak avait dû faire face à une vingtaine d’attentats dont les plus célèbres auront été, en 1993, l’attaque de Sidi Barani contre le convoi présidentiel alors que le président égyptien se rendait par la route en Libye pour rencontrer le colonel Kadhafi, et en 1994, la tentative aux Etats-Unis qui avait entraîné la mise en cause du Cheikh Omar Abdel Rahman, chef des intégristes égyptien en exil sur le territoire américain.
    Pendant deux décennies, Hosni Moubarak alterne la carotte et le bâton, utilisant les Frères Musulmans comme soupape de sûreté aux trop fortes pressions israéliennes ou américaines, concédant à la confrérie une large autonomie dans la gestion de la sphère culturelle et sociale, la bridant au gré des virages, réservant à sa coterie les lucratifs contrats de marchés publics.
    Par un lent travail de grignotage de la sphère de vie civile, la confrérie réussira à devenir le premier groupe d’opposition à l’assemblée du peuple avec un contingent de quatre vingt huit députés sur quatre cent cinquante quatre, sans toutefois réussir à infléchir, ni la logique de vassalité égyptienne à l’égard de l’axe israélo-américain, ni la paupérisation croissante de la société du fait de la politique népotique et corruptrice de Hosni Moubarak. Disposant d’un statut hybride au sein de l’état égyptien, une association tolérée mais non légale, la confrérie se trouvait en pleine stagnation, conduisant des membres influents à prôner un véritable «aggiornamento» pour sortir de l’impasse dans lequel le pouvoir égyptien tentait de les enfermer. Bon nombre des membres de l’organisation ont ainsi opté pour le costume à l’occidentale, renonçant à la tenue traditionnelle, élargissant leur recrutement aux diplômés des grandes écoles.
    La nouvelle garde a déclaré son attachement à la souveraineté du peuple, à l’alternance démocratique et aux droits des minorités. Des propos confirmés le 6 mars 2011, à Alain Juppé, lors de sa rencontre au Caire avec une délégation des Frères Musulmans, premier déplacement à l’étranger du ministre français des affaires étrangères, de l’ère post Moubarak.
    Une impasse idéologique suicidaire s’est manifestée avec acuité lors de la destruction de l’enclave palestinienne de Gaza (décembre 2008-janvier 2009), avec la complicité passive des grands pays arabes sunnites (Egypte, Arabie saoudite, Jordanie).
    L’alliance avec le chef de file de l’Islam sunnite arabe (l’Arabie saoudite), conduit à la destruction de l’unique organisation sunnite arabe prônant la lutte armée contre Israël (le Hamas, filiale palestinienne des Frères Musulmans), laissant le champ libre au Hezbollah chiite, et, indirectement au mouvement «Al Qaeda», le rival idéologique de la confrérie sur le plan sunnite.
    Pareille déconvenue était survenue à d’autres organisations islamiques, notamment le GIS algérien de M. Abassi Madani, lors du débarquement de cinq mille soldats occidentaux (été 1990), en Arabie Saoudite, pour se lancer à l’assaut de l’Irak depuis la terre sainte de l’Islam.
    A la fin de février, alors que le pouvoir de Hosni Moubarak chancelait, les Frères musulmans ont décidé de créer le «Parti de la liberté et de la justice»: un bras politique qui pourrait leur permettre d’influer sur l’avenir du pays.
    S’il est vrai que la révolte égyptienne a été impulsée et conduite par une coalition de forces politiques, secondée par des réseaux d’internautes, à dominante laïque et démocratique, il n’en est pas moins vrai que les organisations de la mouvance islamique ou leurs membres à titre individuel ont pris part à ce mouvement. Sur un pied d’égalité avec des formations d’importance marginale avant le début du soulèvement, des groupes plus proches des dissidents est-européens de 1989 que des partis de masse ou des avant-gardes révolutionnaires, acteurs traditionnels des révolutions sociales.
    Si dans le cas tunisien, observe Gilbert Achcar (politologue), dans la dernière livraison du Monde diplomatique en date de Mars 2011, la discrétion du mouvement islamiste peut largement s’expliquer par la férocité de la répression qui a entravé la capacité d’action du parti En Nahda, c’est paradoxalement dans leur statut même de parti toléré par le régime militaire que se trouve la clé de l’attitude pusillanime adoptée par les Frères musulmans égyptiens.
    A l’instar de son prédécesseur Sadate qui avait retourné contre lui l’opinion lors de son «automne de la colère» (1981) en muselant l’opposition, Moubarak, présumant de ses forces, commet la même erreur 30 ans plus tard. A la veille des élections législatives de décembre 2010, prélude à la reconduction d’un sixième mandat à la tête de l’Etat, il écarte l’opposition de la consultation électorale avec la complicité passive de ses parrains occidentaux qui réservent leurs critiques et leurs menaces au seul Laurent Gbagbo de Côte d’Ivoire, dont la réélection a eu lieu le même jour que le scrutin égyptien.
    L’un comme l’autre, ils se lancent dans une opération de diversion à connotation religieuse. Sadate bannit dans un couvent du Sinaï le chef de l’Eglise copte, le Pape Shenouda,, alors que sept millions de coptes vivent en Egypte, représentant dix pour cent de la population et autant dans la diaspora occidentale, particulièrement aux Etats-Unis et en Europe. Habitants originels, le pays tirant son nom du leur, ils sont la minorité chrétienne la plus importante du Moyen Orient.
    Shenouda, un patriote à toute épreuve, s’est distingué comme simple soldat sur le front de Suez, en 1956, et, par crainte d’une instrumentalisation des coptes dans le conflit israélo-arabe, avait interdit à ses ouailles d’effectuer le pèlerinage des Lieux Saints chrétiens de Jérusalem tant que les Palestiniens n’auront pas eu droit à leur Etat.
    Moubarak, par l’entremise de son ministre de l’intérieur, Habib Al Adli, cautionne l’attentat contre une église d’Alexandrie lors de la fête de la nativité des Coptes (fin décembre 2010), suscitant une vague d’indignation à travers le Monde et un élan de solidarité sans pareil au sein de la population égyptienne, prélude aux manifestations Place Tahrir. Présomption fatale qui abrogera son mandat et démasquera son imposture aux yeux de l’opinion internationale.
    Au total, depuis l’avènement de la République en Egypte, les relations en dent de scies entre l’armée et les Frères Musulmans se sont soldées négativement par l’assassinat d’un président (Sadate) par un islamiste, et par la participation des Frères Musulmans à la chute d’un deuxième président (Moubarak) en représailles à la répression dont ils auront été l’objet de sa part, tout au long
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