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«L’Etat algérien reste encore un rêve»

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  • «L’Etat algérien reste encore un rêve»

    Mostafa Hemissi est journaliste, chroniqueur et conseilleur dans le secteur des médias. Le livre De Barberousse à Bouteflika. Comment l’Algérie est-elle gouvernée, paru à Alger aux éditions Dar Houma, est un travail de recherche qui a duré trois ans. L’auteur essaye de décortiquer les mécanismes de gouvernance ayant régi l’Algérie depuis 500 ans.


    Quelles ont été les motivations pour entreprendre l’écriture de De Barberousse à Bouteflika. Comment l’Algérie est-elle gouvernée ?

    C’est une initiative personnelle pour tenter de comprendre et essayer de répondre à une cruciale question : «Pourquoi l’Algérie est-elle gouvernée de la façon qu’on connaît ? Une question que se posent régulièrement beaucoup d’Algériens. Des questions d’ordre méthodologique sont apparues. Dans mes recherches, j’ai découvert que ce qui est écrit en grande partie sur le sujet évoque seulement «les politiques» et ne traite pas des institutions. Donc, comment se créent les institutions et quelle est la nature de la relation entre le sommet de la hiérarchie et le peuple ?

    Y a-t-il un «système habituel» dans la gestion de cette relation entre les Algériens et les gouvernants. Je suis revenu à deux importants épisodes de l’histoire contemporaine de l’Algérie, entre autres la domination ottomane, particulièrement l’époque des deys, avec ce qu’ils ont créé comme institutions et les techniques de gestion et de relation avec le peuple. En second lieu, la période de l’occupation française, en mettant en relief l’administration coloniale et ce qu’elle a adopté comme mécanismes.

    Dans votre livre, vous dites que la relation entre le pouvoir en place et le peuple n’a pas beaucoup évolué depuis l’époque ottomane…

    Depuis la période des deys ottomans, ce sont les mêmes techniques de la médiation (el wassata) et la délégation (el wakala) qui sont appliquées. Ce mode de gouvernance est entretenu par des groupes communautaires pour et par le pouvoir. C’est un moyen pour interdire à la société de s’exprimer. El wassata s’exerce à travers des chefs tribaux, les zaouïas, les hommes de religion et d’autres parties. Elle a deux objectifs : la protection du pouvoir réel en place de toute punition populaire (soulèvement), et empêcher toute représentation du peuple et de ses intérêts. El wakala a également débuté sous l’ère ottomane. Le sultan octroyait le pouvoir aux deys et ce, après le consensus trouvé entre les corsaires (ryas el bahr) et l’odjak, qui comprenait les janissaires (inkicharya).

    Le dey délègue le pouvoir au bey, et les beys aux caïds. El wassata et el wakala ont été pratiquées, à quelques différences près, par l’administration coloniale française, tout en y ajoutant des éléments. J’appelle cette période «le nouveau makhzen», puisqu’un réseau de caïds et de bachaghas s’est constitué. Ce qui est certain, c’est que l’autorité coloniale française n’a pas appliqué les textes juridiques modernes dans sa relation avec le peuple algérien. Et celui qui relit le code de l’indigénat peut le vérifier. Aujourd’hui, beaucoup de partis politiques, de zaouïas, d’hommes de religion exercent la fonction de wassit. L’Etat algérien reste encore un rêve, et il n’est même pas au stade de projet.

    Vous dites que le Front de libération nationale (FLN) est l’élite qui gouverne l’Algérie. Pourquoi ?

    J’ai parlé dans ce livre du système du FLN et non du FLN en tant que parti, car il n’a pas vraiment pratiqué d’activités politiques. Avec les organisations de masse, on a confié au FLN un rôle minime pour jouer le rôle d’el wassata. Mais le pouvoir a utilisé le système du FLN pour légitimer son autorité, et ce, jusqu’à l’apparition du multipartisme, même de façade. Mais tout s’est arrêté après le coup d’Etat de 1992. Et la question de savoir qui détient le pouvoir en Algérie reste un débat et mon essai ne s’est pas focalisé sur cet aspect, sauf concernant le volet de «qui crée les institutions» et dans quelle logique.

    La période Boumediène, par exemple, était riche politiquement, mais pauvre institutionnellement. Le pouvoir actuel a créé des institutions après s’être débarrassé de ce qui existait avant 1992, comme les conseils, la présidence et les assemblés élues. Il a créé des institutions répondant à ses calculs politiciens. Et cela sans prendre en compte la représentativité des Algériens ou la représentation des différents intérêts dans le pays. Le peuple demeure absent dans la prise de décision, comme à l’époque des deys et du colonialisme.

    _Vous avez choisi la méthodologie d’Ibn Khaldoun. Est-elle pour vous la seule manière de comprendre l’histoire politique de l’Algérie ?

    Il faut rappeler que l’approche d’Ibn Khaldoun étudie essentiellement les sociétés telles qu’elles sont, sans préalable idéologique ou religieux. Raison pour laquelle j’ai essayé d’analyser les données sans arrière-pensées partisanes et sans prendre de position.
    J’ai terminé ma recherche en tirant des conclusions et en donnant des explications sur les institutions et les mécanismes de gouvernance en Algérie. Ibn Khaldoun est intéressant à plus d’un titre, notamment pour comprendre comment naissent les institutions.

    _El Assabya est-elle en vigueur aujourd’hui ? La Révolution de novembre 1954 est-elle une nouvelle Assabiya ?

    De ce point de vue, revenir à Ibn khaldoun devient nécessaire et utile. Les décideurs algériens sont dans une phase d’exercice de pouvoir (hokm). Ils n’ont pas de vision ni de volonté pour construire «l’Etat des institutions», ni l’Etat de droit dans lequel les citoyens seraient les premiers acteurs dans la prise de décisions. «L’Etat des institutions» n’a jamais vu le jour, même si, de 1980 à 1988, nous étions plus proches du centralisme démocratique. Le FLN était doté d’instances permanentes, mais il était utilisé comme un moyen politique et parfois comme producteur de discours politiques. J’en conclus que Boumediène a gouverné par l’armée, puisque, durant sa présidence, les institutions étaient absentes ou vides de toute substance.

    De même, il n’y avait pas de Constitution. Autre conclusion, l’armée a gouverné après Boumediène qui a remis sur les rails les techniques de wassata et de wakala. Jusqu’ au jour d’aujourd’hui, le commandement de l’armée est celui qui délègue le pouvoir à telle ou telle personnalité. Cette technique a été fortement utilisée durant la colonisation, notamment avant le déclenchement de la Révolution. Le pouvoir réel empêche el wakala de s’institutionnaliser pour ne jamais permettre à l’élite, qui ne provient pas directement du sérail ou celle qui ne dépend pas de lui, de se cristalliser autour de centres autonomes. Pour cela, il est important d’appeler aujourd’hui à la création de «l’Etat des institutions» pour construire un Etat où priment les droits et les libertés. Cela est le commencement de tout, et sans cela aucun changement n’est possible.

    Par Mehdi Bsikri

    Source : elwatan.com
    La pire chose pour l'Homme, serait qu'il meurt idiot.
    De grâce épargnez-moi la prolixe, la syntaxe et la chiffrerie à tout va
    .
    Merci.
    " TOUCHE PAS A MA NAPPE ALBIENNE "

  • #2
    Le dey délègue le pouvoir au bey, et les beys aux caïds. El wassata et el wakala ont été pratiquées, à quelques différences près, par l’administration coloniale française, tout en y ajoutant des éléments. J’appelle cette période «le nouveau makhzen», puisqu’un réseau de caïds et de bachaghas s’est constitué. Ce qui est certain, c’est que l’autorité coloniale française n’a pas appliqué les textes juridiques modernes dans sa relation avec le peuple algérien. Et celui qui relit le code de l’indigénat peut le vérifier. Aujourd’hui, beaucoup de partis politiques, de zaouïas, d’hommes de religion exercent la fonction de wassit. L’Etat algérien reste encore un rêve, et il n’est même pas au stade de projet.

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    Bref un makhzen à l’algérienne !!!

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