Si le succès des islamistes en Tunisie inquiète certains Algériens, d'autres en revanche s'en réjouissent.
Dans un pays marqué par une décennie de violence terroriste, les réactions à la montée en puissance rapide d'un parti islamiste en Tunisie ont été variées et contradictoires. La victoire électorale d'Ennahda a fait ressurgir des souvenirs douloureux pour les victimes de la Décennie noire en Algérie, mais a été un grand encouragement pour les islamistes locaux.
"Dans les pays arabes d'aujourd’hui, la seule alternative réelle ne peut venir que du courant islamiste, car c’est lui qui représente la majorité de la population et répond à ses aspirations", a déclaré Bouguerra Soltani, président du Mouvement pour la société de la paix (MSP).
Pour Soltani, dont le parti islamiste possède un siège à l'Assemblée populaire nationale et participe au gouvernement depuis 1995, il ne fait aucun doute que ce qui s'est produit en Tunisie peut se reproduire en Algérie.
"La mouvance islamiste gagnera les prochaines élections en Algérie, pour peu qu’elles soient transparentes", a-t-il expliqué.
A l'instar de son rival, Abdellah Djaballah n'exclut pas la possibilité d'une "contagion" du raz de marée islamiste en Algérie.
"Notre parti oeuvre en faveur de l'intégration du monde arabe ; on ne peut pas être étranger à ce qui s’y passe", a expliqué Djaballah, qui a récemment créé un nouveau parti, le Front pour la justice et le développement (FJD).
"Pourquoi certains crient-ils au loup quand c’est un parti islamiste qui gagne dans le monde arabe, alors que quand c’est un autre parti, ils applaudissent même s'il a fraudé ?", s'interroge Djaballah, membre fondateur du parti Ennahda en Algérie au début des années 1990.
Abdelmadjid Menasra, membre du Front pour le changement national (FCN) et dissident du parti de Soltani, fait valoir que le succès des islamistes en Tunisie est le résultat des mauvaises décisions prises par l'ancien régime déchu.
"Depuis l’ère du Président Habib Bourguiba et jusqu'à celle de Ben Ali, c'est-à-dire pendant plus de cinquante ans, les deux régimes ont imposé de force la laïcité au peuple tunisien", a-t-il expliqué. "Dès que l’opportunité de s’exprimer librement s’est présentée à ce peuple, il a rejeté la laïcité."
Mais pour de nombreux Algériens, le succès du parti de Rachid Ghannouchi ravive les souvenirs des moments les plus noirs de l'histoire récente de l'Algérie. Le souvenir des violences terroristes est encore vif parmi les survivants de la Décennie noire.
"Nous sortons d'une horrible guerre civile qui a coûté 200 000 vies ; les blessures et la douleur sont encore vives, et nous ne sommes certainement pas prêts à revivre le même scénario", a déclaré Adja, une habitante de Bentalha, une banlieue à l'est d'Alger, témoin de quelques-uns des pires bains de sang de la guerre civile.
Pour Said, employé dans une entreprise de sécurité, le mot "islamiste" est lié au massacre du Boulevard Amirouche au centre d'Alger en 1995.
"J'ai vu les corps de femmes et d'enfants déchirés en pièces dans un bus piégé devant le commissariat central", se rappelle-t-il.
"Je ne suis pas contre l'Islam, mais l'islamisme m'a privé de la chance de vivre avec mon père", a expliqué Nadia, étudiante en économie, la gorge prise par l'émotion. Son père, un civil employé au ministère de la Défense, a été assassiné en décembre 1998.
Alors que les craintes de la violence terroriste planent sur certains éléments de la société algérienne, des universitaires tentent de relativiser la portée de l'émergence de ce courant régional.
"Il n’y aura pas d’Etat théocratique en Tunisie", a déclaré le politologue et ancien responsable au ministère algérien des Affaires étrangères Abdelaziz Djerad sur les ondes nationales le 25 octobre. "Nos élites au Maghreb confondent un certain nombre de choses. Je ne pense pas non plus que la Libye ira vers un Etat théocratique. Il y aura peut être une connotation plus musulmane qu’ailleurs, mais je ne pense pas que le péril théocratique s’installera au Maghreb."
Les sociétés du Maghreb doivent apprendre de l'expérience tunisienne et éviter toute dérive vers le fondamentalisme, a-t-il ajouté.
"Ce qui va se passer en Égypte avec les frères musulmans est extrêmement important", a-t-il ajouté. "D’autre part, il y a une tendance internationale qui accepte que les islamistes jouent un rôle sur le plan politique, mais avec d’autres forces patriotiques et démocratiques. On ne peut pas négliger des forces qui ont une expression dans la réalité sociale et culturelle dans les pays arabo-musulmans."
Source: Magharebia
Dans un pays marqué par une décennie de violence terroriste, les réactions à la montée en puissance rapide d'un parti islamiste en Tunisie ont été variées et contradictoires. La victoire électorale d'Ennahda a fait ressurgir des souvenirs douloureux pour les victimes de la Décennie noire en Algérie, mais a été un grand encouragement pour les islamistes locaux.
"Dans les pays arabes d'aujourd’hui, la seule alternative réelle ne peut venir que du courant islamiste, car c’est lui qui représente la majorité de la population et répond à ses aspirations", a déclaré Bouguerra Soltani, président du Mouvement pour la société de la paix (MSP).
Pour Soltani, dont le parti islamiste possède un siège à l'Assemblée populaire nationale et participe au gouvernement depuis 1995, il ne fait aucun doute que ce qui s'est produit en Tunisie peut se reproduire en Algérie.
"La mouvance islamiste gagnera les prochaines élections en Algérie, pour peu qu’elles soient transparentes", a-t-il expliqué.
A l'instar de son rival, Abdellah Djaballah n'exclut pas la possibilité d'une "contagion" du raz de marée islamiste en Algérie.
"Notre parti oeuvre en faveur de l'intégration du monde arabe ; on ne peut pas être étranger à ce qui s’y passe", a expliqué Djaballah, qui a récemment créé un nouveau parti, le Front pour la justice et le développement (FJD).
"Pourquoi certains crient-ils au loup quand c’est un parti islamiste qui gagne dans le monde arabe, alors que quand c’est un autre parti, ils applaudissent même s'il a fraudé ?", s'interroge Djaballah, membre fondateur du parti Ennahda en Algérie au début des années 1990.
Abdelmadjid Menasra, membre du Front pour le changement national (FCN) et dissident du parti de Soltani, fait valoir que le succès des islamistes en Tunisie est le résultat des mauvaises décisions prises par l'ancien régime déchu.
"Depuis l’ère du Président Habib Bourguiba et jusqu'à celle de Ben Ali, c'est-à-dire pendant plus de cinquante ans, les deux régimes ont imposé de force la laïcité au peuple tunisien", a-t-il expliqué. "Dès que l’opportunité de s’exprimer librement s’est présentée à ce peuple, il a rejeté la laïcité."
Mais pour de nombreux Algériens, le succès du parti de Rachid Ghannouchi ravive les souvenirs des moments les plus noirs de l'histoire récente de l'Algérie. Le souvenir des violences terroristes est encore vif parmi les survivants de la Décennie noire.
"Nous sortons d'une horrible guerre civile qui a coûté 200 000 vies ; les blessures et la douleur sont encore vives, et nous ne sommes certainement pas prêts à revivre le même scénario", a déclaré Adja, une habitante de Bentalha, une banlieue à l'est d'Alger, témoin de quelques-uns des pires bains de sang de la guerre civile.
Pour Said, employé dans une entreprise de sécurité, le mot "islamiste" est lié au massacre du Boulevard Amirouche au centre d'Alger en 1995.
"J'ai vu les corps de femmes et d'enfants déchirés en pièces dans un bus piégé devant le commissariat central", se rappelle-t-il.
"Je ne suis pas contre l'Islam, mais l'islamisme m'a privé de la chance de vivre avec mon père", a expliqué Nadia, étudiante en économie, la gorge prise par l'émotion. Son père, un civil employé au ministère de la Défense, a été assassiné en décembre 1998.
Alors que les craintes de la violence terroriste planent sur certains éléments de la société algérienne, des universitaires tentent de relativiser la portée de l'émergence de ce courant régional.
"Il n’y aura pas d’Etat théocratique en Tunisie", a déclaré le politologue et ancien responsable au ministère algérien des Affaires étrangères Abdelaziz Djerad sur les ondes nationales le 25 octobre. "Nos élites au Maghreb confondent un certain nombre de choses. Je ne pense pas non plus que la Libye ira vers un Etat théocratique. Il y aura peut être une connotation plus musulmane qu’ailleurs, mais je ne pense pas que le péril théocratique s’installera au Maghreb."
Les sociétés du Maghreb doivent apprendre de l'expérience tunisienne et éviter toute dérive vers le fondamentalisme, a-t-il ajouté.
"Ce qui va se passer en Égypte avec les frères musulmans est extrêmement important", a-t-il ajouté. "D’autre part, il y a une tendance internationale qui accepte que les islamistes jouent un rôle sur le plan politique, mais avec d’autres forces patriotiques et démocratiques. On ne peut pas négliger des forces qui ont une expression dans la réalité sociale et culturelle dans les pays arabo-musulmans."
Source: Magharebia
Commentaire