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Au Koweït, le défi de la reconversion économique.

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  • Au Koweït, le défi de la reconversion économique.

    Dépendant exclusivement de l’or noir, l’économie du pays doit se transformer car, dans quelques décennies, le pays pourrait ne plus être en mesure d’assurer le train de vie ultra-cossu de son million de citoyens

    N’en déplaise aux membres de la famille régnante Al-Sabah, le véritable monarque du Koweït est sous le sable du désert. Le pays repose sur des océans de pétrole qui ont fait sa colossale fortune. Estimées à 101 milliards de barils, les réserves paraissent inépuisables, et on vit comme si, effectivement, c’était le cas. Or tous les indicateurs montrent que, si le Koweït n’opère pas un changement de cap radical, dans quelques décennies, le pays pourrait ne plus être en mesure d’assurer le train de vie ultra-cossu de son million de citoyens.

    Tout est subventionné

    Au contraire des Printemps arabes, qui ont vu des voix populaires revendicatives renverser des régimes honnis, au Koweït, la «révolution» devra venir par le haut. Il appartient aux politiques de mener le pays dans la voie d’une rentabilité économique organisée pour, lentement, abandonner la vie sous la rente pétrolière. Ici, tout est subventionné grâce au pétrole. Le terrain à bâtir est gratuit (particuliers, hôtels, hôpitaux, écoles…) ou proposé par l’Etat à moins de 1 franc le mètre carré (industrie lourde). Les bourses d’études pour l’étranger permettent aux étudiants d’aller jusqu’au master sans difficultés d’argent. Et le litre d’essence coûte 18 centimes de francs, et le prix de l’électricité est de 0,002 fils, soit 0,006 centime, mettant le Koweït, énorme consommateur, au sommet des énergivores: 43,2 kWh par personne par jour; à comparer avec l’Allemagne, 18,5. Mais la manne pétrolière ne permet pas que ces subventions. Dans un pays où le revenu moyen dépasse les 38 400 francs par an, le sucre et le pain sont aussi subventionnés, tout comme les divorces.

    Le pétrole donne aux Koweïtiens une vie perçue, par les observateurs extérieurs, comme celle du farniente, roulant dans de belles voitures, n’ayant d’autres occupations que le shopping de luxe et le restaurant le soir, au bord de la mer. Or les limousines roulent vers un précipice.

    Selon les dernières études, le pays devrait voir augmenter ses revenus si le prix du baril de brut et la production (2,8 millions de barils par jour) se maintiennent. Un rapide calcul, pourtant, ramène les choses à plus de réalité: l’industrie du pétrole compte pour 50% du PIB et représente 94% du total des exportations (2007). Le Koweït est dépendant de son pétrole. L’or noir n’est pas illimité, malgré l’annonce de nouveaux gisements dans le nord et l’ouest du pays. Le niveau de vie, «meilleur que la Suisse» dit une jeune femme souriante, ne pourra se maintenir et on prévoit déjà dès 2020, des essoufflements.

    3900 francs de rente

    Le défi est d’une importance capitale pour le Koweït; s’il ne change pas de mode de vie et de financement, le pays court à sa perte. Il emploie 90% de sa force vive dans les administrations. La moyenne de rente assurée par l’Etat pour chaque fonctionnaire est de 3900 francs par mois, plus le salaire. A mots couverts, sans jamais citer de chiffres, on évoque: «plusieurs fois ça…», avec des gestes de la main qui en disent long sur les revenus qu’il suffit d’attendre chaque mois. La moitié des recettes pétrolières paie les salaires. Si une baisse se produit, comme ce fut le cas par le passé, on maintient les revenus en puisant dans le fonds des pensions futures. 15% de la manne est aussi consacrée par l’Etat à l’entretien des administrations (meubles, bâtiments, voyages…). Restent 35 à 40%, dont 10% vont au fonds de pension pour les générations futures (doté d’environ 265 milliards de francs) et près de 5 partent en placements, dans des banques ou l’immobilier.

    A ce rythme de dépenses et en y ajoutant celles de l’armée (environ 9,2 milliards de francs), grosso modo, l’Etat paie en dépenses courantes une moyenne de 35 milliards de francs par an; ce qui est déjà disproportionné et déraisonnable, comme le souligne un rapport rédigé par Tony Blair, l’ancien premier ministre britannique reconverti en consultant auprès de la monarchie koweïtienne. Or tout le monde voudrait gagner plus, à l’instar des employés de la compagnie nationale d’aviation Kuweit Airways, en faillite depuis des années, et qui vient d’accorder, suite à une grève, 30% d’augmentation de salaire! Déroutant, dans un pays où, selon la Banque mondiale, la productivité moyenne de chaque salarié est de 7 minutes par heure.

    Progrès invisibles

    Reste, par ailleurs, la question du rôle que veut jouer le Koweït dans la région et de sa reconversion en économie de marché non subventionnée. A ce jour, les progrès sont invisibles, car les blocages et les capacités de nuisance des divers clans politiques paralysent la vie sociale en dépit de la volonté apparente de l’émir Sabah IV.

    Par Alfonso Artico
    Le Temps
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
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